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Pas d'inflation avec le Crédit Social

Louis Even le mercredi, 15 décembre 1943. Dans Le Crédit Social enseigné par Louis Even

Accusation absurde

Il est coutume, chez ceux qui s'opposent au Crédit Social, souvent sans savoir en quoi il con­siste, de déclarer doctoralement : Le Crédit Social conduirait infailliblement à l'inflation. Et quand ils ont dit cela, ils pensent avoir disposé du Cré­dit Social.

Pourtant, on a déjà eu, dans l'histoire, plus d'un exemple d'inflation désastreuse ; et dans aucun cas, il ne s'agissait de Crédit Social, puisque les mêmes adversaires mettent en garde contre ce système sous prétexte qu'il n'a encore fait ses preuves nulle part.

Pendant ce temps-là, le système actuel fait de l'inflation, de la déflation, de la reflation ; et, de tous nos grands gardiens de l'orthodoxie, pas un seul ne songe à reprocher au système monétaire ces successions d'accès de fièvre et d'accès de fai­blesse.

On a un système continuellement malade ; mais ceux qui en profitent comme ceux qui nichent à son abri persistent à déclarer qu'il se porte bien.

L'école créditiste sait mieux que toute autre en quoi consiste l'inflation ; et elle ne fait pas que condamner l'inflation, elle possède une tech­nique qui élimine toute possibilité d'inflation.

L'école créditiste possède un mécanisme d'a­justement des prix. Le système actuel n'en a pas ; et la preuve, c'est qu'il faut faire intervenir des commissions, des décrets, des sanctions, des sur­veillants, pour empêcher les prix de prendre la mouche.

Qu'est-ce que l'inflation ?

L'augmentation d'argent et l'inflation sont deux choses différentes. Si toute augmentation était de l'inflation, le Canada, les États-Unis, et tous les autres pays en développement seraient en perpé­tuel état d'inflation, puisqu'il faut bien aug­menter l'argent lorsque la population et la pro­duction augmentent.

L'inflation consiste dans la course montante des prix. C'est aux prix qu'il faut attacher le qualifi­catif d'inflation. Ce sont les prix gonflés qui font l'inflation, bien plus que le portefeuille gonflé.

La cause de l'inflation, ce n'est pas tant l'abon­dance d'argent en face du produit, que la rareté du produit en face de l'argent.

Qu'un millionnaire entre dans un magasin, cela ne fait pas monter les prix des produits. Mais qu'un magasin se vide plus vite qu'il ne peut se remplir, cela fait monter les prix.

C'est la hausse démesurée des prix qui consti­tue l'inflation ; et la première cause de la hausse des prix, c'est la rareté du produit par rapport à la demande.

Remède normal à l'inflation

Le remède normal à l'inflation, c'est l'augmen­tation de la production à un niveau où il y en a assez pour répondre amplement aux appels de la consommation, aux besoins des familles.

Nous disons remède normal, en temps normal ; parce qu'il y a des circonstances, comme la guerre, où il faut bien renoncer à la satisfaction des besoins des consommateurs pour pousser la satisfaction des besoins de la guerre.

Mais c'est du temps normal que nous aimons à parler. Nous jugeons que la guerre est un état anormal. Et si le système d'argent actuel ne con­sent à avoir un peu de bons sens qu'en temps de guerre, le système créditiste, lui, prétend être le système monétaire logique pour servir une huma­nité qui cherche la vie et non la mort.

En temps normal, au Canada au moins, il est certainement possible de produire toute la nour­riture, tous les vêtements, tous les meubles, tous les services dont les consommateurs ont besoin. Si maintenant vous adaptez le mécanisme d'écoule­ment, pour que ces produits entrent dans les mai­sons jusqu'à saturation des besoins, rien ne fera monter les prix des produits.

Quel mobile, en effet, pourrait pousser un pro­ducteur ou un marchand à monter le prix des produits dont tout le monde a assez ? Si, par exemple, les maisons ont toute la farine dont les mé­nagères ont besoin, quel marchand de farine son­gera à hausser son prix de vente quand personne n'a plus besoin de farine ?

La production et la distribution de l'abondance donnent le coup de mort à toute inflation.

Inflation et Crédit Social

Dire que le Crédit Social va conduire à l'infla­tion, c'est ignorer complètement ou l'inflation, ou le Crédit Social ; peut-être les deux, dans bien des cas.

L'inflation, c'est la fuite du produit devant le consommateur ; le Crédit Social, c'est la rencontre du produit et du consommateur.

L'inflation soustrait le produit à l'atteinte du consommateur ; le Crédit Social jette le produit dans les mains du consommateur.

L'inflation est redoutée, et à bon droit, juste­ment parce que, avec l'inflation, les produits de­viennent inaccessibles, sauf peut-être à quelques riches privilégiés. Or, l'essence du mécanisme cré­ditiste, c'est de rendre les produits accessibles, ac­cessibles à la masse des consommateurs.

L'inflation, c'est le produit cherché, mais devenu si rare que de pleins sacs de papier-monnaie ne peuvent l'obtenir. C'est la privation, malgré tout l'argent mis en circulation, parce que le produit fait défaut.

Le Crédit Social, c'est la distribution facile de l'abondance. L'idée d'abondance, d'abondance li­bérée, d'abondance facile à prendre, même donnée en partie par le dividende, cette idée-là est l'exact opposé de la privation, de la rareté ; elle est donc aux antipodes de l'inflation.

Crédit Social et inflation sont deux termes ab­solument contradictoires. Contradictoires par na­ture, par définition. Aussi contradictoires que les mots abondance et privation.

Inconséquences des adversaires

Mais les critiques du Crédit Social n'ont point cette lucidité. Ils se contredisent sans s'en rendre compte.

Vous entendrez un adversaire, presque dans le même souffle, reprocher au Crédit Social de donner quelque chose pour rien et de conduire à l'in­flation. Cela ne va guère ensemble, puisque l'infla­tion laisse les consommateurs sans produits.

Dire que le Crédit Social donne quelque chose pour rien, qu'il distribue de la production même aux petits enfants qui sont encore au berceau, mê­me aux malades, même aux vieillards, c'est con­forme à la vérité. Nous aimons ce reproche-là. Mais dire que le Crédit Social va faire l'inflation, donc barrer les produits à tout le monde, même aux travailleurs, voilà qui n'y est plus.

Vous êtes dans une ville où l'eau ne peut être obtenue que du système d'aqueduc. Si l'eau de­vient rare, très rare, son prix peut monter, cela se conçoit très bien.

Mais si vous êtes au bord d'une rivière bien fournie, où il n'y a qu'à se pencher pour puiser toute l'eau dont vous avez besoin, pouvez-vous concevoir que le prix de cette eau va monter ?

Dire que le Crédit Social, avec son argent adap­té pour distribuer l'abondance, va causer l'infla­tion, c'est dire que quitter l'aqueduc insuffisant pour s'établir au bord du fleuve abondant, c'est se condamner à payer l'eau plus cher.

Mais les esprits-taupes se demandent comment le Crédit Social va distribuer la production sans mettre de l'argent en face de la production, et comment il peut augmenter l'argent en face d'une production augmentée sans causer l'inflation.

Le Crédit Social va distribuer l'abondance, donc tuer toute inflation, à cause de la manière dont il augmentera l'argent selon les produits en face des besoins.

Anarchie du système actuel

Dans le système actuel, on comprend assez bien que l'augmentation de l'argent tende à l'inflation des prix, à cause de la manière dont l'argent est mis au monde.

L'argent vient au monde, aujourd'hui, prêté à la production. Il ne peut donc arriver au consom­mateur sans entrer dans un prix. De plus, tout argent ainsi mis en circulation exige un retour plus gros que le départ. Le producteur est donc obligé de pomper plus d'argent qu'il en distribue, afin de rencontrer ses obligations d'emprunteur. Pour extraire plus d'argent qu'il en distribue, il faut bien qu'il enfle son prix. Enfler le prix, c'est faire de l'inflation. C'est donc le banquier prêteur qui force à l'inflation.

Puis le banquier rappelle l'argent au bout d'un terme marqué, alors qu'au bout de ce temps-là, il n'y a absolument rien dans le régime producteur qui demande de supprimer l'argent. Le banquier diminue l'argent quand bien même la capacité de production ne diminue pas du tout, quand bien même les consommateurs ne désirent pas du tout renoncer à acheter les produits.

Le banquier est un anarchiste en technique mo­nétaire. On en voit le résultat. Son argent — l'argent du banquier — ne venait pas lorsque les produits à vendre abondaient. Et lorsque les produits à vendre se font rares, comme pendant la guerre, son argent se fait plus abondant.

C'est tellement de travers que, pendant la guer­re, le gouvernement est obligé de rogner la capacité d'achat de l'argent du banquier. Il faut faire cha­peronner l'argent du banquier par des coupons. C'est un argent qui ne sait pas se conduire ; il est mal élevé, parce que ses parents lui ont appris à négliger sa fonction principale et l'ont habitué à des fonctions de brigandage.

Mais, avec le Crédit Social ?

Rien de tel avec l'argent du Crédit Social. Il viendrait au monde directement entre les mains du consommateur, donc sans entrer dans la structure des prix. Puis il viendrait en face des produits, d'a­près le volume des produits répondant aux besoins des consommateurs.

L'argent émis par le mécanisme d'ajustement des prix (escompte compensé) est lié à un abaisse­ment du prix et au passage du produit du mar­chand au consommateur : c'est le prix diminué, c'est le produit distribué, c'est l'anéantissement de l'inflation.

Louis Even

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