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La cause de la pauvreté

Alain Pilote Philbert Bagilimana le mardi, 01 août 2023. Dans Crédit Social

L'Institut Louis Even pour la Justice Sociale explique la cause de la pauvreté en face de l'abondance et la solution de la démocratie économique

Voici le texte de la présentation que M. Philbert Bagilimana a faite (préparée conjointement avec M. Alain Pilote) au colloque au Cameroun en juin 2023, au nom de l'Institut Louis Even :

Remerciements

Premièrement, nous tenons à remercier S. E. Mgr Samuel Kleda, Archevêque de Douala ; un merci spécial au Père Dr. Clément Aboudi qui est le représentant de l'Institut Louis Even dans la région d'ACERAC. En terminant les remerciements, je peux mentionner que S. E. Mgr Samuel Kleda est un grand ami de l'Institut Louis Even car il est venu trois fois au Canada pour suivre nos enseignements sur la démocratie économique. Nous avons aussi eu le privilège de recevoir au siège social au Canada plusieurs évêques membres d'ACERAC :

Mgr Joseph Atanga, S.J. Archevêque de Bertoua Président de la Conférence Épiscopale du Cameroun ;

Mgr Jean-Vincent Ondo Eyene Évêque d'Oyem Gabon ici présent ;

Mgr Basile Mve Engone Archevêque de Libreville, Gabon ;

Monseigneur Cyr-Nestor Yapaupa, évêque de la République Centrafricaine ;

Mgr Mathieu Madega du Gabon.

Nous avons aussi eu le grand privilège de recevoir le recteur de cette université de saint Jérôme, sa majesté Emmanuel Pohowe en 2012.

Qu'est-ce que l'Institut Louis Even

L'institut Louis Even pour la Justice Sociale a été fondé par M. Louis Even au Canada en 1935, dans le but de faire connaître la réforme économique de l'ingénieur écossais Clifford Hugh Douglas, connue sous le nom de démocratie économique, qui garantirait la sécurité économique à chaque individu. Le siège social se trouve à Rougemont, un village que certains parmi nous connaissent bien.

Cet Institut est aussi connu sous les noms de Pèlerins de saint Michel ou Bérets blancs, et publie cinq fois par année une revue appelée Vers Demain, puisqu'elle vise à obtenir un lendemain meilleur qu'aujourd'hui.

Le but de l'Institut est d'obtenir l'application de la démocratie économique par l'éducation du peuple, puisque la force des financiers vient de l'ignorance du peuple sur la création de l'argent sous forme de dette par les banques privées.  

Les causes de la pauvreté en face de l'abondance

Il y a sur terre assez de ressources pour nourrir plusieurs fois tous les habitants de la planète, mais c'est la distribution qui fait défaut, la plupart des gens manquant de pouvoir d'achat, de moyens monétaires pour se procurer le nécessaire pour vivre.

Qu'un humain vive en Afrique ou au Canada, il peut fournir la même quantité de travail manuel. La grande raison pour la différence de niveau de vie des pays occidentaux (Europe, Canada, États-Unis) et l'Afrique est que les Africains n'ont pas accès à l'héritage technologique des inventions, qui permet de produire davantage avec moins de labeur humain.

Et cet accès aux nouvelles technologies est bloqué pour des raisons financières. Donnez ces mêmes moyens aux Africains et ils étonneront le monde entier. À ce sujet, nous aimons répéter ces paroles que le pape Jean-Paul II, lors de sa deuxième visite en Afrique, adressait au Président du Nigéria, le 12 février 1982 :

« Toute l'Afrique, lorsqu'on la laissera gérer ses propres affaires sans qu'il y ait quelque pression ou intervention que ce soit de la part des puissances ou des groupes étrangers, non seulement étonnera le reste du monde par ses réalisations, mais sera capable de faire partager aux autres continents et nations sa propre sagesse, son sens de la vie, son respect de Dieu. »

Personne ne peut rester indifférent au problème de la pauvreté et de la faim dans le monde. Chaque jour sur la planète, plus de 40 000 enfants meurent de faim ou de maladies qui ne sont pas soignées, faute d'argent. À l'échelle du globe, plus d'un milliard sept cent millions d'êtres humains doivent fouiller dans les poubelles pour trouver quelque chose à manger et se maintenir en vie. Plus de 100 millions d'enfants dans le monde vivent dans les rues, sans foyer, abandonnés par leurs parents qui ne peuvent plus les faire vivre.

Selon le sociologue suisse Jean Ziegler, rapporteur spécial de l'ONU pour le droit à l'alimentation entre 2000 et 2008, 100 000 personnes meurent de faim tous les jours dans le monde, dont 37 000 enfants en bas de 10 ans, soit un enfant qui meurt de faim toutes les 5 secondes. Selon le World Food Report de la FAO (Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture) au début de 2008, l'agriculture mondiale pouvait alors nourrir 12 milliards de personnes (pour une population mondiale d'environ 6,3 milliards à la même époque. Puisqu'il y a assez de nourriture pour tous, mais que des milliers d'enfants meurent de faim malgré tout, Ziegler conclut que « les enfants qui meurent de faim sont assassinés. C'est le scandale de notre siècle. »

Plus de 5 000 décès enregistrés sur les routes migratoires européennes depuis 2021 ; la migration est causée par la pauvreté et la faim, et ici ce sont des morts qu'on est capable de comptabiliser, imaginez les gens qui perdent la vie dans les déplacements interrégionaux ou entre les pays voisins.

La personne humaine a besoin d'un minimum de biens matériels pour accomplir son court pèlerinage sur la terre, car si Dieu a créé l'homme et la femme avec une âme immortelle, il les a aussi créés avec des besoins matériels : se nourrir, se vêtir, se loger. Mais pour pouvoir se procurer nourriture, vêtements et logement, les êtres humains doivent avoir de l'argent pour les payer. Sinon, les produits pourriront sur les tablettes, et la personne sans le sou crèvera de faim.

En d'autres mots, l'argent est le droit de vivre pour l'individu : sans argent, c'est la mort à brève échéance. Ceux qui ont le pouvoir de créer l'argent — les banquiers — contrôlent donc littéralement nos vies, comme le mentionnait avec raison le Pape Pie XI dans son encyclique Quadragesimo Anno en 1931 :

« Ce pouvoir est surtout considérable chez ceux qui, détenteurs et maîtres absolus de l'argent, gouvernent le crédit et le dispensent selon leur bon plaisir. Par là, ils distribuent le sang à l'organisme économique, dont ils tiennent la vie entre leurs mains, si bien que sans leur consentement, nul ne peut plus respirer. »

 Quelques lignes plus loin, le Pape ajoutait que les « gouvernements sont tombés au rang d'esclaves » et sont « devenus les dociles instruments » des puissances de l'argent.

Le vice du système financier actuel, c'est que pratiquement tout l'argent qui est en circulation est émis sous forme de dette. L'émission du papier-monnaie est une fonction souveraine, de l'État, mais les banques commerciales, en prêtant à intérêt des crédits acceptés tout comme s'ils étaient du papier-monnaie, ont réussi à endetter tous les pays du monde.

En fait, le pays le plus riche en produits, les États-Unis d'Amérique, est aussi le pays le plus endetté. Et cet argent créé par les banques forme maintenant la grande majorité de l'argent dans les pays, le papier-monnaie émis par les banques centrales ne représentant qu'un faible pourcentage du total (moins de 5% au Canada et aux États-Unis).

Le problème, c'est que lorsque les prêts sont remboursés, les banques exigent le remboursement d'argent qui n'existe pas, d'où la nécessité d'effectuer de nouveaux emprunts, et de s'endetter davantage. Louis Even a écrit au tout début de son Institut une fable appelée « L'Île des naufragés », qui explique bien ce processus de création monétaire sous forme de dette :

D'un côté, se trouvent cinq naufragés sur une île, qui produisent les différentes choses nécessaires à la vie ; et de l'autre, un banquier qui leur prête de l'argent. Pour simplifier notre exemple, disons qu'il y a un seul emprunteur au nom de toute la communauté, que nous appellerons Paul.

Paul décide, au nom de la communauté, d'emprunter du banquier un montant suffisant pour faire marcher l'économie sur l'île, disons 100 $, à 6% d'intérêt. À la fin de l'année, Paul doit rembourser l'intérêt de 6% à la banque, soit 6 $. 100 $ moins 6 $ = 94 $, il reste donc 94 $ en circulation sur l'île.

Mais la dette de 100 $ demeure. Le prêt de 100 $ est donc renouvelé, et un autre 6 $ doit être payé à la fin de la deuxième année. 94 $ moins 6 $, il reste 88 $ en circulation. Si Paul continue ainsi à payer 6 $ d'intérêt à chaque année, au bout de 17 ans, il ne restera plus d'argent sur l'île. Mais la dette de 100 $ demeurera, et le banquier sera autorisé à saisir toutes les propriétés des habitants de l'île.

Alors, au lieu de payer l'intérêt de 6 dollars à chaque année, on décide d'emprunter aussi cet intérêt de 6% de la banque, pour maintenir le montant de 100 dollars en circulation (augmentant la dette à 106 dollars la première année, et 106 dollars plus 6 % d'intérêts la deuxième année, et ainsi de suite) ; cela ne fait que retarder le problème, car au bout de quelques années, même tout l'argent en circulation, qui demeure toujours à 100 dollars, ne suffit pas pour payer même seulement l'intérêt sur la dette. En aucun temps la dette ne peut être remboursée, pas même la première année.

La solution : la démocratie économique

Dans le système actuel, on semble n'avoir le choix qu'entre s'endetter davantage ou bien crever de faim. Ce contrôle de l'argent par des intérêts privés est la plus grande escroquerie de tous les temps, et a entraîné des conséquences désastreuses telles que les guerres, crises économiques, etc.

C'est pour cette raison que Louis Even décida de propager la doctrine de la démocratie économique, ou Crédit Social — un ensemble de principes et de propositions financières énoncés pour la première fois par l'ingénieur écossais Clifford Hugh Douglas, en 1918. Les mots « Crédit Social » signifient « argent social » — un argent émis par la société, en opposition à l'argent actuel qui est un « crédit bancaire » — un argent émis par les banques).

Nous préférons utiliser les mots « démocratie économique » pour décrire la solution de Douglas, pour éviter ainsi toute confusion avec le crédit social chinois, qui est lui un instrument de contrôle de la population. La démocratie économique ferait en sorte que l'organisme économique et social atteigne efficacement son but, qui est de satisfaire les besoins humains, de faire en sorte que les biens, produits et services, joignent les besoins, les êtres humains. Et ce qui permet aux humains d'avoir accès aux biens, c'est l'argent.

La démocratie économique enseigne que tous les hommes et toutes les femmes sont les cohéritiers, les copropriétaires des ressources naturelles et du progrès, des inventions des générations précédentes. C'est essentiellement ce que le pape Jean-Paul II écrivait en 1981 dans son Encyclique Laborem exercens sur le travail humain (n. 13) :

« L'homme, par son travail, hérite d'un double patrimoine : il hérite d'une part de ce qui est donné à tous les hommes, sous forme de ressources naturelles et, d'autre part, de ce que tous les autres ont déjà élaboré à partir de ces ressources, en réalisant un ensemble d'instruments de travail toujours plus parfaits. Tout en travaillant, l'homme hérite du travail d'autrui. »

C'est ce que Douglas appelle l'héritage culturel — les ressources naturelles et le progrès — qui sont les deux plus grands facteurs de production, bien plus importants que le labeur humain ou la finance.

Ce que la démocratie économique propose, c'est que l'argent soit créé sans dette, pour financer les besoins du pays. Ce qu'elle propose, c'est que tous soient réellement capitalistes — non pas dans le sens que les marxistes donnent au mot capitaliste, comme étant celui qui exploite le peuple, mais dans son sens premier, celui de propriétaires d'un capital, comme le mentionnait saint Jean XXIII dans son encyclique Mater et Magistra, aux paragraphes 114 et 115  :

« (Il faut) mettre en branle une politique économique qui encourage et facilite une plus ample accession à la propriété privée des biens durables : une maison, une terre, un outillage artisanal, l'équipement d'une ferme familiale, quelques actions d'entreprises  moyennes ou grandes. »

On peut dire en vérité que tous les habitants du pays sont actionnaires de ce pays, et copropriétaires de ses richesses naturelles, dons gratuits de Dieu, alors chaque citoyen aurait droit, en tant qu'actionnaire de ce pays, à un dividende, une partie des recettes de ce pays.  

Est-ce que quelqu'un ici peut m'expliquer pourquoi certaines personnes peuvent s'accaparer les richesses naturelles créés gratuitement par Dieu et laisser les autres mourir de faim (habiter proche d'un champ de cacao sans savoir le goût du chocolat), je connais les gens qui cultivent le café mais après l'avoir vendu comme matière première, ils sont incapables d'aller acheter le produit fini au magasin, la liste peut être longue…

Pour que cette démocratie économique devienne réalité, il faut une véritable démocratie politique, c'est-à-dire que les citoyens puissent obtenir des résultats de leurs représentants élus, pour que ceux-ci ne cèdent plus aux pressions des financiers, mais servent plutôt les intérêts du peuple. Cela s'obtiendra par l'éducation du peuple, pour former une opinion publique assez puissante pour que la population se fasse écouter par ses représentants élus.

Conclusion

Si certains pays comme le Canada ont les meilleures lois sociales comme la sécurité de vieillesse, allocations pour enfants, assurance chômage, etc., ce n'est pas tombé du ciel, c'est une société qui a misé sur l'éducation et a réussi à comprendre que la corruption et les injustices sociales ne font pas avancer une société.

En mon nom personnel et au nom de l'Institut Louis Even, je vous tends la main pour suivre les pas de Louis Even en approfondissant les enseignements de la doctrine de la démocratie économique, plus particulièrement je sollicite la collaboration d'ACERAC pour mettre en place un mécanisme dans la sous-région pour éduquer les jeunes et moins jeunes sur ce qu'est la justice Sociale. Merci.

Alain Pilote Philbert Bagilimana

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