Le Congrès du Bloc Populaire a eu lieu à Montréal, du 3 au 6 février. Nous n'y avons pas assisté. Nous avons seulement suivi les comptes-rendus du DEVOIR.
Mais nous connaissons bon nombre des personnes, ou plutôt des personnages, qui y ont participé en première ligne. Or, sauf quelques exceptions, comme dans le cas d'Honoré Désy qui a généreusement contribué à financer nos émissions radiophoniques, nous ne voyons pas qu'il s'agisse de gens bien intéressés à l'instruction et à l'organisation politiques de la masse.
Nous sommes de plus en plus convaincus que c'est une Union des Électeurs, et non une union de politiciens ou d'aspirants-politiciens, qui servira et fera servir les électeurs. La démocratie doit prendre sa force sur le palier des électeurs, non sur le palier des candidats et de leurs souteneurs.
Quant au mot "populaire" ajouté à Bloc, nous en sommes revenus depuis longtemps. Les gens du nord du Témiscamingue, par exemple, n'ont qu'à jeter un coup d'œil sur la liste des congressistes assis à la table d'honneur, au banquet de clôture, pour voir qui représentait la population de mineurs et de colons de leur région. Ils savent aussi quand ces gens-là se produisent, quand ils s'agitent et à qui ils se collent pour empêcher la masse de s'organiser.
Nous aimons assurément le caractère patriotique et nationaliste du Bloc Populaire ; mais nous en trouvons autant, et de plus pratique, de plus concret, de plus agissant dans le mouvement et l'organisation des créditistes de Nouvelle-France.
On remarque dans les rapports l'absence totale des trois patriotes : Paul Gouin, Philippe Hamel et René Chaloult.
D'un autre côté, pourquoi Édouard Lacroix a-t-il pris si peu de place au Congrès après avoir fait tant de tapage depuis des mois ? L'aurait-on prié d'avoir une maladie diplomatique pour l'occasion ?
Quant au programme du Bloc, il n'est pas un groupe de politiciens canadiens-français qui ne signerait volontiers ces belles déclarations de principes. Mais de là aux réalisations, la masse du peuple peut attendre longtemps si elle ne s'organise elle-même.
Qu'on lise tout ce qui est dit sur la famille, sur les ouvriers, sur l'agriculture, sur la colonisation, sur les abus des trusts, etc. Et qu'on nous dise si un simple dividende, à chaque membre de chaque famille, ne réglerait pas beaucoup plus efficacement et plus rapidement le cas de tant de gens qui peinent toute leur vie pour être de plus en plus pauvres, de moins en moins libres ?
Mais des dividendes ? Allez donc parler de cela à des gens qui dénoncent les effets et respectent les causes. Ils en sont à nommer un comité pour étudier l'argent et le crédit, pour renseigner des chefs qui ont eu un quart de siècle de vie politique pour y voir et semblent n'en pas encore connaître le premier mot.
Nous constatons aussi que les quelques créditistes qui se sont liés au Bloc deviennent de moins en moins créditistes, de plus en plus muets ; de moins en moins au peuple, de plus en plus à leurs petites ambitions. L'atmosphère ?
Nous n'écrivons pas cela pour abaisser le Bloc par rapport aux vieux partis pourris. Mais pour mettre en garde contre l'idée qu'un vote suffit pour sauver un pays et qu'il n'y a rien à faire qu'à exalter et suivre des peaux-neuves. Il faudra beaucoup plus.
Une économie nouvelle ne viendra qu'avec une politique nouvelle. Et la politique nouvelle ne peut être une politique de partis. Nous en reparlerons.