L'Honorable Duplessis, gagnant de la journée du 8 août, a formé une nouvelle équipe pour administrer la province. Par le nombre, elle dépasse tout ce qui s'est jamais vu dans l'histoire du Québec et même au fédéral, dit-on.
L'équipe compte, en effet, 21 ministres pour 14 ministères. Chaque ministère a son titulaire et il y a sept ministres d'État, c'est-à-dire sept ministres qui n'ont pas charge de ministère. Cela fait bien 21. Sur 48 députés du parti. C'est imposant.
Ce n'est pas nous qui blâmons le gouvernement de placer un responsable (s'il s'agit réellement de cela) à la tête de chaque ministère, plutôt que d'accumuler plusieurs portefeuilles entre les mêmes mains. Lorsqu'un homme quitte, par exemple, un bureau d'avocat pour se mettre en tête des chemins de la province, il n'a pas besoin, par-dessus le marché, d'avoir à se tracasser d'autres choses aussi étrangères à sa profession. Un ministère a de quoi occuper un homme qui veut réellement s'en occuper, il nous semble. Puis, dans notre siècle d'abondance de toutes choses, même de talents, pourquoi donc surcharger quelques-uns pendant que d'autres ne font rien ?
Si c'est la question de finance qu'on objecte, pour payer tant de monde, Monsieur Duplessis et son Trésorier n'ont qu'à donner dans le Crédit Social : Tout ce qui est physiquement possible doit l'être financièrement.
Donc, 14 ministres pour 14 ministères, c'est logique. Quant aux sept autres, s'ils ne sont pas là rien que pour la parure ou pour leur plaisir personnel, c'est sans doute que le Conseil de la province veut bénéficier de leur sagesse. N'ayant rien à administrer, ils ont tout le temps d'observer et de conclure : ils tiennent le portefeuille de la pensée.
On avait l'habitude de dire, de 1936 à 1939, que M. Duplessis gouvernait à sa tête, dictatorialement. Apparemment, il prend cette fois-ci les moyens d'être largement conseillé.
Quelques-uns des honorables 21 ont été ou sont encore abonnés à Vers Demain. De là à partager nos idées, et surtout de là à les introduire dans la législation, la distance est très longue. Le Crédit Social, comme d'ailleurs toute réforme favorable au peuple, exige autre chose qu'un alignement de ministres : il faut un alignement des électeurs eux-mêmes.
Aux quatorze qui agissent, et aux sept qui pensent (ou regardent), nous souhaitons une chose : ne jamais être paralysés par un problème de piastres. Il y a une recette : Vers Demain, est à leur disposition pour la leur indiquer.