La 12ème causerie de l'Union des Électeurs à la radio, préparée par Mlle Gilberte Côté, traîtait de l'Union des Électeurs comme moyen d'obtenir le Crédit Social et revendiquait la logique de la doctrine créditiste. Elle touchait en passant à l'ignorance dans laquelle la presse contrôlée laisse ses lecteurs. Nous reproduisons ici la majeure partie du texte de cette causerie.
L'Union des Électeurs est fondée et fonctionne dans la province de Québec depuis le mois de décembre 1942.
L'Union des Électeurs n'est pas le Crédit Social. Il ne faut pas confondre les deux choses.
Le Crédit Social est une technique économique, pour distribuer l'abondance des richesses amenée par le progrès.
L'Union des Électeurs est un moyen pour faire passer cette technique dans les lois.
L'Union des Électeurs existe, d'ailleurs, pour assurer le service du bien commun par les institutions politiques, dans tous les domaines et en tout temps.
Le Crédit Social fut enseigné dans l'Alberta dès avant 1931. Les Créditistes de l'Alberta, pour obtenir le Crédit Social, firent élire des députés créditistes en 1935.
Les députés créditistes, une fois au pouvoir, se sont aperçu que le pouvoir, actuellement, ne réside pas sur les sièges du Parlement, mais dans les bureaux des financiers.
Voilà pourquoi l'arrivée au Parlement d'une majorité créditiste n'a pas suffi pour donner tout de suite le Crédit Social à la province. Les vrais maîtres de l'Alberta, les financiers, ne trouvaient pas devant eux une force supérieure à la leur pour combattre leurs ambitions.
La seule force capable de faire face aux financiers est la force d'un peuple éclairé et organisé. Les députés sont les instruments d'une union du peuple, mais les députés seuls ne peuvent rien.
Les députés créditistes de l'Alberta ont fait beaucoup de bien à leur province. La province d'Alberta est maintenant en bonne voie vers le Crédit Social. Elle jouit même d'excellentes mesures qui s'apparentent aux mesures créditistes. Mais on peut dire que, si l'Alberta n'a pas encore le Crédit Social proprement dit, c'est en grande partie parce que le peuple n'est pas uni dans un seul bloc derrière ses députés créditistes.
La formule, la seule formule du succès est une Union des Électeurs. Et ici, dans la province de Québec, les créditistes s'attachent surtout à former leur Union des Électeurs.
Lorsque les élections viendront, sûrement que dans les comtés où l'Union des Électeurs est formée et prépondérante, les députés élus seront des députés choisis non pas par les partis, rouge ou bleu, mais par l'Union des Électeurs eux-mêmes.
Mais le Crédit Social, pas plus dans la province de Québec que dans l'Alberta, ne se réalisera par une élection seulement. L'élection de députés créditistes au Parlement de Québec serait un pas de fait vers le succès, à condition que l'Union des Électeurs continue à s'organiser et à surveiller.
Aussi, tous nos efforts vont-ils à l'organisation de l'Union des Électeurs.
L'Union des Électeurs est donc un moyen, le seul bon selon nous, dans les circonstances actuelles, pour nous conduire au Crédit Social.
Dans la province de Québec, le Crédit Social est enseigné depuis 1935 par M. Louis Even, qui travaillait alors à l'imprimerie de M. J. J. Harpell, la Garden City Press, à Ste-Anne-de-Bellevue.
En 1936, M. Even fonda les Cahiers du Crédit Social qui, malheureusement, ne pouvaient paraître que fort irrégulièrement.
Les Cahiers furent remplacés par le journal Vers Demain, qui aura bientôt quatre ans d'existence et paraît régulièrement, deux fois par mois.
Les propagandistes du Crédit Social et du journal VERS DEMAIN ont formé depuis une merveilleuse organisation de Canadiens-Français, des patriotes qui se dévouent généreusement pour sauver la Nouvelle-France.
Ces propagandistes, depuis décembre 1942, sont groupés sous l'appellation de l'Union des Électeurs.
Les actifs, ceux que nous appelons les Voltigeurs dans l'Union des Électeurs, sont près de 5,000. Cinq mille hommes ou femmes qui donnent trois heures par semaine pour arracher leur pays à la griffe des financiers.
Nombre d'entre vous, Mesdames et Messieurs, n'étiez pas au courant de cela ? Pourtant, vous savez ce qui se passe en Europe, en Asie, en Afrique. Et personne ne vous a dit ce qui se passe dans la province de Québec ?
C'est curieux. Y aurait-il des qens qui seraient intéressés à ce que vous ne soyez pas mis au courant ?
C'est la vérité : il y a dans la province de Québec un mouvement créditiste qui groupe cinq mille actifs et trois cent mille sympathisants. Et vous ne connaissez même pas l'existence de ce mouvement !
C'est parce que vos sources de renseignements sont contrôlées, tout autant que vos sources de revenus en argent, vos sources de provisions en sucre, en beurre, en thé, en gazoline, en pneus, et en toutes autres sortes de marchandises.
N'allez pas croire qu'il y ait rien que votre corps qui soit contrôlé. C'est parce que votre esprit est depuis longtemps contrôlé qu'on a réussi à contrôler votre corps.
On contrôle la tête avant de pouvoir contrôler le reste. Le peuple ignorant fut le commencement du peuple esclave.
Autrefois, lorsqu'on annonçait à un esclave qu'il avait une âme, il n'en croyait pas ses oreilles. "Moi, une âme ! Mais je me suis toujours pris pour une bête !"
Aujourd'hui, lorsqu'on annonce à un homme qu'il pourrait se délier des chaînes de l'argent, il n'en croit pas ses oreilles. "Moi, dominer ! Mais j'ai toujours cru que l'argent était par nature le maître des hommes !"
Ainsi, c'est parce qu'on nous a menti de partout et parce qu'on nous ment encore, que nous ne savons pas ce qui se passe chez nous.
Le mouvement créditiste est très fort dans la province de Québec, et il y a des citoyens qui ne savent pas ce qu'est le Crédit Social.
Les créditistes ne font pas de secret. Ils ne demandent pas mieux que d'instruire leurs concitoyens de ce qu'ils savent.
On vous a longtemps dit que le Crédit Social était une folie et qu'Aberhart était un illuminé. On a voulu tuer le Crédit Social en le rendant ridicule. Pendant un peu de temps, on l'a empêché de se répandre. Mais ce temps-là est passé. Examinez vous-même le Crédit Social, avec votre tête à vous. Et vous jugerez si c'est ridicule ou logique de vouloir, comme les créditistes, que les hommes mangent selon leur appétit et les choses qui sont devant eux.
Vous jugerez si c'est ridicule ou logique de réclamer, avec les créditistes, un dividende pour tout le monde quand la richesse du pays est débordante et ne demande qu'à se répandre.
Vous jugerez si c'est ridicule ou logique d'attribuer, avec les créditistes, plus d'importance aux bonnes choses à manger, à se vêtir, à se loger, qu'aux chiffres inscrits sur des billets de papier. Vous jugerez si c'est logique de se servir des machines, comme veulent les créditistes, au lieu de les détruire ou de les empêcher de naître.
Les exploiteurs d'hommes s'appliquent toujours à contrôler les sources d'information. Ils contrôlent les esprits pour s'assurer le contrôle des corps. Le contrôle de la tête permet de contrôler le reste. Le peuple ignorant fut le commencement du peuple esclave.
Vous jugerez si c'est logique d'appliquer, avec les créditistes une technique pour faire cesser les crises d'argent et les guerres d'argent.
Vous jugerez si c'est logique de vouloir, avec les créditistes, mettre la politique au service du peuple, au lieu de laisser les hommes d'État esclaves de la finance.
Le bon sens, la logique du Crédit Social peuvent faire honte à ceux qui ont toujours enseigné le contraire. Ils peuvent faire mal à ceux qui auraient dû dénoncer ce que nous avons et qui se sont tus. Mais l'orgueil de ces gens-là ne rend pas le Crédit Social ridicule.
Pas plus que la cupidité des financiers n'a rendu Aberhart illuminé.
C'est facile à dire : Vous êtes un fou. Mais autre chose est de le prouver. Et sont bien mal venus pour donner cette preuve, ceux qui vivent grassement d'un système qui ne permet pas de manger en temps de paix lorsque tous les hommes sont au service des richesses de paix, et qui permet de mieux vivre en temps de guerre lorsque l'humanité entière est au service de la mort.
Est-ce bien sensé, ce que nous avons aujourd'hui ? Est-elle bien sensée, la vie que nous vivons ?
Et faudrait-il, comme certains, ridiculiser tout ce qui est beau, sous prétexte que c'est trop beau ? Tous les génies parurent des fous aux yeux de leurs contemporains, parce que leurs contemporains avaient perdu ce qui fait vivre. Ils avaient perdu l'espoir.
Ceux qui ne croient plus aux belles choses sont déjà des vieux. Et ce n'est pas la vieillesse qui donne la vie ; c'est la jeunesse, la vraie, celle de l'âme, celle des idées et des aspirations, la jeunesse que certains hommes de vingt ans ne connaissent plus et dont peuvent encore vivre des hommes de soixante-dix ans.
Électeurs, n'écoutez donc pas ces voix qui condamnent le Crédit Social. Jugez vous-mêmes.