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Une production prospère

Louis Even le mercredi, 15 septembre 1943. Dans Éditorial

Émile Benoist remarquait, dans Le Devoir du 4 septembre :

"On a pu dire du Canada qu'il était le pays de l'abondan­ce ; les circonstances ont changé cela : il est devenu le pays de l'abondance des rationnements. "

Et c'est vrai. Tout comme on eut l'abondance de chômage, de taudis et de privations pendant dix années. C'est qu'alors, au lieu de rationnements par coupons, on se contentait de rationner l'argent pour laisser l'abondance derrière les vitrines.

Tout de même, il est certaines productions qui continuent d'être prospères au Canada.

Il y a, entre autres, la production qui alimente les cadeaux aux étrangers, en passant sous le nez des Canadiens couponnés.

Que n'a-t-on fait pour encourager nos cultivateurs à deve­nir porchers et fromagers de l'Angleterre ?

Une grosse compagnie, qui tient les statistiques de la pro­duction porcine, la Canada Packers, ne l'affiche-t-elle pas sur des panneaux-réclames étalés dans nos grandes villes : Quatre de nos cochons vont outre-mer, contre un qui reste au pays ?

C'est proclamé comme une citation à l'ordre du jour, pour glorifier le Canada — pays chevaleresque qui fait sa part pour la démocratie en oubliant simplement les Canadiens.

*    *    *

Une autre production canadienne qui mériterait d'être citée à l'ordre du jour, c'est la production de vaches pour nos Parle­ments. Paix ou guerre, cette production-là n'a jamais faibli.

Il ne s'agit évidemment pas des bonnes vaches qui donnent du lait ; celles-là logent dans nos étables. Mais bien de ces vaches stériles, qui s'épuisent à moduler leurs beuglements en temps d'é­lection et n'ont plus d'énergie que pour empanser et ruminer, une fois encarcanées dans les édifices parlementaires.

*    *    *

Il reste à souligner l'immense production de payeurs de ta­xes. Toutes les familles qui élèvent des enfants contribuent à cet­te production, puisqu'elles élèvent de futurs payeurs de taxes.

Production fort estimée et recherchée. À tel point que, si les berceaux n'y suffisent pas, on suivra l'avis de Jean-Charles Har­vey : on ouvrira toutes grandes les portes du Canada à l'immi­gration afin d'avoir un nombre intéressant de citoyens à taxer.

Et n'est-ce pas un devoir ? N'y a-t-il pas une dette grossis­sante à servir ? Ne faut-il pas accroître d'autant le troupeau de moutons que le fisc immole avec une scrupuleuse fidélité sur l'au­tel des créanciers de la nation ?

*    *    *

Tondus par les financiers, dévalisés par les faiseurs de cadeaux — qu'y pouvons-nous lorsque nous confions la garde de nos intérêts à des vaches qui ne savent même pas se servir de leurs cornes ?

Louis Even

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