Quel actif la cause du Crédit Social tirera-t-elle de la Convention Nationale de Toronto ? Il est évidemment difficile de le dire d'avance. Mais les créditistes sont, en général, assez réalistes pour tirer parti, pour leur mouvement, de toutes les occasions qui s'y prêtent. Et la rencontre, à Toronto, de créditistes venus de toutes les provinces, est certainement une de ces occasions-là.
Nous, créditistes du Québec, ne sommes pas les promoteurs de la Convention ; mais nous y prenons part cordialement, et le faisant, nous y apportons des objectifs que nous croyons purement créditistes. On peut lire, en cette page même, le texte de la déclaration de principes endossée par nos délégués et leurs délégants.
Le but de la Convention, d'après ses promoteurs, serait de choisir un leader national, rédiger une plateforme nationale et former une organisation nationale.
Il y aura certainement des précisions à établir sur le sens et la portée des deux premiers points. Les vues exprimées en page 4, dans l'article "Crédit Social et parti politique", sont celles qui prévalent dans nos groupes créditistes de cette province.
Quant à une organisation nationale, nous la concevons comme orientée vers la conquête des esprits plus que vers la conquête du pouvoir, vers une politique de pression plutôt qu'une politique de parti, sans pour cela renoncer, le moins du monde, à pousser des créditistes, non seulement dans les parlements, mais partout où il y a le bien commun à promouvoir.
Voici, d'ailleurs, comment s'exprime la lettre de créance de nos délégués, après leur déclaration de principes :
"Pour hâter l'avènement au Canada d'une véritable démocratie économique et politique, nous favorisons l'établissement d'une organisation créditiste nationale. Nous attendons de cette organisation :
1. La coordination des forces créditistes existantes, pour toute action fédérale jugée possible, et appropriée à cette fin ;
2. L'emploi de moyens efficaces pour couvrir au plus tôt les territoires non encore touchés ;
3. Les efforts opportuns pour placer au Parlement le plus grand nombre possible de députés engagés à réclamer et appuyer une législation créditiste ;
4. L'exercice, dans le Parlement et hors du Parlement, d'une pression constante et concertée pour réclamer un régime financier créditiste".
Le premier point encourage les organisations provinciales actuelles à se fortifier pour fournir davantage à l'ensemble.
Le deuxième point nous presse d'étendre notre action à tous les districts de Nouvelle-France, et surtout il invite nos confrères de langue anglaise à se lancer à l'assaut de provinces entières pratiquement intactes.
Le troisième point laisse pleine liberté d'action aux comtés qui se croient de taille à pousser un candidat créditiste.
Le quatrième point suggère des activités variées, en tout temps, dans tous les coins et dans tous les domaines.
LA DIRECTION
La déclaration suivante est endossée par chaque délégué de notre province à la Convention Nationale de Toronto et par tous les créditistes qui ont signé les lettres de créance des délégués. Cette déclaration ne prétend pas du tout couvrir le champ complet de la politique. Elle se borne, au contraire, à des principes créditistes, d'application générale, qui peuvent rallier tous les groupes et qui laissent pleine liberté d'orientation, selon les aspirations spéciales aux individus, aux familles, aux associations et aux provinces.
Toute société bien organisée doit favoriser l'épanouissement de la personne humaine, protéger l'instruction familiale et promouvoir les bonnes relations entre les hommes.
C'est le devoir des gouvernements, aux différents degrés, d'éliminer, dans la mesure du possible, les obstacles qui entravent le bon exercice de la vie en société.
On constate que, parmi ces obstacles, ceux d'ordre temporel sont surtout des obstacles financiers. L'abondance immédiatement possible permettrait d'assurer un minimum vital à tous les individus, à toutes les familles, sans abaisser le niveau de vie actuel de personne. Mais le système distributif de l'argent n'est pas en rapport avec les disponibilités immenses de la production.
Or, c'est surtout le devoir du gouvernement fédéral de légiférer en matière monétaire.
Nous soutenons que nos problèmes économiques, et beaucoup d'autres qui en dépendent ou en souffrent, tant privés que publics, tant provinciaux que fédéraux, seraient considérablement allégés, sans atteinte à la liberté et sans léser les intérêts légitimes de personne, par l'application des principes scientifiques du Crédit Social.
La Technique monétaire du Crédit Social :
1. Rétablirait la souveraineté du gouvernement, en reprenant des banques le droit sur les émissions et les retraits d'argent (numéraire et crédit), pour remettre ce droit entre les mains du gouvernement de la nation ;
2. Fournirait au peuple canadien un pouvoir d'achat capable d'acheter tous les produits et services que le Canada peut fournir :
a) Par l'établissement d'un Office National du Crédit, pour régler les émissions et les rappels d'argent d'après les besoins de la population et en rapport avec la production possible du pays ;
b) Par un dividende national périodique à tous et à chacun, sans conditions ;
c) Par un mécanisme d'ajustement des prix de détail, qui protégerait les profits légitimes du producteur tout en maintenant le niveau général des prix de vente au niveau général du pouvoir d'achat, évitant ainsi à la fois toute inflation et toute déflation.
L'argent émané de l'Office National du Crédit, mais distribué directement à toutes les ramifications du corps économique, permettrait aux individus de poursuivre leurs objectifs, avec le minimum d'intervention de la part des gouvernements supérieurs.
Nous favorisons la décentralisation des pouvoirs et revendiquons l'autonomie la plus complète des provinces.
Nous sommes irréductiblement opposés au communisme, au socialisme d'État, au planisme et à l'enrégimentation.
Nous réclamons la liberté de l'initiative personnelle, la liberté d'association et la protection de la propriété privée, tant que l'exercice de ces droits ne porte pas atteinte aux mêmes droits chez les autres.
Nous demandons l'application du principe créditiste "Tout ce qui est physiquement possible doit l'être financièrement", dans la solution, de concert avec les provinces et avec les organismes appropriés, des problèmes d'après-guerre, y compris :
le rétablissement civil des démobilisés ;
le retour de l'industrie à la production de paix ; l'orientation du travail offert et utile ;
les allocations aux vieillards, aux invalides et aux mères ;
les mesures sanitaires ;
les projets répondant à des besoins publics ;
l'aide à l'éducation, à la colonisation, à l'agriculture, etc.
Dans les relations internationales, tout en maintenant la souveraineté absolue du Canada comme nation, nous adhérons au principe de la bonne entente et de la coopération entre tous les peuples.
Dans le commerce international, nous favorisons l'échange de nos surplus contre les surplus des autres pays qui répondent à des besoins des consommateurs canadiens.