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La société doit créer son argent

Alain Pilote le samedi, 01 mai 2010. Dans Crédit Social

Réponses à quelques questions

Les lecteurs réguliers de Vers Demain l’auront remarqué, la première demande des créditistes, des Bérets Blancs du journal Vers Demain, c’est que le gouvernement fédéral, représentant de la société, reprenne son droit de créer l’argent du pays. Une fois cela chose faite, il sera possible d’appliquer les deux autres principes du Crédit Social: le dividende mensuel à chaque citoyen, et l’escompte périodique sur les prix, pour empêcher toute inflation.

Mais pour les nouveaux lecteurs, cette demande peut susciter quelques questions. Nous citerons ici les plus fréquentes, en y apportant une courte réponse.

Question: Vous dites que le gouvernement doit créer son argent. Mais ne le fait-il pas déjà, n’y a-t-il pas les billets de la Banque du Canada?

Réponse: Si le gouvernement fédéral créait son argent, comment se fait-il alors qu’il ait une dette de plus de 566 milliards de dollars? La réalité, c’est que les billets de banque et les pièces de monnaie ne viennent en circulation que s’ils sont prêtés par les banques, à intérêt. De plus, cette sorte d’argent (billets de banque et pièces de monnaie, ou «argent numéraire») représente moins de 10 pour cent de l’argent du pays; l’autre sorte d’argent, représentant plus de 90 pour cent, est l’argent de chiffre créé par les banques, qu’on voit sur les chèques ou les comptes de banque.

Question: Pourquoi voulez-vous que le gouvernement crée l’argent? L’argent actuel des banques n’est-il pas bon?

Réponse: Les banques privées émettent l’argent à intérêt, sous forme de dette, ce qui crée des dettes impayables. Par exemple, supposons que la banque vous prête 100 $, à 6 pour cent d’intérêt. La banque crée 100 $, mais vous demande de rembourser 106 $. Vous pouvez rembourser 100 $, mais pas 106 $: le 6 $ pour l’intérêt n’existe pas, puisque seule la banque a le droit de créer l’argent, et qu’elle n’a créé que 100 $, pas 106 $.

En fait, lorsque la banque vous accorde, un prêt, elle vous demande de rembourser de l’argent qui n’existe pas. Le seul moyen de rembourser 106 $ alors qu’il n’existe que 100 $, c’est d’emprunter aussi ce 6 $ à la banque, et votre problème n’est pas réglé, il n’a fait qu’empirer: vous devez maintenant 106 $ à la banque, à 6 pour cent d’intérêt, soit 112,36 $, et plus les années passent, plus les dettes s’accumulent, il n’y a aucun moyen de s’en sortir.

Certains emprunteurs, pris individuellement, peuvent réussir à rembourser à la banque leur prêt en entier, capital et intérêt, mais tous les emprunteurs, pris dans leur ensemble, ne le peuvent pas. Si certains réussissent à rembourser 106 $ alors qu’ils n’ont reçu que 100 $, c’est qu’ils ont pris le 6 $ qui manque sur l’argent mis en circulation par les emprunts des autres, ce qui rend encore plus difficile pour les autres de rembourser leurs propres emprunts. Pour que certains soient capables de rembourser leurs prêts, il faut nécessairement qu’il y en ait d’autres qui fassent faillite. Et ce n’est qu’une question de temps avant que tous les emprunteurs, sans exception, se retrouvent dans l’impossibilité de rembourser le banquier, et cela, quel que soit le taux d’intérêt exigé.

Certains diront que si on ne veut pas s’endetter, on n’a qu’à ne pas emprunter. Mais le fait est que si personne n’empruntait d’argent de la banque, il n’y aurait pas un sou en circulation. Et cet argent emprunté de la banque ne peut pas rester en circulation indéfiniment: il doit retourner à la banque lorsque le prêt vient à échéance... accompagné de l’intérêt, évidemment.

Dettes impayables

Cela signifie que l’on veut simplement conserver la même quantité d’argent en circulation dans le pays, année après année, il faut accumuler des dettes impayables. Par exemple, si l’on veut maintenir 100 $ en circulation dans le pays, année après année, en l’empruntant à un taux de 6%, la dette sera de 106 $ après un an, puis de 112,36 $ après deux ans (106 $ plus l’intérêt de 6%), et ainsi de suite. Au bout de 70 ans, la dette aura atteint la somme de 5907,59 $, et il n’y aura toujours que 100 $ en circulation.

Croissance d'une dette de 100$ à 6% d'intérêt

Croissance d'une dette de 100$ à 6% d'intérêt

Dans le cas des dettes publiques, les banquiers se contentent de se faire payer l’intérêt sur cette dette. Est-ce une faveur qu’ils nous font ? Non, cela ne fait que retarder l’impasse financière de quelques années, car au bout d’un certain temps, même l’intérêt sur la dette devient impayable. Ainsi, dans l’exemple du 100 $ emprunté à 6%, au bout de 50 ans, l’intérêt sur la dette est de 104,26 $, soit plus que tout l’argent en circulation.

Il ne faut donc pas se surprendre que les dettes des pays civilisés atteignent des niveaux astronomiques. Par exemple, la dette du Canada, qui n’était que de 24 milliards $ en 1975, dépasse maintenant les 566 milliards $. Alors, pour satisfaire les banquiers, le gouvernement doit couper dans ses dépenses, sauf celle du service de la dette. Attendra-t-on que le service de la dette nécessite 100% des taxes pour changer le système, ou préférera-t-on faire crever les gens?

Le gouvernement en a le pouvoir

Question: Le gouvernement a-t-il le droit de créer son argent? Cet argent serait-il aussi bon que celui des banques?

Réponse: Bien sûr que le gouvernement a le droit, puisque c’est lui-même qui a donné ce droit aux banques. Que le gouvernement se refuse un privilège qu’il accorde lui-même aux banques, c’est le comble de l’imbécillité! C’est d’ailleurs le premier devoir de chaque pays souverain d’émettre sa propre monnaie, mais tous les pays aujourd’hui ont injustement cédé ce droit à des compagnies privées, les banques à charte. Le premier pays à avoir ainsi cédé à des compagnies privées son pouvoir de créer la monnaie fut la Grande-Bretagne, en 1694. Au Canada et aux États-Unis, ce droit fut abandonné en 1913.

Ce n’est pas le banquier qui donne à l’argent sa valeur, c’est la production du pays. Le banquier ne produit absolument rien, il ne fait que créer des chiffres, qui permettent au pays de faire usage de sa propre capacité de production, de sa propre richesse. Sans la production de tous les citoyens du pays, les chiffres du banquier ne valent absolument rien. Donc, le gouvernement peut très bien créer lui-même ces chiffres, représentant la production de la société, sans passer par les banques, et sans s’endetter. Alors, pourquoi le gouvernement devrait-il payer de l’intérêt à un système bancaire privé pour l’usage de son propre argent, qu’il pourrait émettre lui-même sans passer par les banques, sans intérêt, sans dette?

Cette question fut d’ailleurs clairement posée à Graham Towers, gouverneur de la Banque du Canada de 1935 à 1954, lors de sa comparution devant le Comité parlementaire de la Banque et du Commerce, en avril 1939:

«Pourquoi un gouvernement ayant le pouvoir de créer l’argent devrait-il céder ce pouvoir à un monopole privé, et ensuite emprunter ce que le gouvernement pourrait créer lui-même, et payer intérêt jusqu’au point d’une faillite nationale?»

Réponse de Towers: «Si le gouvernement veut changer la forme d’opération du système bancaire, cela est certainement dans le pouvoir du parlement.» En effet, la Constitution canadienne donne clairement au gouvernement fédéral ce pouvoir de créer l’argent.

Aucun danger d’inflation

Question: N’y a-t-il pas danger que le gouvernement abuse de ce pouvoir et émette trop d’argent, et que cela fasse de l’inflation? N’est-il pas préférable de laisser ce pouvoir aux banquiers, afin de laisser ce pouvoir à l’abri des caprices des politiciens?

Réponse: L’argent émis par le gouvernement ne serait pas plus inflationniste que celui émis par les banques: ce seraient les mêmes chiffres, basés sur la même production du pays. La seule différence, c’est que le gouvernement n’aurait pas à s’endetter ni à payer de l’intérêt pour obtenir ces chiffres.

Au contraire, la première cause de l’inflation, c’est justement l’argent créé sous forme de dette par les banques: l’inflation, ça veut dire les prix qui augmentent. Or, l’obligation pour les compagnies et gouvernements qui empruntent de ramener à la banque plus d’argent qu’il en est sorti oblige justement les compagnies à gonfler leurs prix, et les gouvernements à gonfler leurs taxes.

Quel est le moyen qu’utilise actuellement le gouverneur de la Banque du Canada pour combattre l’inflation? Précisément ce qui la fait augmenter en pratique, soit hausser les taux d’intérêts! Comme l’ont dit certains premiers ministres provinciaux, «c’est comme essayer d’éteindre un feu en l’arrosant d’essence.»

Mais il est bien évident que si le gouvernement canadien se mettait à créer ou imprimer de l’argent n’importe comment, sans aucune limite, selon les caprices des hommes au pouvoir, et sans relation avec la production existante, on aurait de l’inflation, et l’argent perdrait sa valeur. Mais ce n’est pas du tout cela que les créditistes proposent.

Comptabilité exacte

Ce que les créditistes de Vers Demain proposent, lorsqu’ils parlent d’argent fait par le gouvernement, c’est que l’argent soit ramené à son rôle propre, qui est d’être un chiffre qui représente les produits, ce qui en fait est une simple comptabilité. Et puisque l’argent n’est qu’un système de comptabilité, il suffirait d’établir une comptabilité exacte.

Le gouvernement nommerait une commission de comptables, un organisme indépendant, qui serait appelé «Office National de Crédit» (au Canada, la Banque du Canada pourrait très bien accomplir cette fonction, si le gouvernement lui en donnait l’ordre). Cet Office National de Crédit serait chargé d’établir une comptabilité juste, où l’argent ne serait que le reflet, l’expression financière exacte des réalités économiques: la production serait exprimée par un actif, et la destruction par un passif. Et comme on ne peut consommer plus que ce qui est produit, le passif ne pourrait jamais dépasser l’actif, et tout endettement serait impossible.

En pratique, voici comment cela fonctionnerait: l’argent nouveau serait émis par l’Office National de Crédit au rythme de la production nouvelle, et retiré de la circulation au rythme de la consommation de cette production (La brochure de Louis Even, Une finance saine et efficace, explique ce mécanisme en détail). Il n’y aurait donc aucun danger d’avoir plus d’argent que de produits: on aurait un équilibre constant entre l’argent et les produits, l’argent garderait toujours sa même valeur, et toute inflation serait impossible. L’argent ne serait pas émis selon les caprices du gouvernement, puisque la commission de comptables de l’Office National de Crédit ne ferait qu’agir selon les faits, selon ce que les Canadiens produisent et consomment. Ce ne serait donc pas le gouvernement ou le parti au pouvoir qui dicterait la quantité d’argent à émettre, mais les statistiques de la production et de la consommation, qui proviennent des activités libres des producteurs et des consommateurs.

 billets de banque et pièces de monnaie

«Les billets de banque et les pièces de monnaie ne viennent en circulation que s’ils sont prêtés par les banques, à intérêt.»

La meilleure façon d’empêcher les prix de monter, c’est de les faire baisser. Le Crédit Social propose de plus un mécanisme pour abaisser les prix, appelé «escompte compensé», qui permettrait aux consommateurs de pouvoir se procurer toute la production mise en vente avec le pouvoir d’achat dont ils disposent, en abaissant le prix de vente des produits (un escompte) d’un certain pourcentage, pour que le prix total de tous les prix soit équivalent au pouvoir d’achat total disponible des consommateurs. Cet escompte est ensuite remboursé au marchand par l’Office National de Crédit.

Plus aucun problème financier

Si le gouvernement créait son propre argent selon les besoins de la société, il serait automatiquement capable de payer tout ce qu’il est capable de produire, et n’aurait plus besoin d’emprunter des institutions financières de l’étranger ou d’ici. Les seules taxes que les gens paieraient, seraient pour les services qu’ils consomment. On n’aurait plus à payer trois ou quatre fois le prix de développements publics à cause des intérêts.

Ainsi, quand il serait question d’un nouveau projet, le gouvernement ne se demanderait pas: «A-t-on l’argent?», mais «A-t-on les matériaux, les travailleurs pour le réaliser?» Si oui, l’argent viendrait automatiquement financier cette production nouvelle. La population canadienne pourrait réellement vivre selon ses véritables moyens, les moyens physiques, les possibilités de production. En d’autres mots, tout ce qui est physiquement possible serait rendu financièrement possible. Il n’y aurait plus à proprement parler de problèmes financiers, la seule limite serait la capacité de production du pays. Le gouvernement pourrait financer tous les développements et programmes sociaux que la population réclamerait et qui seraient physiquement réalisables.

L’éducation du peuple par Vers Demain

Question: Si tout ce que vous venez de dire est vrai, et qu’un système d’argent social, un argent créé par un organisme gouvernemental au nom de la société, soit si bénéfique, alors pourquoi le gouvernement fédéral ne l’applique-t-il pas immédiatement?

Réponse: Constitutionnellement, rien n’empêche le gouvernement de le faire immédiatement, il en a déjà le droit. C’est le gouvernement souverain qui doit être responsable de la politique monétaire du pays, et non pas des compagnies privées, dont l’objectif n’est pas du tout le bien commun, mais leur seul profit. Le 27 juillet 1961, Louis Rasminski, qui fut gouverneur de la Banque du Canada de 1961 à 1973, émettait le communiqué suivant, adressé au gouvernement:

«Si le gouvernement désapprouve la politique monétaire menée par la Banque (du Canada), il a le droit et la responsabilité d’ordonner à la Banque quelle politique elle doit suivre... et la Banque devrait avoir le devoir d’obéir à ces instructions.»

Les gouvernements, malgré leurs déclarations souvent stupides, sont parfaitement au courant de l’iniquité de la création de l’argent par des compagnies privées, mais ils n’osent pas faire face à cette puissance, par manque d’appui du peuple..

La seule chose qui manque, c’est l’éducation du peuple, pour lui démontrer la fausseté, l’absurdité et l’injustice du système financier actuel, et l’existence d’un correctif comme le Crédit Social. Seul Vers Demain dénonce le système actuel et apporte la solution créditiste. C’est donc Vers Demain que la population doit étudier. Pour cela, il faut abonner tout le monde à Vers Demain.

Alain Pilote

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