Il y a dix ans, on était en 1934. Cette année-là, d'après des statistiques officielles de la Société des Nations, l'humanité offrait le spectacle suivant, à l'honneur du vingtième siècle :
2,400,000 morts de faim
1,200,000 suicides
1,000,000 wagons de blé brûlés
267,000 wagons de café détruits
516,000,000 livres de sucre détruites
50,000,000 livres de riz détruites
50,000,000 livres de viande détruites
Et les oranges jetées à la rivière ou enduites de créosote et brûlées. Et les vignes arrachées par milliers d'acres. Et les plantations de coton détruites, et le coton brûlé. Et les porcs et les vaches tués, pas pour la boucherie, mais pour la destruction. Et l'immense production supprimée en condamnant 40 millions d'hommes au chômage et des machines à la rouille.
Nous voici en 1944. L'activité règne partout, mais encore pour la destruction. Pour la destruction organisée par les nations les plus avancées de l'univers.
Et demain ? Demain ! Mais, qu'avons-nous commencé à changer dans le système pour qu'il ne continue pas à conduire à la destruction ? Quelle différence entre la manière de distribuer d'aujourd'hui et celle de 1934 ? Même mécanisme. Mêmes hommes au contrôle. Mêmes règlements.
Pourquoi deux millions et demi de personnes sont-elles mortes de faim en 1934 ? Pourquoi un million et quart d'autres se sont-elles suicidées de désespoir devant l'impossibilité de procurer le nécessaire à elles-mêmes et à leur famille ?
Pourquoi ces privations, en même temps qu'on détruisait ces montagnes de nourriture de toute sorte ? Ce n'est sûrement pas la nourriture qui faisait défaut. Quoi alors ?
Faut-il faire des plans pour embaucher les hommes à produire ? Ou bien, faut-il faire des plans pour que l'argent vienne aux familles en rapport avec les produits qui attendent ?