Dans Le Droit dit 3 octobre, Camille L'Heureux commente approbativement la décision de la Commission des Prix qui refuse une augmentation du prix de vente du lait à l'Association des Producteurs de Lait de la vallée d'Ottawa.
Les producteurs ne sont pas satisfaits, il l'admet. Mais les consommateurs souffrent d'une augmentation. Et il faut, dit-il, que chacun fasse sa part dans cette guerre.
La guerre n'a rien à voir là-dedans. Cet état de choses n'est pas du tout limité à une période de guerre. Ce n'est pas seulement en temps de guerre que le prix du lait paie mal les cultivateurs et que les consommateurs objectent à payer davantage.
L'armistice ne résoudra pas le problème. Combien de fermes abandonnées dans la province, bien avant la guerre, parce que les produits agricoles ne rapportaient pas assez ! Et l'on ne pouvait augmenter les prix, parce que le public n'avait pas de quoi payer davantage.
Lorsqu'une industrie, même agricole, devient une entreprise déficitaire, elle cesse de fonctionner. Si les producteurs de lait de la vallée d'Ottawa diminuaient leurs troupeaux, s'ils cessaient de mettre du lait sur le marché, parce qu'ils n'y trouvent pas leur gagne-pain, les consommateurs seraient-ils plus satisfaits ?
C'est la perpétuelle situation : le producteur doit récupérer ses frais et ses moyens de vivre dans le prix de vente ; le consommateur ne peut payer plus que ses moyens d'achat ne lui permettent.
Il y a une solution, mais pas avec le régime financier actuel. La solution, c'est de maintenir, ou même d'abaisser le prix, au niveau où le consommateur peut le payer ; puis de verser au marchand la différence qui manque pour avoir le prix où il peut tenir en affaire. Qui doit verser la différence ? L'autorité qui a droit d'augmenter l'argent du pays quand il en manque : or, si les réclamations des laitiers sont fondées, c'est justement un cas de manque d'argent qui joue dans le problème en question.
Ce serait la solution du Crédit Social, sous le titre de l'escompte compensé.
La technique monétaire du Crédit Social est un mécanisme scientifique au service d'un objectif social.
La technique monétaire actuelle est un contresens au service d'intérêts privés. Il ne faut pas s'étonner qu'elle engendre des difficultés. Mais il faut certainement s'étonner qu'on la supporte plus longtemps.