Aux termes du Plan financier international élaboré à Bretton Woods, les nations auront cinq années, à partir de la cessation des hostilités majeures, pour abandonner leurs propres contrôles du temps de guerre et joindre le grand Plan de contrôle universel.
Personne n'aime à se faire contrôler. Quand le contrôle vient d'Ottawa, on trouve que c'est déjà bien loin, et qu'il est difficile de se faire entendre quand on récrimine. Lorsque le contrôle viendra d'un corps international, perché sur un palier supérieur à tous les gouvernements nationaux, comment fera-t-on pour s'en plaindre ou s'en défaire ?
Allons-nous sortir des contrôles nationaux de guerre pour nous soumettre à un contrôle international en temps de paix ? Les règlements sont faits de telle façon qu'il est facile de joindre le Plan, mais difficile de le quitter.
On dira que les pays restent libres de s'y joindre ou non. En théorie, oui ; mais en pratique ? Ce sera comme le prétendu volontariat de Mackenzie King. On nous mettra dans le plan sans s'occuper de nous. Après tout, avons-nous été consultés pour envoyer des délégués à Bretton Woods ? Qui a choisi ces délégués ? Qui les a mandatés ? Quel mot le peuple canadien a-t-il eu à dire là-dedans ?
C'est la politique du "fait accompli". Le plan est maintenant fini : à votre goût ou non, vous ne pouvez guère rester dehors sans vous isoler du reste de l'humanité. Ce sont les dieux financiers qui mènent le monde.
Les journaux nous ont parlé et rappelé, avec grands éloges et grands espoirs, de l'ordonnance du monde d'après-guerre préparée à Dumbarton Oaks. Il s'agissait d'établir des organismes économiques et militaires pour assurer la paix perpétuelle et réglementer les relations économiques des nations entre elles. Après quoi on nous dira évidemment que l'économie nationale doit être dirigée en fonction de l'économie internationale.
Le 4 décembre, John Blackmore, député créditiste à Ottawa, demandait au premier ministre quand les députés pourraient prendre connaissance du rapport de la conférence de Dumbarton Oaks. Mackenzie King a répondu : Les seuls pays représentés à Dumbarton Oaks ont été l'Angleterre, les États-Unis, la Russie et la Chine. Le premier-ministre canadien n'est donc pas en mesure de donner un rapport à la Chambre.
En voilà une belle ! On nous a dit que c'était pour régler l'avenir de cinquante nations, le Canada y compris. Et seules les Big Four étaient là.
Cardin a dit juste en Chambre :
"Nombre des hommes qui sont là-bas ne savent pourquoi ils se battent. Bien des gens dans les Nations-Unies ne connaissent pas la cause qu'ils défendent."
C'est vrai. Nous croyions nous battre pour la démocratie. Nous sommes, en réalité, en train de nous battre pour que les gros mènent les petits après la guerre. Parions que Staline, lui, sait pourquoi il se bat.