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Hypothèque sur le Canada

le vendredi, 01 janvier 1943. Dans Réflexions

D'après Today and Tomorrow du 5 novembre : Baptiste rentre à la maison, avec un seau d'eau, radieux malgré la sueur qui perle de son front. Il dit à sa femme :

"Maintenant, Catherine, nous avons une hypo­thèque sur le Canada".

Catherine sourit aux grands mots. Elle ne les comprend pas précisément, mais c'est sonore, et son homme est content : il doit savoir, lui.

Baptiste explique :

"Nous avons acheté une obligation de la Vic­toire. Et les journaux nous le disent en grosses let­tres : c'est une hypothèque sur le Canada.

"Désormais, au lieu de payer de l'intérêt à d'au­tres, c'est nous qui recevrons des intérêts payés par les taxes de tous les contribuables de la na­tion".

Quel changement pour Baptiste ! Il travaillait si dur, et devait fournir de l'argent au gouvernement pour l'intérêt sur la dette publique. Désormais, c'est lui qui bénéficie de la dette publique. La dette publique, c'est la dette du pays à lui, Baptiste, puisqu'il a en main une obligation de la victoire porteuse d'intérêt.

Baptiste et Catherine se demandent s'ils ont ja­mais eu un aussi beau jour depuis leurs noces. Créanciers du Canada !

* * *

Ce que les journaux n'ont pas expliqué à Bap­tiste, qui aurait pu l'expliquer à Catherine, c'est que Baptiste et Catherine ne sont pas les seuls hy­pothécaires du Canada. Ils n'en sont même pas les plus gros.

Ils recevront des intérêts sur leur obligation ; mais ils continueront de payer des intérêts sur les oligations détenues par les autres hypothécaires. Reste à savoir s'ils seront les gagnants ou les per­dants.

Si Baptiste tire $30 par année sur une obliga­tion de $1,000, peut-être plus souscrite que payée, et si, pour sa part des intérêts à verser aux autres, il doit payer $60 par année, le marché n'est pas tout à fait à une sauce alléchante. Mais c'est la chose qu'il ne faut pas dire à Baptiste, ni à Cathe­rine. Pourquoi gâter leur joie ? Ils en ont eu si peu depuis une douzaine d'années !

Ce qu'il ne faut pas dire à Baptiste, c'est que les banques à charte ont à elles seules absorbé près du quart du gros emprunt de la Victoire, et cela ne leur a pas coûté une goutte de sueur ni de sang : rien qu'une goutte d'encre.

Ce qu'il ne faut pas dire à Baptiste, c'est que le gouvernement prendra dans sa poche, par des taxes, l'intérêt qu'il lui mettra dans la main com­me intérêt.

Il faut laisser Baptiste et Catherine croire niai­sement que le $1,000 donné pour une obligation de la Victoire est pieusement enfermé dans une cassette où il fera des petits pour les détenteurs de l'obligation.

Dire à Baptiste que $1,000 placés sur une terre augmenteraient le rendement de la terre en per­mettant de la machinerie et des améliorations ; mais que $1,000 mis dans un canon ne font pas pousser une botte de foin, ce serait antipatriotique et ça bouleverserait deux bons citoyens.

Dire à Baptiste qu'il va maintenant hurler avec les loups, qu'il va demander de garder le système d'argent-dette parce qu'il est devenu créancier de la nation, ce serait un jugement téméraire.

Laissons Baptiste et Catherine à leur bienheu­reuse ignorance, le gouvernement à son jeu de va­let et les banquiers à leur exploitation.

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