M. Armand Côté, finissant du séminaire de Gaspé, nous communique une synthèse du Crédit Social qui fait honneur à son jeune auteur.
Il étudie successivement la nature des réformes créditistes, la possibilité de ces réformes, leur légitimité, les raisons qui les appellent et les conséquences qu'on peut en attendre.
Il fait la distinction entre un dividende considéré comme technique d'équilibre entre le pouvoir d'achat et la production, et le dividende considéré comme moyen d'assurer un minimum vital à chaque membre de la société.
Lorsque l'argent manque, il faut en émettre pour combler l'écart, et répartir cette émission entre tous les citoyens.
Par ailleurs, on doit assurer à chacun le minimum vital. Supposant que l'on estime à $20 par mois le minimum de pouvoir d'achat nécessaire pour assurer les nécessités de la vie, l'auteur conclut :
A. — Si le dividende technique exige une émission d'une vingtaine de dollars, il n'est pas question de dividende social : les deux se compénètrent.
B. — Si le dividende technique n'assure pas à tous et à chacun la somme mensuelle correspondant à un minimum vital, la balance doit être prélevée dans la circulation et répartie à tous pour maintenir le dividende social au niveau établi.
Voici la dernière, partie de la synthèse de M. Côté :
V. Conséquences de ces réformes
I. Reprise du contrôle de la monnaie et du crédit
1. — L'argent naît libre de dettes.
2. — L'usure du 7 ou 8 pour zéro disparaît.
3. — Plus d'intérêt à payer sur l'argent nouveau.
4. — L'argent nouveau, devenant en naissant la propriété de chacun des citoyens, confère au système monétaire un caractère de réelle démocratie.
5. — Ce mode d'émission élimine la dictature bancaire actuelle et ne laisse place à aucun danger d'une nouvelle dictature d'argent, soit de la part de la Banque du Canada, soit de la part de l'État.
II. Le dividende :
A. Technique :
1. — Assure constamment l'équilibre économique.
2. — Avec le retrait technique, se fait le rempart contre l'inflation comme contre la déflation : jamais de trop-plein ni de trop-vide.
3. — Rend financièrement possible tout ce qui l'est physiquement.
B. Social :
1. — Assure liberté et sécurité économique à chacun,
2. — Permet à chacun de s'instruire, de se cultiver, de se développer selon ses aptitudes, d'épanouir sa personnalité, de suivre sa vocation, d'exercer sans entraves son initiative personnelle.
3. — Donne aux locataires, aux prolétaires et aux pauvres la possibilité, en y ajoutant leur travail, de se bâtir un logis convenable.
4. — Développe le goût de la propriété privée.
5. — Règle le problème et les complications des secours directs, des assurances chômage et maladie, des pensions aux vieillards, aux veuves, aux aveugles et toute autre allocation.
6. — Donne accès au mariage : plus de 100,000 jeunes gens canadiens-français de vingt à trente ans attendent cette chance !
7. — Assure le revenu familial proportionnel.
8. — Encourage les familles nombreuses.
9. — Règle les grands problèmes de finance publique.
10. — Active le développement de caisses populaires, de magasins coopératifs, etc.
11. — Sur la vie économique en général :
a) Lui permet d'atteindre sa fin propre — la satisfaction des besoins humains.
b) La rend sociale : assure à tous satisfaction des besoins essentiels et modeste aisance "nécessaire à la pratique de la vertu".
12. — Sur l'agriculture :
a) Permet à l'homme des champs de s'établir convenablement, avec les commodités de la science appliquée.
b) Lui ouvre dans le pays même des débouchés pour ses produits.
c) Lui assure une existence économique honorable et agréable.
13. — Sur l'industrie :
a) Assure l'écoulement des produits répondant aux besoins ;
b) Meilleures relations entre patrons et ouvriers, les premiers trouvant à vendre, les seconds étant moins dépendants et pouvant exiger un traitement humain.
14.— Sur les carrières professionnelles :
a) Institutions d'enseignement mieux fréquentées. Meilleure rémunération au corps professoral.
b) Soins médicaux rendus accessibles, etc., etc.
15. — Sur le commerce :
a) Intérieur. — Les échanges sont facilités ; ils suivent la marche du progrès et ne sont plus paralysés faute d'argent.
b) Extérieur. — Le Canada, après avoir satisfait les besoins de tous les Canadiens, peut avoir des surplus dans certains rayons, et il les offre en vente, aux pays étrangers, recevant d'eux des produits dont il a trop peu.
Si les échanges internationaux normaux laissent au Canada des surplus encombrants, les Canadiens organisent des œuvres de charité pour faire don de ces produits aux pays arriérés ou éprouvés. Ainsi, les Canadiens français envoient aux missionnaires, au pape, etc., de l'argent canadien, des titres à la production canadienne. Les Canadiens anglais font de même envers leurs missionnaires, leurs frères d'Angleterre, etc. On ne parle plus de surplus embarrassants, et la charité fraternelle se répand sur la terre, dans le domaine économique et, par répercussion, dans le domaine politique.
Armand CÔTÉ