Sous notre régime financier actuel, toutes les mesures de sécurité sociale — assurance-chômage, allocations familiales, et autres — mettent deux mains en opération : une qui prend et l'autre qui donne. Et la main qui prend précède toujours celle qui donne.
Dans certains cas, comme dans l'assurance-chômage, la main qui prend est bien visible : tous les salariés la reconnaissent à chaque paie, dont elle rafle un morceau. Dans d'autres cas, comme les allocations familiales, la main qui prend est moins visible, mais elle fonctionne quand même, immanquablement, car sans elle, l'autre main n'aurait rien à offrir.
La main qui prend doit avoir plus de capacité que la main qui donne, parce qu'elle doit prendre plus que l'autre donne. La différence reste accrochée aux bras, au cou, à la tête.
Et ces bras sont longs, et cette tête est loin. Si longs, ces bras, qu'on n'en voit pas l'autre bout. Si loin, cette tête, qu'on ne peut lui faire aucune remarque lorsqu'elle commande aux mains des choses qui ne plaisent pas. Ottawa est si loin du peuple, que le peuple peut crier dix années et mourir bien des fois avant qu'on l'entende.
Mais si loin soit la tête, les mains vont partout, la première main surtout, la main qui prend. Cette main-là ne manque jamais son coup. Elle est aussi efficace pour pomper l'argent de nos poches, qu'elle a été efficace pour ramasser, pour la guerre, les jeunes gens dont elle ignorait l'existence et les misères avant la guerre.
Mais aussi, où est la réflexion chez le peuple que les mains manipulent à souhait ? Quand la première main prend, on crie un peu, on peste contre le gouvernement, puis on se tait. Quand la deuxième main donne une petite partie de ce que l'autre main a pris, on oublie la première opération, on se réjouit, on bénit le gouvernement.
La main qui prend et la main qui donne sont mues par le même cerveau ; et ce cerveau, comme toute la bureaucratie à sa commande, ignore complètement la liberté.
La main qui prend ne connaît pas la liberté : consentant ou non, vous devez payer l'assurance-chômage. Payer des contributions, c'est obligatoire, vous y êtes contraint.
La main qui donne vous soumet à des conditions qui étouffent votre liberté. Lisez la loi de l'assurance-chômage, et vous verrez que s'il n'y a pas d'exceptions pour payer les contributions, il y a des exceptions pour toucher les prestations.
Ainsi, le Messager de St-Michel du 3 mars rapporte le cas d'un ouvrier à qui on refusait ses prestations. Il en appelle au tribunal d'arbitrage. Le tribunal le déclare inapte à bénéficier, parce qu'il a quitté volontairement son emploi. On n'a plus le droit de faire du volontaire, ou bien on échappe à la sécurité, même si l'on n'a pas pu échapper aux
frais de la sécurité. Cet ouvrier-là avait quitté son emploi, parce que, à part d'y crever de faim, il y ruinait sa santé. N'importe, il perd $84.00 pour avoir voulu briser ses chaînes.
Un autre perd aussi son droit à $84.00, parce que, après avoir été mis à la porte par son patron, à coups de pieds dans le derrière, il n'a pas obéi aux ordres du Service Sélectif. Le Service Sélectif lui avait commandé d'aller se traîner à quatre pattes devant ce joli patron pour re-solliciter sa place !
Ordres, défenses, contributoire, obligatoire — liberté piétinée, comme condition pour ne pas mourir de faim. Tel est l'ordre nouveau de demain, préparé par les grands francs-maçons qui pilotent les pays chrétiens. La voie est toute tracée dans les Protocoles des Sages de Sion.
(Illustré par LAURENT BEDARD)