Si vous manquez de beurre, ne vous en prenez pas aux vaches de nos étables, mais plutôt à celles du Parlement.
Nos vaches font leur devoir, et nos cultivateurs aussi. Malgré tout le succès des chasseurs d'hommes à dépeupler nos fermes, la production du beurre a sensiblement augmenté. Mais où donc va le beurre ?
Répondant au député Hansell, à la Chambre des Communes, le 29 mars, l'honorable MacKinnon rapporte la production suivante de beurre de crémerie au Canada :
1940 264,724 quintaux
1941 285,848 quintaux
1942 284,591 quintaux
1943 312,310 quintaux
Ainsi, en 1943, nos fermes ont produit 28,000 quintaux de plus qu'en 1942. Et pourtant, on nous dit que les stocks ont diminué : on a même dû restreindre le rationnement en mars dernier.
La suite du rapport de l'Honorable MacKinnon l'explique. En 1940, on envoyait 9 quintaux de beurre à l'Angleterre ; en 1941, 100 quintaux ; mais l'année dernière, 70,892 quintaux.
De 100, on est passé à 70,892. Les Anglais ont-ils pris goût tout d'un coup au beurre canadien, ou si c'est pour graisser les côtes du continent en vue de la grande invasion ?
Un pince-sans-rire de Québec nous disait gravement, l'autre jour, qu'il s'agit simplement d'une erreur dans un petit coin de notre immense bureaucratie. La distraction d'une sténographe mal reposée aurait transmis à un bâtiment d'exportation l'ordre de prendre une cargaison de beurre au lieu d'une cargaison de fromage !...
Figure de l'Anglais qui attend son fromage ! Figure du Canadien qui manque son beurre ! Pénitence des deux côtés de l'Atlantique.