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Le règne des gros

le mercredi, 15 novembre 1944. Dans La politique

On écrirait peut-être mieux "Le règne des gros­ses", puisque c'est des grosses nations qu'il s'agit. "The Big Four", comme disent les rapports an­glais.

Cette guerre a été déclarée, nous a-t-on dit mille fois, pour protéger l'indépendance des petites na­tions.

Les vainqueurs seront, selon toute apparence, ceux qui se sont posés en faveur des petits. Mais ce sont des gros eux-mêmes, et leur titre de pro­tecteurs des petits semble devoir leur conférer le droit de régenter la vie des petits.

Après Bretton Woods, qui donne la priorité financière aux grosses nations, voici Dumbarton Oaks, qui donne la priorité économique et politique aux quatre grandes puissances et prient les petites d'évoluer humblement sous l'aile tutélaire des grosses.

Nous empruntons les réflexions qui suivent à l'article de N. B. James, intitulé "The Dumbarton Hoax !", publié dans The Canadian Social Crediter du 19 octobre.

*    *    *

Il y a bientôt deux mille ans, un chœur d'Anges vint chanter sur notre planète : Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté !

À Dumbarton Oaks, on a changé la formule : Paix sur la terre par les canons et par les bombes des grosses nations.

Un journal écrit en grandes manchettes :

"Un plan pour la paix du monde, appuyé par des forces militaires puissantes, est tracé par les Big Four à Dumbarton Oaks."

Les Big Four, ce sont : les États-Unis, l'Angleterre, la Russie et la Chine.

Le monde de demain sera ce que les Big Four voudront qu'il soit. Et quiconque ne dit pas "Ainsi soit-il" n'a qu'à réciter son acte de contrition : les canons des quatre gendarmes sont braqués sur lui.

Il serait intéressant de connaître les titres de compétence des quatre grandes puissances à ré­genter la vie économique et politique du monde. Quelle sagesse ces quatre nations ont-elles démon­trée, dans le passé, en dedans de leurs propres frontières ?

Un peu d'histoire assez récente ne serait peut-être pas hors de propos.

*   *    *

Considérons le cas de la Chine. La Chine est assurément une grande nation : en surface et en population, même en ancienneté si l'on veut.

Mais qu'est-ce qui, dans l'histoire de la Chine, lui donne des titres à notre confiance ? Qu'est-ce qui lui confère la vertu de nous dire quoi faire ou ne pas faire pour jouir d'un certain degré de pros­périté temporelle ? Il s'agit évidemment de pros­périté temporelle, puisqu'il s'agit de sociétés ter­restres.

La Chine a-t-elle bien, dans le passé, assuré la vie économique de son propre peuple ? Les habi­tants de ce pays sont-ils assurés de la nourriture, du vêtement, du logement ? Avant de se demander si la Chine est bien renseignée sur nos besoins et sur nos possibilités, ne conviendrait-il pas d'abord de se demander si elle est bien renseignée sur les besoins des Chinois eux-mêmes, et si elle sait tirer parti de ses ressources en matière première, en main-d'œuvre et en cerveaux ?

Nous ne voyons pas bien que le Canada ait de brillants exemples de prospérité à chercher en Chine.

*    *    *

Voilà pour une. Passons maintenant à la Russie.

Admirons le patriotisme et la bravoure des Rus­ses pour défendre leur pays attaqué. Mais ce n'est pas exclusif aux Russes. Nos Canadiens, attaqués, feraient au moins aussi bien.

Mais en quoi la Russie a-t-elle démontré qu'elle est capable de tracer un plan au monde de demain ? A-t-elle tant brillé dans le passé par la paix et la prospérité ?

La Russie sort à peine de la demi-barbarie. Des millions de paysans russes vivent dans un état d'insécurité. Des millions subissent un véritable esclavage du berceau à la tombe : ils n'ont pas le choix de leur mode de vie.

Si la Russie n'a pas encore réussi à établir la paix chez elle pendant une seule génération, et si ses peuplades sont encore dans une grande misère malgré l'abondance de ressources naturelles de ce vaste pays, qu'elle commence par voir à sa propre population avant de prétendre organiser la vie des autres.

*    *    *

L'Angleterre et les États-Unis sont sûrement de puissantes nations, riches de la civilisation des siècles, et qui, comme les autres nations de leur ordre, ont une mission à remplir. Mais la façon dont elles s'en sont acquittées dans le passé est-elle de nature à nous inviter à placer notre sort entre leurs mains ?

L'une et l'autre se sont laissé dominer par la finance internationale. L'une et l'autre se sont age­nouillées devant les grand-prêtres du veau d'or. Dans l'une et dans l'autre, on a vu des masses affamées, dans le chômage et la misère, en face de montagnes de produits qui n'allaient pas aux besoins.

Si c'est là le diplôme qui donne droit à conduire le monde, ne blâmons pas l'Allemagne d'avoir essayé cette manière.

Les Anges qui apportaient un message sur la terre, il y a bientôt deux mille ans, n'avaient ni canons, ni chars d'assaut, ni bombes incendiaires. Ils devaient pourtant bien posséder une certaine compétence.

L'existence de treize millions de chômeurs sans le sou, dans la grande république voisine, jusqu'à la veille de la déclaration de guerre, n'est certaine­ment pas un diplôme de compétence.

*    *    *

Nous nous refusons à placer la conduite de nos affaires sous la gestion des quatre grosses.

On dira que le titre de ces quatre puissances à régir le monde, c'est qu'elles possèdent ou peuvent posséder constamment une armée, une marine et une aviation puissantes en personnel et en arme­ments.

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