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Escompte sur les prix

Louis Even le samedi, 23 janvier 1965. Dans Economie

Pour remplacer les hausses de salaires et faire disparaître les grèves

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La vie est trop chère

Louis EvenQuand vous allez dans un magasin, vous voyez toutes sortes de produits. Sur aucun d'eux, vous ne trouvez la mention : "Ce produit est destiné à M. Un tel, à Mme Une telle.

Non. Ces produits, qui viennent de diverses fermes, de diverses manufactures, sont là, sur le marché communautaire, pour quiconque les trouve à son goût, à la seule condition qu'il les paie.

Dans notre monde moderne, personne ne fait tout ce qu'il lui faut pour lui-même. Le travail est très divisé. Les uns font toujours d'une chose ; d'autres font toujours d'une autre chose. Chacun est obligé, après cela, de se procurer des produits faits par d'autres.

Et comment est organisée la distribution des produits ?

Les produits portent un prix. Tel produit est offert pour un dollar et demi ; tel autre pour un dollar et quart. Etc.

Puis, les consommateurs viennent au magasin, s'ils ont de l'argent. L'argent pour acheter est supposé avoir été distribué pendant la production. Les uns en reçoivent plus, d'autres moins. Quand ils viennent au magasin, ils choisissent dans le lot offert les articles qui leur conviennent. Ils choisissent, mais seulement dans la mesure où ils le peuvent. L'argent dans leur poche est un moyen de choisir ; mais le prix sur le produit pose un obstacle ou une limite à leur choix.

Si l'argent dans le porte-monnaie est un facteur important, le prix sur le produit est un autre facteur non moins important. Il ne sert pas à grand-chose d'avoir une bonne petite somme en main si les prix sont tellement élevés que la bonne petite somme n'achète pas grand-chose.

Tout le monde sait cela. Et qui donc ne s'est pas plaint de la vie chère ?

Le monde ouvrier n'est, pas lent à trouver que le salaire de la semaine fond vite devant les prix et ne fait pas entrer grand-chose dans la maison.

Grossir les salaires fait grossir les prix

Quelle est la première réaction des unions, des syndicats, en face de cette situation ?

La première réaction, c'est de demander des hausses de salaires : Puisque je n'ai plus d'argent pour payer à cause de la montée des prix, je vais demander plus d'argent à mon patron.

On s'organise pour cela. Les syndicats sont là pour voir à ce que les ouvriers aient un pouvoir d'achat satisfaisant. Puisqu'ils ne l'ont plus devant des prix grossis, ils demandent des salaires grossis. On va même jusqu'à faire des grèves, jusqu'à se priver de salaires pendant des semaines pour obtenir de plus gros salaires.

Si on gagne la partie, les salaires augmentent. Mais qu'arrive-t-il quand le patron est obligé de payer de plus gros salaires ? Son prix de revient augmente d'autant. Tout ce que l'employeur dépense, il est obligé de l'inscrire dans son prix.

Quand le prix monte dans une ligne, les ouvriers des autres lignes demandent des hausses de salaires à leur tour. Ce qui fera monter les prix des produits de ces autres lignes. Quand les produits des usines ont grimpé, les cultivateurs qui doivent payer les produits sortant des usines sont obligés de payer plus cher. Eux aussi vont être obligés de hausser leurs prix pour pouvoir rencontrer des dépenses plus fortes.

Tout sera à recommencer, et l'on n'aura fait que dresser les uns contre les autres patrons et ouvriers, producteurs des villes et producteurs des campagnes. Avec, en définitive, personne de satisfait.

La spirale est interminable .et peut aboutir à des désastres, comme dans le cas de ceux qui produisent pour l'exportation : quand les prix atteignent un certain niveau, le marché est affecté, et c'est le chômage. On se tourne alors vers les gouvernements. Si les gouvernements se mêlent de donner de l'emploi, ce sera pour des dépenses publiques qui exigeront des taxes, qui diminueront d'autant l'argent dans le public, qui augmenteront encore les prix quand c'est l'industrie qui paie les taxes.

Un dividende social

Alors, il n'y a pas de solution ? — Il n'y en a pas dans le système financier actuel. Et dé moins en moins, à mesure que la production augmente en employant moins de salariés. Les ouvriers ont bien raison de dire que le salaire n'est qu'une partie du prix. C'est de plus en plus vrai ; et c'est justement pour cela qu'on perd son temps à vouloir faire les salaires joindre les prix.

La solution est dans certains changements dans le régime financier de distribution. Les changements que préconise le Crédit Social régleraient facilement le problème de répartition et de distribution des produits, quelles que soient les circonstances.

Un des changements consiste à hausser le pouvoir d'achat autrement que par-une hausse de salaire. Le Crédit Social dit : Par un dividende périodique à tout le monde. Dividende payé, non pas par le patron, non pas par l'industrie, mais par le système financier réformé, par un organisme de crédit national, ou provincial, chargé de mettre la finance en accord constant avec les faits.

Le dividende n'étant pas payé par l'employeur, il n'entrerait pas dans les prix. Il ne s'agit pas des dividendes aux actionnaires, qui font certainement partie des prix, mais du dividende social, distribué par un organisme de crédit, provincial ou national, ayant -justement pour fonction de faire toutes les opérations comptables nécessaires pour que la production répondant aux besoins aille aux besoins.

Quand tous les produits répondant aux besoins trouvent preneur, tout le monde est satisfait : ceux qui les obtiennent et ceux qui les vendent. Si l'on en veut davantage, il n'y a qu'à en produire davantage. Le système producteur ne demande pas mieux, dès lors qu'il y a des acheteurs solvables.

Le dividende à tout le monde, ajouté aux salaires des employés. rendrait les consommateurs solvables, aussi solvables que les prix de revient de la production l'exigent.

A tout le monde, parce que ce n'est pas un salaire répondant .à du travail d'employé, mais un pouvoir d'achat supplémentaire répondant à la production de la machine, de la science appliquée, du progrès, qui est un bien communautaire.

L'idée peut paraître étrange. Mais au fond, n'est-ce pas cela que les ouvriers et leurs syndicats réclament lorsqu'ils demandent des hausses de salaires avec des diminutions d'heures d'ouvrage ?' Ce n'est plus une récompense à leur travail puisqu'ils demandent plus en travaillant moins. C'est un dividende sur la production abondante à laquelle ils sont conscients d'avoir droit, même si elle n'est pas le fruit de leurs efforts, mais le résultat de techniques perfectionnées.

Le malheur, c'est qu'ils changent ce dividende en salaire et, à cause de cela, le font entrer dans les prix. C'est aussi qu'ils changent en salaires pour les employés ce qui devrait en réalité être un dividende pour tout le monde puisque 'la production actuelle est due bien plus au progrès qu'au travail individuel.

Au lieu de jeter le blâme des prix, ou de l'insuffisance de pouvoir d'achat, sur les profits qui sont le salaire de l'employeur, ou sur les dividendes au capital privé, pourquoi ne pas demander le dividende social à tout le monde ?

Un escompte social

Outre le dividende à tout le monde pour ajouter au pouvoir d'achat sans passer par l'industrie, donc sans passer dans le prix de revient, le Crédit Social préconise en second lieu l'ajustement scientifique des prix. Non pas la fixation des prix par le gouvernement, ni par une commission quelconque. Rien de cela. Mais un ajustement, une diminution générale du prix à payer par les acheteurs, mais diminution compensée au vendeur par le même organisme de crédit chargé de mettre l'accord entre le pouvoir d'achat et les prix.

Ceci est plus difficile à comprendre quand on est habitué à tout voir dans les limites du système financier actuel. Mais n'avez-vous pas déjà vu des magasins afficher deux prix ; par exemple : Prix régulier, $25 ; prix de cette vente, $19. Dans ce cas, le prix comptable est $25, mais le prix à payer par l'acheteur est $19. Qui finance la différence ? Le marchand lui-même, obligé de choisir entre sacrifier de ses réserves ou de son revenu pourtant légitime ou faire faillite faute de vendre des produits qui traînent.

Le Crédit Social instituerait justement ce système de deux prix : un prix comptable, établi par le producteur lui-même, comme aujourd'hui comprenant le prix de revient, plus le pourcentage convenable de profit ; puis, le prix à payer par l'acheteur, qui serait le prix comptable moins un escompte général, le même sur tous les produits du pays, variant seulement de période e: période, selon l'état de la production. C'est, en effet, un ajustement scientifique, non pas arbitraire, ni un ajustement de banqueroute.

L'escompte dépendrait de la somme totale d la production par rapport à la somme total de la consommation pendant le terme immédiatement écoulé. Si, par exemple, pendant les trois derniers mois, le public a consommé les 3/4 seule ment de la production offerte, en accordant u escompte de 25 pour cent, faisant payer seule ment les 3/4 du prix pendant les trois prochain mois, on mettrait le public à même de pouvoir acheter toute la production, sauf des augmentations possibles, et cela se réglerait en déterminant le taux de l'escompte pour le terme suivant.

Le Crédit Social compenserait l'escompte statué pour le terme en cours, en payant au marchand ce que l'acheteur ne paie pas. De sort que ni l'un ni l'autre ne souffrirait de cet arrangement. Au contraire, les deux en profiteraient.

Tout cela, ce serait mettre la finance a service de la production et de la distribution des produits. La seule chose qui empêche de le faire tout de suite, c'est l'habitude invétérée de se soumettre aux décisions de la finance.

Tant que le système financier sera le maitre des décisions, on aura beau se débatte classe contre classe, individus contre individus, nations contre nations, on restera toujours dans le chaos. On a de l'ordre dans la comptabilité des prix; on n'en a aucun dans la comptabilité du pouvoir d'achat. Et au lieu d'établir un système pour mettre de l'ordre dans le pouvoir d'achat, on critique la comptabilité des, prix ! C'est absurde.

Une finance de service

Si les plaignants de tous les domaines, de toutes les organisations; si les unions, les syndicats, les associations de ci et de ça, avaient seulement mis un dixième de leurs énergies et de leurs sacrifices de temps et d'argent à réclamer une finance de service, une finance conforme aux faits, disons le mot, à réclamer l'établissement du Crédit Social, il y a longtemps qu'il ne serait plus question de vie chère, ni de frictions continuelles entre employeurs et employés, ni de grèves, ni de toute cette kyrielle de guerres intestines injustifiables, quand la capacité de production du pays est capable de suffire à une honnête subsistance pour tout le monde, sans enlever ce que les uns ou les autres peuvent avoir en plus.

Les solutions égoïstes, qu'il s'agisse d'égoïsme individuel' ou d'égoïsme de classes, ne peuvent rien régler, et de moins en moins, à mesure que le progrès place devant la population une production de plus en plus libérée du labeur humain. La solution doit être sociale, sans dépouiller personne, et sans prétendre abolir les inégalités sociales. La solution, c'est le Crédit Social, bon pour tout le monde, sans nuire aux acquisitions légitimes de personne.

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