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Alerte !

Gilberte Côté-Mercier le samedi, 01 août 1942. Dans Réflexions

La crise économique, dont on a tant parlé, est passée ou à peu près. La guerre a fait son œu­vre de rénovation, semble-t-il, puisque c'est ain­si sous un régime imbécile.

La crise avait de terribles effets. Le pire, le plus grave, le plus profond, le plus inhumain, et certainement le plus insultant pour le Créa­teur lui-même, ce fut de tuer la personnalité humaine en lui enlevant tout moyen d'action. Voilà un sacrilège que les chrétiens, encore moins les catholiques, n'ont pas le droit de par­donner aux responsables de la crise.

C'est maintenant la guerre qui règne. La guer­re a libéré l'argent enchaîné et enchaîneur. Les liens de la personne humaine, de la liberté sont tombés, peut-on croire. Nenni ! Les hommes qui étaient au gouvernail du monde sont toujours les mêmes. Leur objectif, toujours le même. Et leurs méthodes diverses mènent toujours à cet objectif.

Si la guerre met l'argent au service des be­soins, le gouvernement vient vite au secours des tyrans pour maintenir l'esclavage.

Mais, oui, la guerre, ça permet toutes les me­sures restrictives. Et au nom de la guerre, le gouvernement établit des milliers de restrictions qui s'appellent plafonds, rations, enrégistre­ments de toutes sortes, mobilisation de soldats et de travailleurs, impôts, surimpôts.

Certes, nous comprenons que gagner la guer­re réclame des sacrifices. Mais, tous ces sacri­fices que nous faisons ont l'air de gagner, en même temps que la guerre, un fameux pouvoir aux financiers.

D'abord, toutes ces lois de guerre sont sujet­tes à privilèges, à exceptions personnelles. Et les privilèges, c'est tellement dangereux pour ceux qui ne sont pas les amis des gouvernants, et c'est tellement commode, d'habitude, pour les financiers. Nous sommes payés pour le sa­voir, nous du peuple.

Et puis, ne voit-on pas que les trustards les plus trustards reçoivent des contrats de guerre, tandis que les petits industriels et petits com­merçants n'en sont pas gratifiés. Or les trus­tards, pour exécuter leurs contrats de guerre, ont besoin de tout leur matériel et de tout leur personnel. Et leurs clients de paix seraient for­cés d'aller s'approvisionner chez les petits four­nisseurs. Ce serait de même coup tuer la clientè­le de paix des trustards et enrichir les petits. Il vaudrait mieux, n'est-ce pas, pour se réserver la clientèle, tuer les petits industriels et petits marchands. Ainsi, on ferait d'une pierre deux coups : amasser de l'argent pendant la guerre, et se débarrasser de quelques importuns qui ont eu le toupet de subsister à la crise de dix ans.

Et en effet, les lois de guerre, on ne peut le nier, font tomber tous les petits commerces. Et après la guerre, on ne sera pas surpris de ne plus voir que de très gros et de très faibles. Le pays aura gagné la guerre avec les sacrifices, mais les financiers auront gagné la guerre et le pouvoir sans sacrifice.

Sans parler des impôts excessifs qui ruinent tous les petits propriétaires.

Perte donc absolue de la liberté conférée par l'indépendance financière pour quiconque n'est pas dans la haute aristocratie financière.

Et ce n'est pas tout. Si ces lois de guerre de­meurent après la guerre, comme le désirent ardemment les communistes si bien reçus au Ca­nada, et les socialistes de toute étiquette, cons­cients ou non, si ces lois persistent, que nous restera-t-il donc de notre liberté ? La personne humaine, que sera-t-elle devenue ?

Loque en haillon pendant la crise, la person­ne humaine ne sera plus qu'un animal en uni­forme après la guerre.

En doutez-vous, vous tous qui subissez le monde d'aujourd'hui ? Vous n'en doutez pas ? Mais, alors, que faites-vous donc contre ça ? Attendez-vous que ça change tout seul ? Ne savez-vous pas que l'histoire est construite par les hommes, les uns ou les autres ?

Croyez-vous que, comme homme, vous avez le droit de laisser anéantir ainsi votre person­ne ? Et comme catholique, si vous en êtes un vrai, avez-vous le droit de laisser assassiner la liberté que Dieu même respecte tant ?

Vous savez que non, et vous attendez encore ? Mais, pourquoi donc, serait-ce le cœur qui vous manquerait, ou seriez-vous engourdis par le confort passager qu'amène la guerre ?

Si le cœur vous manque aujourd'hui, et que vous ne savez pas vous dompter, croyez-vous que vous serez plus fort demain ?

Et si vous êtes plus faible demain, songez-vous que le meurtrier de la personne, lui, le monde moderne, qui ne sera plus après la guer­re qu'une mosaïque de dictatures de toutes sor­tes, même en Amérique, songez-vous qu'il sera de plus en plus fort et de plus en plus invinci­ble ?

La destinée de l'humanité est sans doute d'al­ler à la liberté, puisque le Christ est venu, mais cette liberté peut être retardée de plusieurs gé­nérations, et la faute en sera à toi qui sais, qui vois et qui n'as pas de courage.

Si la civilisation qui vient est un règne d'es­clavage à cause de ta lâcheté, chrétien catholi­que, es-tu prêt à en subir tout le châtiment ?

Ne l'oublie pas, aucune autorité ni aucune passion ne fera que les baptisés ne soient pas des baptisés et que par conséquent ils ne portent pas sur eux la responsabilité du salut du monde.

Alors, que feras-tu ? Que feras-tu tout de sui­te pour te sauver et sauver les autres ?

De quelles énergies disposeras-tu pour fonder ou aider une organisation pacifique qui établisse un ordre nouveau sans passer par le désordre d'une révolution, mais avec la fermeté qu'il faut pour arriver au succès ?

Alerte donc, chrétien !

Gilberte Côté-Mercier

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