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Tombe creusée par le système

le vendredi, 15 octobre 1943. Dans La vie créditiste

À une heure et demie, dans la nuit du dimanche, 19 au lundi 20 septembre, Madame Adélard Lavallée, demeurant à Evain (Témiscamingue), don­nait naissance à un petit Canadien français. La garde-malade de la paroisse se rendit sur les lieux, pour assister la malade.

À la suite de l'accouchement, Mme Lavallée (qui est la femme d'un voltigeur créditiste) fit une grave hémorragie. On appela immédiatement, l'un après l'autre, plusieurs médecins de Rouyn et de Noranda.

Evain est à cinq milles seulement de ces deux villes, et on s'y rend par une route de toute pre­mière qualité. Mais impossible de décider un seul des médecins à bouger. L'un d'eux, pourtant Cana­dien français, posa une seule question : "Si j'y vais, qui va payer pour cela ?"

C'est qu'en effet, les colons ne sont point argen­tés, même s'ils ont fait une belle récolte de bleuets. Et comme il n'y a point encore de dividende, l'ap­pel du pauvre ne semble guère bienvenu. Qui va payer ?

Comme la malade baissait à vue d'œil et qu'il était impossible d'avoir un médecin, quelqu'un dé­cida de mander l'ambulancier Darby, de Rouyn. Lui accourut en vitesse et transporta la malade d'urgence à l'hôpital Youville, de Noranda.

Ce n'est qu'à cinq heures du matin que la mala­de put enfin avoir la visite d'un médecin. C'était trop tard. Ce médecin (un Anglais) arriva à l'hô­pital pour constater que la mère du nouveau-né était rendue au bout de son sang ; impossible main­tenant de faire quoi que ce fût pour la sauver.

De fait, Madame Lavallée quittait définitive­ment son mari et ses quatre enfants vers six heures du matin.

Madame Lavallée est la victime d'un système écœurant, d'un système meurtrier. Si l'argent avait été au service de cette famille, la médecine aurait apporté ses soins à temps, et cette mère ca­nadienne-française serait encore avec les siens.

Une femme gravement malade. Des médecins à dix minutes d'auto. Mais pas de bouts de papier : le système les veut rares.

Mort prématurée. Qui va s'en émouvoir ? Sûre­ment pas le contrôleur de l'argent : les humains ne comptent pas pour lui. Sûrement pas le politicien : il ronfle sur sa nullité.

Voilà tout de même une tombe creusée par une dictature qui n'a point sa capitale à Berlin.

Réal CAOUETTE

"Ce qu'il faut aux États-Unis, c'est un système monétaire pour service public, au lieu d'un système monétaire pour des profits privés." (Henry Ford)

Et au Canada aussi.

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