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Gilberte Côté-Mercier

le mardi, 06 août 2013.

Une vie d'idéal, de charité, d'apostolat

Madame Gilberte Côté-Mercier nous disait : « Si vous devenez quelqu’un dans la vie, cela est dû à vos parents. » Et elle avait beaucoup de vénération pour son père et sa mère.

Les bons parents

Joséphine Gariépy et Rosario CôtéJoséphine Gariépy et Rosario Côté

Gilberte Côté-Mercier est née de parents très catholiques, justes et vertueux. Son père, Rosario Côté a connu sa future épouse, Joséphine Gariépy, 4 ans avant de l’épouser. C’était une jeune fille très pure qui fut instruite des obligations du mariage seulement aux fiançailles. Elle a conservé cette candeur toute sa vie. Dans les années ‘50, elle disait à sa fille Gilberte, en voyant les dames si mal vêtues, passer sur la rue : « Ces mauvaises modes nous conduiront à de grands malheurs. » Quand nous voyons les familles détruites, les divorces, les suicides, etc., on ne peut qu’admettre que cette prédiction de la sainte maman de Gilberte Côté s’est malheureusement réalisée.

Si, comme madame Côté, nos dames avaient préservé leur pudeur et leur pureté par des vêtements décents, ces grands malheurs auraient été évités.

C’est sans doute pour préserver leur vertu à tous les deux, que Rosario Côté s’est abstenu de fréquenter sa future épouse pendant les quatre années précédant le mariage : « Je reviendrai seulement quand je serai prêt à vous épouser, » lui avait-il dit. Et il est revenu. Comme l’oiseau prépare son nid pour recevoir ses petits, ainsi M. Côté voulait offrir à son épouse un foyer bien établi.

Il est devenu manufacturier de chaussures.

Rosario Côté, 26 ans, et Joséphine Gariépy, 25 ans, s’épousèrent le 26 juin 1907, à l’église de l’Immaculée Conception, à Montréal.

Le sacrifice du premier enfant

Le bon Dieu leur donna un premier fils, qu’ils firent baptiser sous le nom de Jean-Baptiste. A la naissance, l’enfant était en bonne santé, mais après quelques temps, il commença à perdre du poids et à s’affaiblir. Le médecin n’y comprenait rien.

Madame Côté, grande dévote à saint Joseph, se rendit à l’Oratoire St-Joseph avec son fils pour consulter le bon Frère André (béatifié par Jean Paul II), thaumaturge, qui guérissait miraculeusement des malades. Mais le Frère André ne guérit pas Jean-Baptiste, il demanda plutôt à Mme Côté d’offrir à Dieu son fils, premier né. C’était un bien gros sacrifice pour la jeune maman, mais elle l’accepta. La semaine suivante, le petit ange s’envolait au Ciel.

Etait-ce un sacrifice demandé par Dieu à la mère pour accorder à la fille, une mission bien spéciale ? Rien n’est coïncidence dans les plans divins. Et le nom de Jean-Baptiste est frappant quand on sait que les funérailles de madame Côté-Mercier eurent lieu le jour de la fête de saint Jean-Baptiste.

Madame Rosario Côté (Joséphine Gariépy) était handicapée d’un genou. Un jour, elle était allée se confesser au bon Père Frédéric (béatifié par Jean-Paul II), du Cap de la Madeleine. Elle s’est plainte de son handicap qui l’empêchait d’aller à la Messe le matin. Le saint l’encouragea de continuer à assister à la Messe et il guérit le genou.

Naissance, baptême, enfance

Gilberte à 9 moisGilberte à 9 mois

Marie Joséphine Gilberte naquit le 25 mai 1910, anniversaire de naissance de saint Padre Pio, (canonisé le 16 juin 2002). Et elle est montée au Ciel (c’est notre espérance) dans l’octave de la canonisation du saint Padre. Elle avait le caractère rude du Padre Pio quand il s’agissait de flageller le mal, de condamner les injustices et l’immodestie.

Née dans le mois de Marie elle fut baptisée dans l’église de l’Immaculée Conception, à Montréal. Marie Immaculée fut sa patronne et protectrice depuis sa naissance. En 1970, lorsque les premières Pèlerines de saint Michel se consacrèrent à Marie, selon la spiritualité de saint Louis Marie de Montfort, Gilberte Côté fut gratifiée du nom de « Gilberte de l’Immaculée », puisque les consacrés à Marie prennent le nom du patron de l’église où ils furent baptisés.

En 1910, lors du baptême de Gilberte Côté, Louis Even était professeur d’école dans cette même paroisse de l’Immaculée Conception. Dieu préparait l’avenir.

Gilberte à 6 ansGilberte à 6 ans

Gilberte eut un second frère, Rosaire. Il fut un grand collaborateur de l’Œuvre, tout au long de sa vie. Rosaire a quitté cette terre en 1963, âgé de 51 ans. Il avait un fils, Michel, né en 1939, année de la fondation du journal Vers Demain. Tante Gilberte était la marraine de Michel, ce dernier avait une grande vénération pour elle. Lui aussi fut et est toujours un grand soutien de l’Œuvre de Vers Demain.

Dès l’âge de quatre ans, Gilberte recevait des cours de piano d’une amie de la famille. L’enfant avait beaucoup de talent pour la musique.

Déjà, à six ans, elle mettait des petits cailloux dans ses souliers en esprit de sacrifices afin d’aider Notre-Seigneur à sauver des âmes.

Etudes

A sa première communionA sa première communion

Son éducation reçue au foyer a été enrichie à l'école primaire, de la première à la septième année, sous le personnel enseignant des filles de la bienheureuse Marie-Rose Durocher, les sœurs de Jésus-Marie, dans la paroisse St-Stanislas de Koska.

Puis par les filles de sainte Marguerite Bourgeois, de la Congrégation de Notre-Dame, d'abord au Mont Ste-Marie, de la 8e à la 10e année.

Ensuite, au Collège Marguerite Bourgeois, fondé par Mère Ste-Anne-Marie pour qui Gilberte Côté avait beaucoup d’admiration. Ce collège fondé en 1908 ouvrait la voie des hautes études aux jeunes filles. Ces dernières suivaient leurs cours universitaires au Collège Marguerite Bourgeois et l’Université de Montréal décernait les diplômes.

Bachelière-es-art, diplômée en philosophie et en lettres, elle suivit pendant 6 ans les cours en sciences sociales et politiques à l’université de Montréal. Dans le temps, c’était beaucoup d’étude pour une jeune fille. Avant 1908, les demoiselles ne fréquentaient pas l’université, on ne voulait pas les détourner de leur rôle principal d’épouse et de mère. Pour les éducatrices et les infirmières, la formation se donnait à l’école normale et à l’hôpital, sous la direction des religieuses.

Gilberte était très brillante, une première de classe, nous ont affirmé ses compagnes. Nous-mêmes, qui avons vécu avec elle, nous avons pu constater la supériorité de son intelligence, de ses talents et de ses vertus.

Lorsqu’elle eut terminé ses études au Mont Ste-Marie, sa maîtresse lui avait demandé : « Allez-vous avoir le courage d’abandonner vos études, Gilberte ? »

Cette dernière répéta les paroles de la bonne religieuse à son père. Sans dire un mot de plus, M. Côté est allé au collège Marguerite Bourgeois, payer un an d’avance les études de sa fille. Peu de pères de famille pouvaient en faire autant dans le temps.

Gilberte Côté-Mercier jeune filleLa jeune fille

Dans le compte-rendu annuel des activités du Collège Marguerite Bourgeois nous lisons ce qui suit de Gilberte Côté :

« Gilberte Côté, présidente du cercle d’étude Notre-Dame : Harmonie ! Voilà la règle de toutes ses actions, cette discipline l’a conduite à cultiver les sciences, les arts et les lettres. Dans les sciences, elle a connu les succès aux examens universitaires. Par là, elle a brillamment représenté le Collège... Souvent, après une étude sérieuse, vous retrouviez Gilberte au piano... Elle “prouvait” — contre le préjugé — que l’exactitude scientifique et la sensibilité artistique peuvent s’harmoniser et s’enrichir l’un l’autre... »

En rhétorique, Gilberte Côté a été décorée de la médaille offerte par le Ministère des Affaires étrangères de France.

Elle détenait aussi une licence en musique de l’Ecole de Musique de Chicago du Dr Robert Schmitz. Elle en aurait fait sa carrière, si elle n’avait pas craint de se perdre au milieu des vedettes du monde.

Son bon père lui avait offert un piano à queue de haute qualité. Un excellent piano signé par une grande artiste. Pour elle c’était un trésor. Mais elle en fit le sacrifice et le laissa silencieux, pendant de longues années, afin de pouvoir consacrer tout son temps à l’œuvre. A Noël et au jour de l’An seulement elle nous faisait le plaisir de nous jouer quelques morceaux. Même à Noël 2001, elle nous a encore causé ce petit plaisir.

Débat oratoire

Gilberte Côté, et sa compagne d’étude, Eliane Lefebvre, ont été invitées à être les concurrentes des garçons, dans un débat oratoire à l’université de Montréal. Gérard Fillion, qui devint plus tard, directeur du journal « Le Devoir », était l’un des participants au débat.

Les demoiselles s’étaient bien préparées, elles avaient demandé les conseils d’un avocat, et elles ont remporté la palme haut la main, au grand déplaisir des garçons qui, dans le temps considéraient que c’était une grave humiliation de se faire dépasser par des filles. Il y avait à peine quelques années qu’on acceptait les filles à l’université.

Gilberte Côté-Mercier universitaireL'universitaire

M. Rosario Côté assistait à ce débat oratoire. Il était fier de sa fille, mais il ne la complimenta pas pour ne pas éveiller chez elle des sentiments d’orgueil. Il se contenta de lui dire : « Il a fallu beaucoup de travail pour arriver à ce succès. » Gilberte appréciait hautement la prudence de son père qui veillait à lui donner une excellente formation.

Alors qu’elle était âgée de 20 ans, son père lui a offert un voyage en Europe. Elle refusa et lui demanda de lui faire plutôt le cadeau de la « Somme théologique de saint Thomas d’Aquin ». Ce qui nous laisse voir la hauteur de ses vues.

Une phrase du docteur angélique a orienté sa vie : « La perfection de la sagesse n’est pas dans la ligne de l’intelligence, mais dans la ligne de l’amour. » Sa réflexion fut celle-ci : « Je m’en vais en enfer avec mon bagage intellectuel, si je ne l’utilise pas pour servir les autres. »

Lors d’une réunion à son Alma Mater, elle avait répété cette phrase de saint Thomas à ses compagnes qui se demandaient si les degrés du Ciel étaient plus élevés pour les personnes cultivées que pour les autres. L’intervention de Gilberte Côté avait coupé net leur verbiage, mais les sœurs préposées à la cuisine applaudissaient.

La fête des pauvres

En plus de l’exemple des charités de sa douce mère, Gilberte apprit à aimer les pauvres au Collège Marguerite Bourgeois. On organisait, chaque année, la fête des pauvres. Pendant le temps des loisirs, ces demoiselles cousaient, tricotaient et confectionnaient des vêtements pour les enfants les plus démunis. Et à l’approche de Noël, c’était la fête. Une cinquantaine d’enfants pauvres étaient reçus au Collège, tous les ans, comme les amis de Jésus. Un Enfant-Jésus vivant accompagné de saints, entouré d’anges, offrait les cadeaux. Quelle plaisir pour les élèves de voir ces visages maigres et pâles, devenir roses de contentement et gonflés de joie en voyant toutes ces belles choses qui leur appartenaient maintenant. Mais ces joies ne duraient qu’une seule journée, se disait Mlle Gilberte. Le lendemain, les pauvres étaient revenus à leur taudis et à leur misère. Tout cela s’imprégnait dans le cœur de notre héroïne.

La crise économique

Comme nous l’avons vu, M. Rosario Côté était manufacturier de chaussures. On était en 1930, début de la crise économique. Il disait à son épouse : « Je fais à peine un sou par paire de chaussures. Il faudrait congédier des employés, mais je ne puis le faire, ils ont besoin comme moi d’assurer le pain quotidien à leur famille. »

Comme tous les hommes d’affaires, M. Côté s’est fait approcher par les banquiers. Il disait à son épouse : « Je ne comprends pas ce que nous veulent les banquiers, il y a quelque chose de louche là-dedans ». Ce qui faisait dire à Gilberte Côté, plus tard : « Si mon père avait vécu, il aurait compris le Crédit Social et il nous aurait aidés, il soupçonnait déjà qu’il y avait quelque chose de louche dans le système bancaire. »

Mort d’un père bien-aimé

Soudain, ce fut le deuil. Son bon père, sur qui elle pouvait s’appuyer, mourait subitement, le 25 novembre 1932. Elle avait 22 ans.

Maman Joséphine était inconsolable.

Gilberte a dû s’occuper des funérailles. « C’est à ce moment, dit-elle, que j’ai compris ce que c’était que d’avoir un père qui prend toutes les responsabilités et sur qui on peut s’appuyer. »

Deux ans plus tard, le frère de M. Côté, associé dans la manufacture de chaussures, avait emprunté de la banque et il s’est vu dans l’obligation de déclarer faillite.

Fort heureusement, la part de madame Côté avait été préservée. Elle utilisa son avoir en faisant l’acquisition de maisons à loyers. Mlle Gilberte allait collecter le montant des loyers, chaque mois. On était en plein temps de la crise économique. Elle devait retourner trois ou quatre fois pour soutirer un petit 5 dollars des familles locataires. Elle sortait de là le cœur broyé, elle se disait : « Je leur ai arraché le pain de la bouche ». « Le 5 dollars me brûlait les mains, » avouait-elle. Mais, si elle n’avait pas agi ainsi, elle aurait perdu ses maisons et les pauvres n’auraient plus eu de toit où s’abriter. Quel affreux dilemme !

Elle rencontra le révérend Père Dugré, Jésuite, qui essayait de venir en aide aux nombreux chômeurs. Il les envoyait en Abitibi œuvrer dans le domaine de la colonisation. Ayant à cœur le salut des pauvres, Gilberte Côté offrit au Père Dugré de l’aider. Sa mission dans cette œuvre consistait à réunir des fonds pour pouvoir envoyer les femmes des colons rejoindre leur mari en Abitibi. Mais, par la suite, ces dames lui écrivaient : « Notre situation est pire en Abitibi qu’à Montréal. A Montréal, nous étions dans la misère, mais ici, nous crevons de faim. »

Mlle Côté alla montrer ces lettres au Père Dugré, et elle cessa ses activités dans cette œuvre.

Mais comment venir aux secours des pauvres de plus en plus nombreux ? Il n’y avait pas de pensions de vieillesse, pas d’allocations familiales, pas de Bien-Être Social, pas d’assurance-chômage, etc. Pour ceux qui ne possédaient pas de fermes, c’était la misère noire.

Enfin, la lumière

La lumière se fit éclatante dans son esprit lorsqu’un soir, elle assistait à une assemblée des propriétaires, de Montréal, ou chacun se lamentait de ne pas pouvoir se faire payer ses loyers. Une dame Louart tenait des propos très intéressants au milieu des autres. Gilberte Côté alla s’asseoir près d’elle. Mme Louart l’invita chez elle le soir même et elle lui expliqua le Crédit Social. Gilberte Côté est revenue à la maison, après la veillée, en courant, tellement elle était enthousiaste. Enfin, elle venait de découvrir ce qu’elle cherchait : la solution au problème de la pauvreté. Elle comprit que ce n’était qu’un problème artificiel. Le système de production fournissait de la nourriture en abondance, au Canada, comme dans tous les autres pays, les magasins et entrepôts débordaient de produits, même dans les années les plus rudes de la crise. Mais tous ces malheurs étaient dus au système arriéré de distribution : le système d’argent-dette des banquiers. Ces derniers se sont emparés du système d’argent. Ils créent l’argent de chaque pays et ils le prêtent aux gouvernements et aux particuliers à intérêt. Ils endettent tout le monde. Lorsqu’ils décident de se faire rembourser leurs prêts et de ne plus en faire, ils retirent l’argent de la circulation, provoquant par le fait même la crise économique et suivent les faillites et le chômage. La plus terrible escroquerie de tous les temps. Le peuple crève de faim devant la surabondance de produits qu’il a fabriqués lui-même. Quoi de plus illogique ! quoi de plus barbare ! Quoi de plus inhumain !

Mlle Côté se renseigna un peu plus dans le livre anglais : Money what is it ? En décembre 1936, elle fut invitée à donner une conférence au cercle « Inter-Nos ». Son sujet a été évidemment le Crédit Social. Sa conférence fut hautement appréciée et comprise. Les journaux en donnèrent un bon compte-rendu.

Des créditistes, disciples de Louis Even, ayant lu ce rapport dans les journaux, ont bien vu qu’il s’agissait de Crédit Social. Ils ont invité Gilberte Côté à une assemblée de Louis Even, à la salle de la Nativité d’Hochelaga, à Montréal, en février 1937.

Elle s’y rendit, accompagnée de sa mère, madame Rosario Côté, et de son frère, Rosaire.

Ils furent ravis d’entendre Louis Even, vrai professeur, exposer d’une manière si logique et si claire la solution à la crise économique qui sévissait alors dans le monde depuis huit longues années et qui causait tant de misère chez les peuples. Tous les trois, se firent, chacun à leur manière, les grands collaborateurs de Louis Even.

Gilberte Côté s’est dit, ce soir-là, et elle nous l’a répété plusieurs fois dans sa vie : « Je suis allée à l’université pour m’éclairer l’esprit à la lumière de grands hommes et chercher des solutions aux problèmes de l’heure, et je n’en ai point trouvé. En entendant Louis Even, je me suis exclamé : Voilà un Maître » ! Quelques jours avant de partir pour l’hôpital, elle m’a confié que les années qu’elle a le moins aimées de sa vie, ce sont ses années d’université.

Justement, dans ces années, les influences marxistes commençaient à s’infiltrer parmi les professeurs et étudiants à l’université. Cet esprit révolutionnaire a fait son chemin parmi les grands. Ils ont poussé la révolution tranquille qui a détruit, en peu d’années, toutes les valeurs qui avaient fait la force de notre peuple canadien-français. Notre société est si affaiblie par la corruption et les mensonges du marxisme athée, qu’elle menace de disparaître. Gilberte Côté ne s’est pas laissée emporter par le vent des marxistes. Au contraire, elle l’a combattu avec toute la force de sa foi catholique. Elle voyait clair.

A 26 ans, jeune, remplie de talents, cultivée et à l’aise financièrement, Gilberte Côté quitta le monde de la musique et de la science pour suivre désormais la voie évangélique du don de soi pour l’amour des pauvres.

Premières activités

Madame Rosario Côté invita Louis Even à venir donner une conférence sur le Crédit Social dans son grand salon du Boulevard St-Joseph. Les deux premières assemblées eurent lieu en mars 1937 à 15 jours d’intervalle. Les grands amis de la famille ont été invités, des prêtres, des Pères de différentes communautés, qui recevaient les charités de madame Côté, des avocats, médecins, et gens d’autres professions. 75 personnes chaque fois et pas les mêmes.

Louis Even commençait ses réunions par la récitation du chapelet. Il expliqua si clairement le Crédit Social, que tous le comprirent parfaitement.

A compter de cette date, Louis Even obtint la parfaite et totale collaboration de la famille Côté.

Il y avait bien avant, autour de Louis Even, la Ligue du Crédit Social, qui ne consistait qu’à la tenue d’assemblées de verbiage pour élire un président, un vice-président, tout en éclipsant l’apôtre Louis Even du centre des décisions. Dévouement, prière, apostolat, efforts personnels, méthodes de Louis Even, ne leur convenaient pas. Avec sa logique et sa perspicacité, Gilberte Côté décela le stratagème.

Juliette Lavigne et Gilberte Côté-MercierJuliette Lavigne, 1ère compagne de Gilberte Côté. En arrière-plan, la mère, Mme Rosario Côté. Congrès de Drummondville, 1965

Louis Even se retira de la Ligue, et vola de ses propres ailes, aidé de la famille Côté, de Juliette Lavigne, cousine de Gilberte et de bien d’autres apôtres prêts aux sacrifices.

En janvier 1938, Louis Even, chargé d’une femme et de quatre enfants, se fiant totalement sur la Providence, et sur la charité de madame Côté, quitta son emploi de contremaître à l’imprimerie Garden City Press, de Ste-Anne de Bellevue. Il parcourait le pays mendiant ses repas et couchers dans les familles. Cependant, jamais lui-même et sa famille n’ont manqué du nécessaire.

Étant assez à l’aise dans le temps, madame Côté louait une maison pour l’été dans le comté Labelle. C’est donc à cet endroit que commença le grand apostolat de la famille Côté, avec Louis Even, en faveur du Crédit Social, sans autre but que de libérer les pauvres de leur misère.

Le jour, Gilberte Côté, accompagnée de Juliette Lavigne, cherchait les endroits pour tenir des assemblées, elle les annonçait sur des circulaires et les distribuait de porte en porte. Elle- même donnait des conférences, les gens en étaient conquis et émerveillés.

Mais les politiciens, eux, étaient aux abois. Ils mettaient tous leurs efforts à détruire, à mesure, ce qu’elle construisait avec tant de dévouement.

Un ecclésiastique est même allé voir madame Côté, la mère, pour lui dire de ramasser sa fille. Quel scandale, une fille qui donne des conférences ! Madame Côté pleurait. Mais providentiellement, après cette visite, le même jour, sans savoir ce qui s’était passé, un homme est venu chez madame Côté pour lui dire combien sa fille éclairait les foules sur la cause de la pauvreté par ses brillantes conférences, et qu’elle rallumait en eux l’espoir d’un avenir meilleur. Madame Côté avait répondu à son visiteur : « Vous êtes l’envoyé du Ciel. » et à partir de ce moment, elle ne se laissait plus impressionner par les calomnies prononcées contre sa valeureuse fille.

Les conférenciers ont été bien reçus à Ferme Neuve, à Mont St-Michel, et à bien d’autres endroits, les salles étaient remplies. Ils étaient compris, et des apôtres levaient à leur suite.

Mais à Mont Laurier, centre de la politicaillerie, ce fut autre chose. Mlle Côté organisait une assemblée pour la soirée, dans cette petite ville. Elle avait retenu une salle. Elle avait fait des circulaires pour l’annoncer et elles les avaient distribuées de porte en porte. Des politiciens sont allés soudoyer le propriétaire qui a retiré la salle à notre héroïne. Sans perdre courage, elle alla retenir le salon de l’hôtel et recommença ses circulaires. Les politiciens ont encore gagné l’hôtelière à refuser la tenue de l’assemblée dans son salon. Cinq fois, Mlle Côté avait retenu un endroit, cinq fois elle a recommencé et distribué ses circulaires dans cette même journée. A la fin, l’assemblée eut lieu sur la galerie du forgeron. (Cela ressemble un peu à l’étable de Bethléem.) La rue était remplie de monde. Louis Even était monté sur une chaise pour donner sa conférence. Dès qu’il commençait à dire un mot, la foule hurlait comme une meute de sauvages. Pour terminer, les gueulards, toujours poussés par les politiciens, ramassèrent toute la littérature de Louis Even, la jetèrent dans la rue et y mirent le feu en criant et en blasphémant. Voilà la récompense d’un homme qui voulait ouvrir les yeux de ces gens sur la source de leur misère. (Le disciple n’est pas plus grand que le Maître) Cela n’est qu’un exemple des difficultés des débuts.

Fondation de Vers Demain

Gilberte Côté-Mercier, Gérard Mercier et Louis EvenGilberte Côté-Mercier, son mari Gérard Mercier, et Louis Even, en 1959

En 1939, nos fondateurs étaient à l’Annonciation, dans la maison louée par madame Côté, comme d’habitude. On vint leur annoncer que la guerre était déclarée en Europe. Louis Even s’est mis à pleurer. Sa réponse fut : « Nous allons fonder un journal ». Ce n’était pas le temps, à cause des censures des journaux occasionnées par la guerre. Mais Louis Even n’était pas homme à baisser pavillon. Le journal Vers Demain a vu le jour en septembre 1939.

Mais avec la guerre, ce n’était pas facile de trouver un imprimeur pour un journal d’idées qui dénonçait les financiers. Mlle Côté est allée voir un premier puis un deuxième imprimeur. Le deuxième, après avoir accepté les textes, les garda pendant trois semaines sans donner de nouvelles. A la fin, il refusa d’accomplir le travail craignant les sanctions. Mlle Côté s’est adressée à L’Eclaireur, de Beauceville. Il accepta et il a imprimé le journal Vers Demain pendant 40 années, sans jamais recevoir de représailles ou de censures.

Evidemment, le bureau a été fondé dans la maison de Mme Côté sur le boulevard St-Joseph. Mlle Côté tenait le bureau, répondait aux lettres et au téléphone, entre ses randonnées d’apostolat. Dès la première année le nombre des abonnés à Vers Demain est monté à 6000, et la deuxième année à 25 000. Il n’en fallait pas tant pour réveiller la meute des financiers qui usèrent de leur influence et de leurs magots pour faire dénoncer, par des personnes honorables, ces idées libératrices qui se répandaient comme une traînée de poudre dans le pays.

Oh, alors, il en a fallu du courage aux fondateurs pour continuer le combat et regagner la confiance de la population. Les mauvaises langues ne savent pas ce qu’elles détruisent de beau et de grand en lançant leur venin a tout vent, sans réfléchir.

Appel à de l’aide

Congrès créditiste 1955 Gilberte Côté-Mercier congrès 1955

Gilberte Côté-Mercier s'adresse à l'immense foule du congrès de Québec en 1955

En 1941, les fondateurs firent appel à des jeunes gens pour se dévouer à plein temps dans l’Œuvre. Gérard Mercier, de Ste-Anne de Beaupré, employé aux Annales de Ste-Anne et chef de la Jeunesse Ouvrière Catholique (JOC), a été le premier à répondre à l’appel. Il faisait déjà du travail pour l’œuvre localement et il se distinguait par sa vigueur et son audace. Il s’est attaché étroitement aux fondateurs pour toujours et il les a appuyés de toutes ses forces. Il épousa Gilberte Côté, le 14 février 1946, surtout dans le but de protéger la réputation de notre héroïque cofondatrice. Il l’a toujours traitée avec grand respect et vénération, reconnaissant la valeur de la personne que Dieu lui avait confiée. Et ils firent tous les deux les sacrifices nécessaires pour pouvoir consacrer totalement leur temps à l’œuvre.

La maison du boulevard St-Joseph n’était plus assez grande pour contenir le bureau d’un journal qui prenait autant d’envergure. Madame Côté vendit sa maison et en fit construire une autre à 4885 rue Chabot. Le sous-sol au complet et la moitié du 2e étage étaient réservés aux bureaux du journal Vers Demain. Au début on employait des secrétaires payées. Il fallait être modestement vêtues au travail. Et toutes devaient s’arrêter pour dire le chapelet avant le dîner.

Une journée d’été, les employées sont arrivées mal vêtues. Gilberte Côté les a tout simplement congédiées, et elle les remplaça par sa cousine Juliette. Elle s’en est toujours félicitée. Dans les années ‘50, elle fit appel à des filles d’idéal qui, comme elle, offriraient leurs services à la cause bénévolement. Florentine Séguin et moi-même avons répondu et nous sommes encore là avec plusieurs autres qui se sont jointes à l’équipe.

Gilberte Côté s’est dépensée sans compter. Elle n’a jamais pris de vacances. Elle faisait les programmes de route des Plein-Temps, elle allait elle-même en tournée de conférences toutes les fins de semaine. Elle donnait des conférences hebdomadaires à la radio et à la télévision, en plus d’aider à la rédaction du journal. Elle prenait du temps sur ses nuits pour arriver à joindre les deux bouts. Elle s’occupait de tous les problèmes des membres de l’œuvre. Le téléphone était près de son lit pour répondre aux appels de nuit, quand des apôtres avaient des problèmes. Souvent, ils étaient arrêtés par la police par pure persécution. Il fallait régler tout cela. Les autorités civiles savaient très bien que nous avions entière liberté d’exercer notre propagande, car au Canada, la Charte canadienne des droits protège la liberté de presse, la liberté d’expression et la liberté de religion. Même en le sachant, certains esprits malveillants arrêtaient nos apôtres seulement dans le but de nous causer des ennuis et nous obliger à payer des avocats.

Madame Côté-Mercier était intransigeante quand il s’agissait de défendre la justice et les droits des pauvres.

Elle a parcouru toutes les régions du Québec, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick. Elle s’est rendue jusque dans l’Ouest canadien, même en France, Suisse, Brésil. Et ses écrits et ceux de Louis Even parcourent le monde entier par centaine de millions d’exemplaires.

En 1962 - Installation à Rougemont. - Construction de la Maison Saint-Michel. On fit appel à des travailleurs bénévoles. Une journée, jusqu’à 106 travailleurs de différents métiers, sont venus aider. C’était la veille de la Pentecôte, madame Côté avait vu une multitude de flèches venant de la montagne de Rougemont s’élever dans le Ciel et descendre et disparaître au-dessus du terrain de la Maison Saint-Michel. Ce qui lui a fait dire : « On viendra de tous les pays du monde s’éclairer dans cette maison à la lumière du Crédit Social. »

En 1975, érection de la Maison de l’Immaculée, avec une grande salle pour la tenue des congrès annuels et pour loger les garçons à plein temps.

Gilberte Côté-Mercier en 1985Gilberte Côté-Mercier en 1985

Madame Rosario Côté, encore vivante, pointait du doigt les édifices en disant fièrement à sa fille Gilberte : « C’est l’argent de ton père qui a planté les premiers clous de ces maisons. »

La jeunesse d’aujourd’hui a besoin de l’exemple de la vie de vrais héros, afin de se remettre dans la voie du devoir et de la vertu, qualités si nécessaires pour rebâtir la civilisation dans notre pays.

Gilberte Côté n’a pas perdu sa vie dans les frivolités. Elle a consacré tout son temps dès sa jeunesse aux choses sérieuses, à servir la vérité, à défendre la justice. Elle y a trouvé le véritable bonheur. Elle a bâti autour d’elle une cité terrestre meilleure pour ses frères et sœurs. Aussi, que d’âmes, elle a ramenées à l’Eglise et sur le chemin du Ciel !

Pour nous, ses proches, nous lui devons que des mercis : Merci de nous avoir enseigné à nous vêtir en chrétienne, sans respect humain. Merci de nous avoir protégé l’esprit de la corruption de la télévision. Merci de nous avoir donné l’exemple du dévouement, du don de notre personne, de l’amour Dieu et des pauvres. Merci d’avoir fait de nous, des apôtres, des soldats du Christ et des défenseurs du prochain.

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