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La sécurité économique pour chaque individu

Louis Even le lundi, 31 juillet 2006. Dans Crédit Social

« Les biens créés par Dieu l’ont été pour tous les hommes »

La multiplication des pains « Jésus ordonna à la foule de s’étendre à terre ; puis il prit les sept pains et les poissons, rendit grâces, les rompit et il les donnait à ses disciples, qui les donnaient à la foule. » (Mt 15, 35-36.)

 

Louis EvenLouis Even

Dans cet article, je vais vous parler de la sécurité économique. Sécurité, cela veut dire être à l’abri. La sécurité politique, par exemple, met à l’abri des incursions des pays étrangers, pour ce qui est de la nation. Elle met à l’abri des malfaiteurs et des voleurs, pour ce qui est des citoyens à l’intérieur d’un pays. Cela, c’est la sécurité politique.

Ne pas manquer du nécessaire

La sécurité économique : quand on parle d’économique, on parle de la satisfaction des besoins matériels. La sécurité économique signifie donc qu’on a l’esprit tranquille du côté du nécessaire à la vie, que l’on n’a pas à craindre de manquer du nécessaire.

L’absence de souci matériel ne veut pas dire, évidemment, qu’il ne faut pas s’occuper des choses matérielles, qu’il ne faut pas s’occuper de produire ce qui est nécessaire. Non, mais cela veut dire que, une fois qu’on a fait ce qui est normalement possible, ce qu’on est capable de faire avec les moyens de production dont on dispose, on devrait être au moins assuré d’avoir le nécessaire, surtout quand le nécessaire ne manque pas, et qu’il est loin de manquer.

Or, le nécessaire ne manque pas : ni dans le pays, ni, si on regarde le monde entier, à la grandeur de l’univers. Il peut y avoir des pays qui sont en détresse, mais il y en a d’autres qui sont en surabondance.

Et on ne devrait pas avoir à s’inquiéter. Pourquoi donc ne pouvons-nous pas suivre l’avis qui nous a été donné par Notre-Seigneur : « Ne vous inquiétez donc pas de ce que vous mangerez, de quoi vous vous vêtirez… Regardez donc les oiseaux du ciel : ils ne travaillent pas, ils ne sèment ni ne moissonnent ; et cependant, votre Père céleste les nourrit. La même chose pour les lis des champs : ils ne tissent pas, et pourtant, ils dépassent en splendeur les plus beaux habits de Salomon dans toute sa gloire… Votre Père céleste sait ce dont vous avez besoin. » (Matthieu 6, 25-32)

Justement. Notre Père céleste, qui est notre Créateur, a placé sur la terre tout ce qu'il faut pour satisfaire les besoins de toute l’humanité. Non pas qu’Il ait mis toutes les choses toutes faites dans un endroit en particulier ; mais si l’on regarde la surface du globe, Il en a mis assez sur terre, sous terre, sous le sol, dans la mer, dans les forêts, partout, pour satisfaire tous les besoins normaux de l’humanité à travers tous les siècles.

Cela, on le sait ; personne ne peut le nier. Mais pour qui le bon Dieu a-t-il fait toutes ces choses-là ? Puisqu’Il est le Père de tous les hommes, Il les a fait pour tous les hommes.

Les biens de la terre ont été créés pour tous les hommes : c’est une chose qu’on a besoin de rappeler à ceux qui l’oublient, aux gouvernements, aux particuliers, aux associations, à tous les groupes, à tous les individus. Le Pape Pie XII nous l’a rappelé lui-même dans son radio-message de la Pentecôte 1941 : « Les biens créés par Dieu l’ont été pour tous les hommes et doivent être à la disposition de tous. »

C’est clair : « pour tous les hommes ». L’homme est une personne, mais c’est une personne sociable, une personne qui vit en société ; il faut donc qu’il trouve l’épanouissement de sa personne dans la société. Le social ne doit pas l’étouffer, mais l’enrichir. Et à son tour, quand la personne s’épanouit, elle enrichit la société.

Il y a un reversement des biens de la personne sur la société, et de la société sur la personne, lorsqu’il n’y a pas d’entraves, lorsqu’il n’y a pas d’empêchements. Et pourtant, que remarque-t-on aujourd’hui ? Même à l’intérieur de pays d’abondance comme le Canada, les États, les pays d’Europe occidentale et d’autres, on remarque qu’il y a en effet abondance, mais qu’il y a des cas de misère, des cas de familles qui n’ont non seulement pas l’abondance, non seulement pas d’aisance, mais qui manquent du nécessaire, et qui sont obligées de mendier ou bien de solliciter de l’aide des gouvernements, et encore on ne leur accorde cette aide qu’au compte-gouttes.

On voit que les hommes excellent à produire aujourd’hui. Ils excellent à produire la production : on a ce que l’on veut en fait de production — je ne dis pas qu’on l’a dans les maisons — mais on a sur le marché ce que l’on veut. Si l’on commande un cercueil, on a un cercueil ; si l’on commande une automobile, on a une automobile ; si l’on commande du pain, on a du pain — pourvu qu’on ait le moyen efficace de commander dans le monde actuel, qui s’appelle l’argent. Mais là, il y a un obstacle, et nous allons en parler plus loin.

Si les hommes excellent à produire, ils échouent pitoyablement pour distribuer. Et pourquoi échouent-ils pour distribuer ? Parce qu’ils se sont eux-mêmes imposés des règlements, des règlements pour la distribution des biens. Et ces règlements sont régis par la finance. Ce sont des règlements financiers.

Impossible d’obtenir des biens qu’on n’a pas produit soi-même, à moins de les payer. Et la même chose pour les autres. Et si l’on est incapable de produire parce qu’on ne possède pas de moyens de production — aujourd'hui il y a bien du monde qui ne possèdent pas de moyens de production : même ceux qui sont employés aujourd’hui dans la production, ils ne savent pas combien de temps durera leur emploi ; ils sont tous sur la branche. Leur emploi ne dépend pas d’eux, il ne dépend pas de leur volonté, il dépend de circonstances indépendantes de leur volonté. Et pas des circonstances naturelles, mais des circonstances artificielles, créées par la finance.

Je ne m’étendrai pas sur ce sujet tout de suite, parce que c’est bien connu. On est capable de faire des choses, mais quand on ne les produit pas, c’est parce que la finance n’est pas là pour financer la production. Et quand elles sont faites, si on ne les obtient pas dans les maisons, c’est parce que la finance n’est pas dans les maisons pour se les procurer.

Le but de la production

On dirait que la production existe pour être vendue, pour être achetée ; ce n’est pas le but de la production. La production est faite pour satisfaire les besoins humains, ou bien elle n’a pas de raison d’être. S’il existe un système de ventes et d’achats qu’on a établi, ça peut être une bonne chose, je ne critique pas l’établissement de cela, ça permet aux individus qui ont de l’argent de choisir dans la production ce qui leur convient. Et quand ils choisissent ce qui leur convient, le système de production reproduit les choses qu’ils ont achetées, de sorte que la production peut servir les consommateurs lorsque les consommateurs ont le moyen d’exprimer financièrement la production qu’ils veulent avoir pour satisfaire leurs besoins personnels. Et ils connaissent leurs besoins mieux que les autres.

C’est donc un bon système en soi que le système d’argent, le système de ventes et d’achats, à la condition que ce système-là permette aux produits d’atteindre tous les hommes, pour atteindre le but de la production, pour atteindre le but du Créateur dans la création : « Les biens créés par Dieu l’ont été pour tous les hommes. » Quelle que soit la méthode que l’on emploie, il faut qu’elle accomplisse ce résultat-là. Si elle ne l’accomplit pas, c’est qu’elle est mauvaise ou viciée. Et dans ce temps-là, il faut ou la changer, ou la corriger. Il n’y a pas à sortir de cela.

On dira que c’est le règlement financier, et qu’on ne peut rien y faire. La finance n’est pas l’essence, le but de la production. L’essence de l’économique, c’est de produire des biens, et de les conduire aux besoins ; pas d’autre chose que cela. Veut-on un exemple qui nous donne bien une idée de la notion essentielle de l’économique — et non pas tout le jargon qu’on a aujourd’hui : crise financière, crise économique, conjoncture économique — tout ce jargon, tout ce baragouin-là, ça ne donne rien.

La multiplication des pains.

Veut-on un exemple, eh bien, nous allons le chercher dans l’Évangile. Certaines personnes vont sursauter en nous disant : « Eh bien quoi, vous voulez chercher des choses matérielles dans l’Évangile ! » Écoutez, l’exemple que je vais donner, je ne veux pas dire qu’il y a seulement cette leçon-là à en sortir ; mais l’on peut l’en sortir. Quel est cet exemple-là ? C’est la multiplication des pains. Tout le monde connaît la chose : il y a deux circonstances racontées dans l’Évangile dans lesquelles Notre-Seigneur a fait nourrir une multitude de personnes avec peu de choses. Par exemple, l’Évangile selon saint Matthieu (MT 15, 32-39), qui rapporte la circonstance où il y avait environ 4000 hommes, sans compter les femmes et les enfants. Ces personnes-là avaient suivi Notre-Seigneur toute la journée, et une partie de la journée précédente, elles n’avaient pas mangé depuis longtemps. Venait le soir, et les Apôtres voulaient renvoyer les gens chez eux, mais Jésus ne voulait pas qu’ils les renvoient à jeun car, disait-Il, ils vont défaillir en chemin. Il me semble que c’était un aspect bien matériel que Notre-Seigneur exprimait là.

Eh bien, qu’a fait Notre-Seigneur ? Il a demandé à Ses Apôtres de leur donner à manger.

— « On n’en est pas capable, il n’y en a pas assez ! »

— « Comment, vous n’avez pas de nourriture ici ? »

— « Non, et puis les magasins sont bien trop loin. »

— « Qu’est-ce que vous avez ici ? »

— « Oh, il y a un petit garçon qui a sept pains, et un autre qui a quelques poissons. »

Notre-Seigneur répondit : « Apportez-moi cela. » On les Lui a apportés, Il les a bénis, et Il a dit aux Apôtres : « Distribuez. » Ça, c’est le fait.

Et quand les Apôtres eurent fini de distribuer, et que le monde eut fini de manger autant qu’ils avaient faim, on a encore ramassé sept corbeilles de morceaux de pain qui restaient, ce qui veut dire qu’il restait plus de pain après qu’il y en avait au commencement.

On va dire que c’est un miracle. Oui, il y a eu un miracle de production. Ce miracle a été fait par Notre-Seigneur.

Et puis après, il y a eu la distribution ! Et puis le pain n’a pas été vendu ! Et le pain n’a pas été acheté ! Mais quand même, le pain a atteint ceux qui avaient faim. Et Notre-Seigneur a dit aux Apôtres : « Distribuez. » Ce n’est pas difficile de distribuer quand la production est faite. Les Apôtres ont fait la chose facile.

Aujourd’hui, il n’y a pas besoin de miracles pour multiplier le pain : la production moderne s’en charge, avec tout le progrès qui a été fait depuis des siècles. La production abonde : c’est la chose difficile à faire qui est réalisée. La chose facile à faire, distribuer, on n’en vient pas à bout.

L’humain passe avant la finance

Pourquoi ? Encore une fois, à cause du système financier qu’on s’est imposé. Eh bien, l’humain passe avant la finance, la personne passe avant l’argent, et les gouvernements, les peuples, doivent établir un ordre qui permet à la production d’atteindre les besoins. C’est ce que le Pape Pie XII répétait encore, dans le même radio-message cité précédemment :

« Tout homme, en tant qu’être doué de raison, tient en fait de la nature le droit fondamental d’user des biens matériels de la terre, quoiqu’il soit laissé à la volonté humaine et aux formes juridiques des peuples de régler plus en détail la réalisation pratique de ce droit. »

« Tient de la nature » : en d’autres mots, à cause de sa naissance, pas parce qu’il est employé, pas parce qu’il est fin, pas parce qu’il est grand, pas parce qu’il est riche. « Tout homme, en tant qu’être doué de raison, tient de la nature le droit fondamental d’user des biens matériels de la terre. » Il tient cela de sa nature. Ce n’est donc pas un droit qui va lui être accordé par le gouvernement, accordé par le système financier — il a déjà ce droit-là.

Et pour accorder ce droit-là, le Pape nous rappelle que cela est laissé à la libre volonté des peuples d’établir les méthodes pour cela. Il appelle cela « établir les formes juridiques » ; c’est-à-dire, établir un ordre juridique, un ordre social, politique, qui va permettre à la production d’atteindre tous les besoins.

Est-ce qu’on a ça aujourd’hui ? Hélas, non, on ne l’a pas. Pourquoi ? Les peuples n’ont-ils pas la liberté de l’établir ? Oui, mais ils ne l’établissent pas. Il y a certaines personnes qui ont le suffisant, et encore, ce n’est pas sûr qu’elles l’auront toujours.

Le Pape Pie XII nous rappelle que l’économie nationale doit accorder à tous, « sans interruption les conditions matérielles dans lesquelles pourra se développer pleinement la vie individuelle des citoyens ».

Il est donc question de la sécurité économique personnelle. Certains vont dire : « Oui, mais est-ce que le gouvernement ne reconnaît pas cela avec ses lois de sécurité sociale ? » Oui, et nous nous réjouissons qu’il existe déjà des lois de sécurité sociale, comme les allocations familiales, pensions de vieillesse, et plus récemment, la loi de l’assurance-chômage, pour combler des trous qui existaient encore dans la législation sociale. Mais, tout cela est accordé au compte-gouttes, et basé sur la capacité de taxer du pays, au lieu d’être basé sur la capacité de produire du pays. Et il y a dans ces lois l’aspect mendiant, l’aspect de mendicité de la part des requérants, et l’aspect enquêteur de la part des bureaux du gouvernement.

Ces aspects négatifs devraient disparaître, pour en arriver progressivement à un autre système ; lequel ? Eh bien, celui que présentent les propositions du Crédit Social, qui seront expliquées dans d’autres articles, car celui-ci est déjà assez long. La sécurité économique fait certainement partie de l’organisation d’un monde meilleur, meilleur pour tous.

Louis Even

Commentaires (1)

  • Eduarda

    Eduarda

    27 mars 2021 à 03:50 |
    Je suis contente que vous existez toujours, depuis que je suis jeune je connaissais votre journal. Félicitation pour tout ce que vous écrivez. C'est avec Dieu, Marie, Joseph devant le monde entier. Que Dieu fasse en sorte que votre bon travail se poursuive.

    Répondre

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