Les élections municipales à Rouyn, à Val d'Or, à Malartic, à Drummondville, ont eu, entre autres effets, celui de déranger plusieurs embourgeoisés dans leur quiétude.
"Tigas" le remarquait dans la page 2 de notre numéro du 15 janvier : Tant que le Crédit Social reste une doctrine à contempler, les adversaires n'y trouvent rien à redire ; mais que les créditistes s'organisent et prennent des moyens concrets pour arriver à un régime créditiste, c'est toute la meute qui sort ses pièces.
La circulaire suivante, distribuée par nos Voltigeurs à toutes les portes de ces quatre villes, met en parallèle deux philosophies qui ne pourront jamais conclure un traité d'alliance.
Avec les embourgeoisés ou avec l'Union des Électeurs ?
Nos embourgeoisés s'agitent bilieusement. On ne les voyait pas ; on ne les entendait pas ; tout allait à souhait depuis que les canons ont chassé le chômage. Les voici dérangés.
L'action de l'Union des Électeurs trouble leur somnolence. Les électeurs osent s'occuper eux-mêmes, collectivement, de leur lendemain. Ils ne se fient plus ni aux promesses ni aux onguents. Quel désarroi !
Les embourgeoisés ont leur concept de la vie :
Au personnel : Que m'importe mon voisin, pourvu que je vive !
Au familial : Parler avec onction de politique familiale ; mais tant que ma propre famille est à l'aise, ne pas m'exciter.
Au municipal : Tant que les recettes égalent les dépenses, dormir tranquille, même si une horde de chômeurs crie la faim pendant dix années. Le municipal doit rester dans son petit coin, comme moi dans mon fauteuil.
Patriotisme : Célébrer les ancêtres et prêcher le respect de la piastre bâtarde à mes contemporains.
En haute politique : Des grands mots, des grands noms, et un anneau dans le nez de l'électeur.
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L'Union des Électeurs torpille cet édifice vermoulu.
Elle a d'autres principes :
Les personnes vivent en société.
La famille ne se nourrit pas de phrases au chloroforme.
Les corps municipaux ont leur fonction sociale à remplir, tout comme les individus, les familles, les compagnies, les institutions, les gouvernements à tous les paliers.
Les patriotes ne se couchent devant aucune dictature, pas même celle de l'argent ; et la piastre devra venir devant le pain, comme elle est venue devant les bombes et les obus.
La politique, à tous les degrés, est le service du bien commun.
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Les embourgeoisés insistent d'un air scandalisé :
Un conseil municipal pour administrer seulement.
L'Union des Électeurs est plus exigeante :
Un conseil municipal pour administrer, pour éclairer, pour réclamer.
Pour les politiciens de partis, l'action politique s'arrête le soir de l'élection.
Pour l'Union des Électeurs, l'élection est un incident. L'action de l'Union des Électeurs existe avant les campagnes électorales, pendant les campagnes électorales et après les élections, sans discontinuer.
Évidemment, cette action se modifie selon les circonstances. Elle peut consister à instruire et organiser, à former des hommes, à choisir des représentants, à surveiller les mandataires élus, à exprimer la volonté collective des électeurs.
M. Edmond Major l'a rappelé dans un communiqué aux journaux, à l'occasion de la campagne municipale de Drummondville, à laquelle l'Union des Électeurs a participé activement. M. Major dit, entre autres choses :
Si l'Union des Électeurs prend le contrôle de l'hôtel-de-ville, ce sont les électeurs, tous les électeurs qui le voudront, qui prendront le contrôle de l'hôtel-de-ville, et non pas quelques-uns qui peuvent croire que le monopole de l'esprit et du jugement est attaché au monopole de l'argent.
Les Voltigeurs de l'Union des Électeurs visitent tout le monde sans distinction, riches ou pauvres, grands ou petits, et demandent la collaboration de tous pour voir à la conduite de la chose publique d'une façon sociale et dans l'ordre.
Nous croyons que ce n'est que lorsque les électeurs groupés, éclairés, bien organisés, verront à leurs affaires, que leurs affaires seront bonnes. L'Union des Électeurs offre tous ces avantages.
L'Union des Électeurs n'est pas simplement une organisation d'élection, mais une organisation permanente, pour que les électeurs puissent surveiller la chose publique 365 jours par année, tout comme une bonne union ouvrière dans le domaine qui lui est propre.
Le domaine de l'Union des Électeurs, c'est la chose publique, au municipal, au scolaire, au provincial, au fédéral. C'est la politique, au vrai sens du mot. L'Union des Électeurs est la corporation politique des électeurs.
Des adversaires ou des ignorants essaient de faire croire à ceux qui ne sont pas bien informés que nous cherchons le désordre, même que nous sommes des révolutionnaires.
Des chercheurs de désordre sèment le désordre. Qu'on nous montre donc où et quand nous avons semé le désordre. Au contraire, nous travaillons à coordonner la société désorganisée pour la ramener à l'ordre, et nous le faisons dans l'ordre.
Quant à l'étiquette de "révolutionnaire", nous sommes des révolutionnaires comme le Christ est le plus grand révolutionnaire de tous les temps.
L'Union des Électeurs n'est pas une société secrète, ni armée, et tous sont les bienvenus parmi nous. Nos armes sont la littérature pour mettre la lumière dans les esprits. Nous voulons des réformes, mais nous les voulons dans l'ordre, et sans sacrifier notre liberté comme l'exigeraient le socialisme et les planismes de toutes sortes.
Nous prêchons la force morale d'un peuple éclairé et organisé, mais jamais la force des armes ou du poing. Nous défions les adversaires de nous prouver le contraire.
L'Union des Électeurs ne met sur les rangs que des candidats honnêtes, sincères, désintéressés, dévoués, et prêts à faire la volonté collective de tous les électeurs.
Les Voltigeurs de l'Union des Électeurs se chargent de renseigner l'électeur ; puis de faire connaître aux mandataires la volonté des électeurs, au moyen de requêtes, chaque fois que la chose sera nécessaire, c'est-à-dire chaque fois qu'il s'agit d'une question qui sort de la routine ordinaire.
Les électeurs pourront donc, en temps et lieu, appuyer ou désapprouver les actes de leurs représentants, selon le cas.