L'article suivant est traduit de la page 16 du Canadian Social Crediter du 5 décembre. Il est dû à la plume de Norman James, député provincial en Alberta. Il lui fut inspiré par la mort de deux jeunes gens, pleins d'avenir, tués au front. L'un, aviateur, laisse une jeune épouse et un enfant au berceau ; l'autre, de l'infanterie, laisse un père, une mère et une sœur. Et ce ne sont là, remarque l'auteur, que deux cas parmi des centaines de mille autres semblables chez les nations en guerre : "Que de jeunesse, que d'avenirs, ainsi fauchés ! Quelles pertes irréparables pour notre pays et pour bien d'autres !"
Citation : "Depuis le début de la guerre, l'ennemi a perdu des centaines de mille hommes tués et des millions de blessés."
Cette nouvelle est donnée des deux côtés de la barricade. Et elle ne couvre que la moitié de l'histoire. Elle ne mentionne pas les millions qui reviendront du carnage avec des nerfs brisés, leur jeunesse disparue, leur vision de la vie émoussée, désillusionnés et aigris.
Ce n'est pas là un brillant tableau, n'est-ce pas ? Non, mais c'est la vérité crue.
"Mais, direz-vous, nous sommes en guerre, et ces choses terribles sont inévitables dans une guerre. Maintenant que nous avons commencé, il faut bien aller jusqu'au bout."
C'est vrai qu'une fois en guerre, il faut aller jusqu'au bout. Mais pourquoi donc le monde est-il en guerre ?
En 1914, explique-t-on, un certain Kaiser allemand avait des ambitions de domination mondiale et ouvrit le premier acte du drame.
Plus tard, un peintre en bâtiment autrichien eut à son tour des ambitions ou des idéaux qu'il résolut de réaliser. Et le rideau se leva sur le deuxième acte du grand drame des siècles.
Mais croyez-vous sérieusement que c'est tout ce qu'il y a dans le jeu ?
Croyez-vous qu'un Hohenzollern à demi toqué, malgré son égo gonflé jusqu'au point de crevaison, avait le pouvoir de lever le rideau sur le premier acte de l'holocauste mondial ? Croyez-vous qu'Adolf Hitler, le peintre maniaque, malgré toute sa folle soif de pouvoir, possédait l'esprit et la force nécessaires pour lever le rideau sur le deuxième acte ?
Non, n'est-ce pas ? Les hommes ne peuvent être tous de stupides moutons, prêts à suivre aveuglément ces pantins fantaisistes dans une furieuse danse de la mort. Il a fallu d'autres puissances moins passagères et plus fermement établies.
Ne vous y trompez pas. Le drame hideux a débuté bien avant 1914. Il n'a pas commencé avec le Kaiser Guillaume. Et ce n'est pas Hitler qui a préparé la scène pour le deuxième acte.
La cause est plus reculée et plus profonde que le rôle joué par l'une ou l'autre de ces deux marionnettes ou d'autres marionnettes moins en vedette.
Il est vrai que les marionnettes dansent et nous font danser avec elles. Mais qui tire les ficelles ?
Ce sont nos fils qui vont au feu dans les guerres, c'est nous qui fournissons l'effort de guerre ; mais qui les déclenche et, ensuite, s'assoit en se tournant les pouces ?
Quand vous aurez trouvé la réponse à cette question, vous aurez au moins partiellement découvert pourquoi, nous, gens respectables, nous devenons périodiquement fous.
Car après tout, nous sommes des gens respectables. Et quand je dis NOUS, je ne veux pas parler des Canadiens ou des Anglais, ou des Américains, ou des Russes, ou des Allemands — je veux dire simplement NOUS. Nous, le peuple ; nous, les mères, les pères, les sœurs, les frères, du monde entier.
"Mais, direz-vous, cette guerre est faite pour mettre fin à toutes les guerres. Nous sommes bien décidés à ce que, après cette guerre-ci, il n'y ait plus jamais de suicide mondial."
Vraiment ? Et comment allez-vous vous y prendre pour accomplir ce miracle ?
"Mais, les Quatre Grosses (Big Four) vont se joindre ensemble et maintenir la paix par la force."
La paix par la force ? L'Angleterre, les États-Unis, la Russie et la Chine (peut-être avec l'aide de la France), vont établir la Ligue du Gros Bâton, pour imposer par la force la paix sur la terre et la bonne volonté entre les hommes ? La paix de Dieu par la force !
Et quels sont les agresseurs possibles contre lesquels sera brandi le gros bâton ? Une Allemagne battue ? Une Italie liquidée ? Le Guatemala ? La paisible Suisse, ou le minuscule Luxembourg ?
Les nations dites paisibles — l'Angleterre, les États-Unis, la Russie et la Chine — les grosses nations vont voir à ce que les petites se tiennent bien tranquilles !
Pendant ce temps-là, on va déclarer qu'une chasse de sorcier est lancée sur la piste des "criminels de guerre". Une liste de noms est préparée pour satisfaire le public crédule. Des noms — Hitler, Gœring, Gœbels, Quisling, avec une couple de cent autres peut-être — sont tout désignés pour tranquilliser la conscience vengeresse des non initiés.
Cela fait, on s'imaginera avoir effacé toutes les taches disgracieuses sur la page terminée, et pouvoir inaugurer une page neuve et immaculée de l'histoire.
Souhaitons seulement qu'on ne va pas renverser toute la bouteille d'encre dès la première ligne.
C'est que, voyez-vous, ces marionnettes n'eurent absolument rien à faire avec le mal fangeux qui pourrit notre civilisation mondiale. Lorsqu'on aura éliminé ces instruments, rien n'empêchera le lever du rideau sur un troisième acte du grand drame. D'autres prendront leur place sur la scène.
Le mal qui demeure
Il y a un quart de siècle, un certain grand homme prédit que, si l'on ne changeait pas tout le système financier actuel, une autre formidable guerre éclaterait vers 1940. Il fit rire de lui à cette époque. Aujourd'hui encore, ses propositions de réforme financière sont l'objet de moqueries à bon marché.
Pourtant, cet homme de génie, le Major C.-H. Douglas, plaçait le doigt directement sur le chancre qui ronge le cœur même de notre civilisation, sur la cause de toutes nos guerres, internes et externes.
On dit souvent que nous n'avons jamais eu de démocratie. Cela est vrai. Mais il est également vrai que, depuis que l'or est devenu notre dieu et les marchés notre seule ambition, nous n'avons jamais eu la paix.
Un armistice factice est tout ce que nous pouvons réussir de mieux dans nos guerres entre nations. Un état d'agitation, de mécontentement en ébullition, même s'il est partiellement étouffé, et un sentiment de frustration désespérée, sont ce qui, sous un tel régime, peut approcher le plus de la paix intérieure.
L'assertion du Major Douglas reste encore aussi vraie.
Nous pouvons claironner tant qu'il nous plaira, que "cette guerre est pour mettre fin à toutes les guerres". Nous pouvons faire tous les préparatifs que nous voudrons pour célébrer le jour de la Victoire : à moins d'abolir notre système financier diabolique, de cesser notre adoration païenne de l'idole or, d'oublier notre poursuite insatiable de marchés étrangers, de prendre avec des cœurs reconnaissants l'abondance que la Providence déverse sur nous, et à moins de retourner aux principes et aux enseignements du Christ, le jour "V" ne signifiera rien de plus qu'une suspension temporaire des hostilités et le commencement d'une autre préparation en trombe pour le troisième acte de la tuerie mondiale.
Je fais ces réflexions devant la disparition de deux jeunes compatriotes que je connaissais et estimais, devant deux familles plongées dans le chagrin. Combien d'autres victimes depuis le commencement de cette boucherie ! Et combien d'autres s'ajouteront à la liste, d'ici que le rideau tombe sur le second acte !
Mais que penser des bébés actuellement dans les berceaux, des garçonnets aujourd'hui dans les écoles ? Leurs pères et leurs mères sont-ils contents de les nourrir, de les élever, de les instruire pour qu'ils soient de la "chair à canon" dans quinze ou vingt ans ? Les parents vont-ils rester placidement assis et laisser leurs enfants devenir les victimes sans défense d'un clan de financiers qui, pour atteindre leurs fins malsaines, sont prêts à voir tout un monde noyé dans le sang ?
Lorsque le troisième acte commencera, il sera trop tard pour y faire quelque chose. Si vous voulez abaisser le rideau sur le deuxième acte et vous assurer qu'il n'y aura pas de troisième acte, le seul temps d'y voir, c'est maintenant.
La paix par la force est un rêve de fou. Le gros bâton des "Big Four" ne peut jamais apporter la paix sur la terre. Revenons au bon sens maintenant. Débarrassons-nous maintenant de la voracité bestiale et du banditisme de notre système financier. Bannissons ainsi la possibilité pour la génération qui lève de devenir la chair à canon de la finance internationale.
Norman JAMES
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L'Hon. Winston. Churchill, alors chancelier de l'Échiquier, parlant à la Chambre anglaise des Communes :
"Je déclare très sérieusement que cette convulsion monétaire a maintenant atteint un degré où je suis persuadé que la production de nouvelle richesse ne tolérera pas indéfiniment une oppression aussi hideuse."