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De Jéricho à Jérusalem

Louis Even le mercredi, 01 novembre 1939. Dans Réflexions

Il ne faut pas rester à Jéricho ; il faut savoir prendre la route de Jérusalem. Mais gardons-nous de faire cette route les yeux fermés. Il y a des voleurs embusqués le long du chemin. N’allons pas croire que les voleurs se trouvent tous à Berlin et qu’il n’y a de victimes qu’en Pologne. Les voleurs ne manient pas toujours des armes d’acier. Ce n’est pas sous la pointe du revolver qu’ont été détroussés tant de cultivateurs, tant d’ouvriers, tant de familles, tant de jeunes gens sur notre bonne terre canadienne depuis dix ans, et avant aussi — détroussés de leur revenu, de leur salaire, de leurs espoirs, de leurs énergies.

Ne marchons pas les yeux fermés sur le danger des malfaiteurs, mais ne détournons pas non plus les yeux des victimes qui gisent dans le fossé. Si nous rivons trop égoïstement notre regard sur des hauteurs d’où nos semblables deviennent invisibles, nous pourrions bien trouver, en entrant à Jérusalem, le Maître qui s’apitoyait sur la misère et la soulageait ; Celui qui, jusqu’au jour du jugement, souffrira de la faim, de la soif et de la nudité sous les traits émaciés et les haillons des déshérités de la terre.

Bien des gens marchent sur la route de Jéricho à Jérusalem. Pas rien que des prêtres et des lévites. Des Samaritains aussi. Et ce ne sont pas toujours les titrés de ce monde qui savent descendre de cheval et se pencher sur les plaies. La tête, c’est quelque chose ; mais le cœur aussi. La charité couvre la multitude des péchés ; la même chose n’a pas été dite de la science.

Si vous observez tant soit peu autour de vous, vous remarquerez même que celui qui descend de cheval est souvent critiqué par les scribes et les docteurs du jour : De quoi se mêle-t-il donc ? N’y a-t-il pas des autorités pour voir au respect de la loi ? Si l’homme qui est dans le fossé avait pratiqué la prudence, il ne serait pas là : qu’on l’y laisse pour servir d’exemple aux autres.

Ce n’est évidemment pas la doctrine prêchée par le Maître, et nombre de ses disciples ont compris son enseignement. Mais après dix-neuf siècles de christianisme, on trouve encore, sur la route de Jéricho à Jérusalem, des brigands de toutes sortes, des victimes nombreuses, des "purs" qui penseraient se contaminer au contact de la misère, et trop peu de bons Samaritains.

"La misère", disait pourtant Ozanam, "ne souffre pas de retard."

Et encore : "L’aumône est la rétribution des services qui n’ont pas de salaire. L’homme qui souffre sert Dieu. Par conséquent, il rend service à la société comme celui qui prie."

Louis Even

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