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L’économique – La banque paiera au porteur

Louis Even le jeudi, 01 mai 1941. Dans L'économique

J'ai un dollar. J'achète de Monsieur Langlois, cultivateur, trois livres de beurre. Résultat : J'ai le beurre et monsieur Langlois a le dollar.

L'opération terminée, je puis dire : j'ai payé trois livres de beurre avec mon dollar. M. Langlois pourra dire : J'ai payé un dollar avec trois livres de beurre.

Vous avez un billet de cinq dollars. Vous achetez une paire de chaussures de M. Lefebvre. Vous pouvez dire : J'ai payé les chaussures avec mon billet de cinq dollars. M. Lefebvre peut dire : J'ai payé ce billet de cinq dollars avec une paire de chaussures.

L'argent paie les choses et les choses paient l'argent.

★ ★ ★

Jean a en main un billet de un dollar. Va-t-il aller trouver son voisin et lui dire : Passe-moi un dollar, je vais te donner un dollar. Le voisin répondrait : Jean, tu es fou.

Qui, avec des dollars, va payer des dollars ?

Pour payer des choses, il faut des dollars. Pour payer des dollars, il faut des choses.

Seuls ceux qui ont des dollars peuvent payer des choses ; et seuls ceux qui ont des choses peuvent payer des dollars.

★ ★ ★

Prenez maintenant un billet de un dollar et lisez-le. Bien des gens ont manipulé des dollars toute leur vie et n'ont jamais pris la peine de lire cette feuille qui fait bouger les produits et sombrer des consciences.

Lisez donc : "La Banque du Canada paiera au porteur sur demande Un Dollar."

Il y a encore des billets sur lesquels c'est une banque à charte qui fait la promesse :

"La Banque Royale paiera au porteur sur demande Un Dollar."

Le porteur, c'est celui qui a le dollar en main. Vous avez un dollar en main : la banque promet de vous le payer. Avec quoi ?

On paie les dollars avec les choses. Avec quelles choses la banque va-t-elle vous payer ce dollar ?

N'importe quelle banque, Banque du Canada ou une autre : elle doit vous payer ce dollar. Avec quoi, encore une fois, va-t-elle vous payer ce dollar ?

Allez-vous aller à la banque et dire : J'ai un dollar, prenez-le et donnez-moi un autre dollar pour le payer. Le banquier pourra vous demander : Êtes-vous fou ?

Le cultivateur peut vous payer votre dollar avec du beurre, le barbier avec quelques coupes de cheveux, le médecin avec une consultation. Mais le banquier n'a rien pour payer votre dollar ; il ne produit rien de ce qui peut payer votre dollar.

Et pourtant, c'est écrit : "La Banque du Canada paiera au porteur Un Dollar."

★ ★ ★

Lorsque j'ai un dollar, cette promesse de la banque de me payer un dollar, est-ce à la banque que je vais pour le faire honorer ? Non, je vais au marché, au magasin, là où il y a des produits. Ce sont les produits qui paient le porteur du dollar.

D'où viennent les produits ? De la banque ou des fermes ? De la banque ou des usines ? De la banque ou des bureaux ?

Les cultivateurs, les fabricants, les professionnels, sont-ils les esclaves de la banque, puisque ce sont eux qui, à la place de la banque, paient le porteur du dollar ? On le dirait, et c'est assez vrai.

La banque est maîtresse. Même le gouvernement ne peut faire ni routes, ni ponts, ni guerre, sans rendre les Canadiens, tous les Canadiens, tributaires de la banque.

Lorsque la banque émet des dollars, elle devrait écrire :

"Mes esclaves, tous ceux qui travaillent au pays, paieront au porteur Un Dollar".

On obtiendrait la même chose avec le dollar, et la circulation d'un mensonge serait remplacée par la circulation d'une vérité.

★ ★ ★

Mais il y a mieux à faire. Le Canada, par son gouvernement, pourrait émettre des rectangles de papier avec l'inscription :

"Le Canada paiera au porteur Un Dollar.".

Comme le Canada est capable de produire des choses, il est capable de payer les dollars à ceux qui en ont à présenter n'importe où au Canada.

Même la province, la nôtre au moins, est capable de fournir toutes sortes de produits à ceux qui ont des dollars à présenter aux magasins, au marché, aux bureaux de services.

La Province pourrait donc écrire, sans crainte de manquer son coup :

"La Province promet de payer au porteur Un Dollar".

La Province peut en payer beaucoup de dollars, parce qu'elle peut produire beaucoup de choses.

La Province, pas le gouvernement, pas le parti au pouvoir, ni celui qui fait antichambre. Non, la province : les cultivateurs, les ouvriers, les producteurs de denrées et de services de la province sont capables d'honorer bien des dollars, beaucoup plus de dollars qu'on en a en circulation entre les mains de nos hommes et de nos femmes.

Beaucoup de production attend, pour se mettre en branle, que des porteurs de dollars présentent des dollars. La province peut donc signer beaucoup de promesses d'honorer les dollars et placer ces promesses directement entre les mains de porteurs qui les feront valoir. Tant de gens n'attendent que ces petits bouts de papier pour manger, s'habiller, se loger, s'instruire ! Et la province peut fournir tant de bonne nourriture, tant de vêtements pour toutes les saisons, tant de logements sans vider ses forêts ou ses carrières, tant d'instruction sans être à bout de collèges et de professeurs !

★ ★ ★

L'argent qu'on a est fils de Satan, parce que c'est un mensonge. Aussi est-ce l'expression d'un désordre et il engendre le désordre. Et il prive les enfants des hommes du pain quotidien que le Père céleste dispense avec tant de libéralité.

Chaque fois que vous manipulez un dollar, rappelez-vous que vous faites circuler un mensonge et que vous vous faites servir par des esclaves qui vous serviraient aussi bien et beaucoup mieux s'ils étaient libres.

Chaque fois que vous touchez ou passez un dollar, dites-vous bien que ce dollar exalte faussement la banque en lui attribuant une aptitude qu'elle ne possède pas, et qu'il humilie votre pays en lui faisant accomplir sans honneur une chose dont le mérite est attribué à la banque.

Chaque fois que vous voyez un dollar, prenez la décision, bien ferme, que ce désordre va cesser ; que la société, le Canada, la province, va reprendre son crédit ; que le banquier n'accaparera plus le crédit de tout un peuple ; que le crédit, que l'argent va redevenir social et servir la société, tous les membres de la société.

Louis Even

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