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Pourquoi gagner la guerre ?

le dimanche, 15 novembre 1942. Dans Réflexions

Y allant de son couplet en faveur du troisième emprunt de guerre, l'aumônier-général de l'U.C.C. écrivait dans La Terre de Chez Nous :

"La victoire des Nations alliées intéresse au plus haut point la classe agricole du Canada. Si Hitler gagne la guerre, l'Allemagne nazie et le Japon contrôleront les marchés de l'Europe, de l'Asie et de l'Afrique. Le Canada aura perdu par le fait même son principal marché d'exportation. À qui, alors, vendrons-nous notre surplus de blé, notre fromage, nos porcs, nos œufs, etc. ?

"D'un autre côté, si notre industrie ne peut disposer du surplus de ses produits, elle sera forcée de marcher au ralenti : il s'ensuivra le chômage sur une grande échelle, la dégringolade générale des prix et Dieu sait si, dans ces conditions, l'Amérique du Nord pourra échapper aux horreurs d'une catastrophe sociale !"

Il est regrettable que des plumes, par ailleurs respectables, se laissent aller à écrire de pareilles inanités.

Il faut donc gagner la guerre pour avoir le privilège d'élever des porcs, de fabriquer du beurre pour les étrangers. Si nous ne pouvons fournir du blé, du bacon, des œufs, du beurre, du fromage, aux trois vieux continents, nous n'aurons pas de blé, de bacon, d'œufs, de beurre, de fromage, sur les tables canadiennes !

Si le Canada était seul au monde, il serait malheureux, parce qu'il aurait trop de production ! Le monde existe pour vendre : s'il ne vend pas, il manque sa fin !

Si l'industrie canadienne ne peut faire et écouler des surplus, il y a à craindre une catastrophe sociale !

Lorsque l'agriculture et l'industrie d'un pays ont produit suffisamment pour faire bien vivre les habitants de ce pays, vous croiriez que cultivateurs et ouvriers pourraient travailler un peu moins dur, se donner à des occupations libres ? Pas du tout : il faut que tous continuent à peiner, à produire, et qu'on s'assure des consommateurs à quatre mille lieues pour absorber le surplus de produits. Sans cela, c'est la révolution, parce que les habitants des pays producteurs vivront dans les privations !

Comme la philosophie nazie tient elle aussi à l'économie-travail, à la production à outrance et à l'exportation des produits allemands aux mêmes trois continents, le conflit est inévitable. L'économie-travail conduit directement à la guerre. À moins que les pays s'entendent tous pour produire des montagnes de surplus qu'ils chargeront collectivement sur des avions à destination de la lune — ou plus simplement sur des bateaux à destination des gouffres de l'océan. On a commencé sur une petite échelle, avec le café, les oranges et d'autres produits, avant la guerre. Si Hitler avait été assez sage pour faire la même chose avec les produits allemands, au lieu de chercher, lui aussi, des marchés étrangers, peut-être aurait-on évité la guerre et serait-on demeuré dans les bienheureuses années de chômage généralisé ou de destruction systématisée.

Voilà où conduisent les règlements de la finance. Mais qu'est-ce qui empêche de les changer ? À croire ces règlements sacrés et intangibles, les meilleures têtes déraisonnent lorsqu'elles se mêlent de problèmes économiques.

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