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Le parti des Grenouilles

le mercredi, 01 mars 1944. Dans La politique

1944 est placée sur presque tous les calendriers politiques comme une année d'élections.

Aussi sera-ce une année de champignons politi­ques. Partis politiques à noms simples ou à noms composés ; candidatures politiques, couleur-ci, cou­leur-ça, couleur ci et ça, couleur ni ci ni ça — rien ne manquera pour amuser les badauds.

Année d'élection : cela veut dire année de bou­ger pour ceux qui ne bougeaient pas ; année de pa­rade devant le peuple pour ceux qui ne se sont jamais occupés de la masse du peuple.

Le petit groupe de farcis de la rue d'Auteuil ne pouvait manquer de pousser son champignon. Et l'on a vu annoncer, dans les journaux d'il y a une couple de semaines, la fondation à Québec d'un parti Crédit Social Canadien.

À cause des mots Crédit Social, il y en a qui peuvent s'y laisser prendre.

Pourquoi un parti du Crédit Social ? Pourquoi pas aussi un parti des allocations familiales ? Pourquoi pas un parti des pensions de vieillesse ? Pourquoi pas un parti des coopératives ? Un parti de l'assurance-chômage ? Un parti de l'aide à la Russie ? Et quoi encore ?

Que des électeurs, lorsqu'ils ont à choisir un candidat, se cherchent un homme qui leur promet d'appuyer une législation créditiste, ou tel ou tel autre point que ces électeurs désirent, très bien. Mais de là à battre un tambour pour annoncer que dix à vingt personnes ont décidé de former un parti politique de ceci, un parti politique de cela, il y a une marge. On se croirait dans une institu­tion d'aliénés.

D'ailleurs, on sait assez que la doctrine crédi­tiste est une doctrine d'association et non de di­vision. Et un parti est un instrument de division, pas de ralliement.

L'expérience devrait être déjà faite au moins dans la province de Québec.

L'ère des partis politiques est révolue, ou de­vrait l'être, tout comme l'ère de la dictature fi­nancière.

Tout parti porte en lui-même un élément de dictature, un élément de division, une attestation de faiblesse, un germe d'instabilité, une semence d'ambitions et une grosse dose de farce et de men­songe. C'est ce que nous développerons dans un prochain numéro.

Pour le moment, qu'il nous suffise de dire que ceux qui étirent leurs bretelles et remontent leurs collets, en se prononçant fondateurs d'un parti du Crédit Social, ne sont que de pitoyables escamo­teurs d'un mouvement trop noble pour se prêter à une telle fumisterie.

Il se trouvera certainement de bonnes âmes qui se laisseront prendre pour un temps. Nous ne croyons pas que ce sera le cas de ceux qui lisent Vers Demain et ont appris à s'occuper d'électeurs plus que de candidats.

De braves créditistes, ennemis de la division, s'inquiètent et se demandent : Pourquoi ne pas s'entendre ?

S'entendre avec qui ? Avec ceux qui s'en vont vers leurs petites contemplations d'eux-mêmes ?

C'est l'histoire de tous les déchets. Quelques mécontents se retirent d'un mouvement, se re­tranchent dans l'immobilité d'abord, puis tout d'un coup entrent en branle et crient : Voyez donc où nous sommes. Nous sommes loin du chemin ; mais ne pourriez-vous pas quitter le chemin, vous aussi, pour faire une entente avec nous ?

Nous ne pouvons avoir que du mépris pour des gens qui font une aussi mauvaise publicité au mouvement le plus pur et le plus noble que notre génération ait vu dans l'ordre profane et tem­porel.

Le mouvement authentique du Crédit Social en Nouvelle-France se développe et rayonne autour du journal Vers Demain. Son moteur est le dé­vouement. Son corps d'organisateurs est l'Institut d'Action Politique. Sa formule politique est l'Union des Électeurs.

Il est temps, croyons-nous, que les électeurs songent à eux-mêmes plus qu'aux politiciens et as­pirants-politiciens.

Puis, il est absurde de s'imaginer posséder une force politique par le seul fait de dire qu'on fonde un parti politique et qu'on va présenter des can­didats aux prochaines élections fédérales. Cela fait tellement penser à la fable de la grenouille qui se mit en tête de boire, de boire, de boire encore, afin de devenir grosse comme un bœuf. Elle en creva.

Au lieu de salir les beaux mots de Crédit Social, nos petits farceurs auraient bien dû s'intituler le Parti des Grenouilles.

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