Ce livre parle du Crédit Social, mais il est loin d’être une somme créditiste. Le Crédit Social, en effet, est toute une orientation de la civilisation et touche au social et au politique autant, sinon plus, qu’à l’économique.
"On oublie, on ne voit pas, on ne veut pas voir qu’il y a des gens mal logés, des gens mal nourris, des salaires insuffisants, qu’il y a des pays tout entiers qui souffrent de la faim. Ce n’est pas chrétien de penser, à plus forte raison de dire; c’est leur faute..."
Son Eminence le Cardinal Jules-Géraud Saliège
Un premier synode sur la famille s'est déroulé à Rome du 5 au 19 octobre 2014. Nous disons bien premier, car un deuxième synode, portant lui aussi sur la famille, aura lieu lui aussi à Rome, du 4 au 25 octobre 2015. Pourquoi deux synodes ? C'est parce que le thème de la famille est immense et extrêmement important pour l'avenir non seulement de l'Église, mais de l'humanité. (Et cela signifie aussi qu'il ne faut pas paniquer sur ce que certains médias ont laissé transpiré du premier synode, puisque les décisions finales ne seront pas prises par le Pape avant la fin du deuxième synode de 2015.)
Le premier synode, qui vient de se terminer, avait pour thème « les défis pastoraux de la famille dans le contexte de l’Évangélisation », et était appelé à examiner les difficultés et souffrances auxquelles les familles d'aujourd'hui ont à faire face, par exemple, le fait que presque un mariage sur deux se termine par un divorce. Ce synode était dit « extraordinaire » car il ne rassemblait que les présidents des conférences épiscopales du monde (114 conférences épiscopales au total) plus des experts conviés par le Pape. Le prochain synode d'octobre 2015 aura pour thème « Jésus Christ, révèle le mystère et la vocation de la famille ».
Ce qui a fait couler beaucoup d'encre (et de salive) dans les médias du monde entier, et choquer plus d'un, c'est la préparation du rapport final du premier synode, sous forme de rapport d'étape, publié après une semaine de travaux, et sensé résumer ce que les différents participants au synode ont dit. Mais voilà que ce rapport d'étape laissait supposer une volte-face de 180 degrés de l'enseignement de l'Église sur les divorcés remariés et les couples homosexuels, ce qui a amené une majorité d'évêques présents à dire que ce rapport ne reflétait pas du tout ce qui s'était dit. 470 amendements à ce rapport furent ensuite présentés, et les passages controversés disparurent ou furent largement modifiés, pour correspondre davantage à l'enseignement traditionnel de l'Église. C'est ce texte qui sera envoyé aux conférences épiscopales du monde entier et servira de document préparatoire pour le synode de 2015.
Donc une certaine confusion régnait après la publication de ce rapport par les médias, et plusieurs évêques ont été jusqu'à dire que seul le Pape pouvait mettre fin à cette ambigüité. Le Pape François s'est en effet exprimé à la toute fin du synode, et il a été très clair : la doctrine de l'Église sur le mariage et la famille ne changera pas, mais il faut tenir compte de la miséricorde. Par exemple, Jésus n'a pas seulement dit à la femme adultère : « Moi non plus je ne te condamne pas », mais il a ajouté : « Va et ne pêche plus ».
Jésus n'a pas négligé la doctrine, mais il a fait aussi preuve de miséricorde. Par contre, pour être miséricordieux, il ne s'agit pas d'ignorer la doctrine ou de la mettre de côté non plus. Jésus n'est pas venu abolir la loi (la doctrine), mais l'accomplir, en y ajoutant un esprit d'amour. C'est un peu le problème que certaines personnes ont avec l'enseignement de l'Église, elles n'y voient que des règlements, sans voir l'amour de Dieu qui sous-entend ces règlements.
Donc, après avoir observé en silence les évêques pendant deux semaines, le Saint-Père a conclu le synode le 18 octobre par un discours dans lequel il mentionnait cinq tentations qu'il avait décelées durant ces travaux. Voici ce que le Pape François a dit :
« 1. Première tentation : la tentation du raidissement hostile, c’est-à-dire vouloir s’enfermer dans ce qui est écrit (la lettre) et ne pas se laisser surprendre par Dieu, par le Dieu des surprises (l’esprit) ; à l’intérieur de la loi, de la certitude de ce que nous connaissons et non pas de ce que nous devons encore apprendre et atteindre. Depuis l’époque de Jésus c’est la tentation des zélés, des scrupuleux, des attentifs et de ceux qu’on appelle — aujourd’hui “traditionalistes” et aussi des intellectualistes.
« 2. La tentation de l’angélisme destructeur, qui au nom d’une miséricorde trompeuse bande les blessures sans d’abord les soigner ni les traiter ; qui s’attaque aux symptômes et pas aux causes et aux racines. C’est la tentation des “bien-pensants”, des timorés et aussi de ceux qu’on appelle “progressistes et libéralistes”.
« 3. La tentation de transformer la pierre en pain pour rompre le jeûne long, lourd et douloureux (cf. Lc 4, 1-4) et aussi de transformer le pain en pierre et de la jeter contre les pécheurs, les faibles et les malades (cf. Jn 8, 7) c’est-à-dire de le transformer en “fardeaux insupportables” (Lc 10, 27).
« 4. La tentation de descendre de la croix, pour faire plaisir aux gens, et ne pas y rester, pour accomplir la volonté du Père ; de se plier à l’esprit mondain au lieu de le purifier et de le plier à l’Esprit de Dieu.
« 5. La tentation de négliger le dépôt de la foi, de se considérer non pas des gardiens mais des propriétaires et des maîtres ou, dans l’autre sens, la tentation de négliger la réalité en utilisant une langue précieuse et un langage élevé pour dire tant de choses et ne rien dire ! On les appelait des “byzantinismes”, je crois, ces choses-là...
« Chers frères et sœurs, les tentations ne doivent ni nous effrayer ni nous déconcerter ni non plus nous décourager, parce qu’aucun disciple n’est plus grand que son maître ; donc si Jésus a été tenté — et même appelé Béelzéboul (cf. Mt 12, 24) — ses disciples ne doivent pas s’attendre à un meilleur traitement.
« Personnellement, je me serais beaucoup inquiété et attristé s’il n’y avait pas eu ces tentations et ces discussions animées ; ce mouvement des esprits, comme l’appelait saint Ignace, si tout le monde avait été d’accord ou taciturne dans une paix fausse et quiétiste. En revanche j’ai vu et j’ai écouté — avec joie et reconnaissance — des discours et des interventions pleines de foi, de zèle pastoral et doctrinal, de sagesse, de franchise, de courage et de parrhésie (franc parler). Et j’ai entendu qu’a été mis devant les yeux de chacun le bien de l’Eglise, des familles et la « suprema lex », la « salus animarum » (la loi suprême, le salut des âmes). Et ce toujours — nous l’avons dit ici, dans cette salle — sans jamais mettre en discussion les vérités fondamentales du sacrement du mariage : l’indissolubilité, l’unité, la fidélité et la procréation, c’est-à-dire l’ouverture à la vie.
« Et c’est cela l’Eglise, la vigne du Seigneur, la Mère fertile et la Maîtresse attentive, qui n’a pas peur de se retrousser les manches pour verser l’huile et le vin sur les blessures des hommes (cf. Lc 10, 25-37) ; qui ne regarde par l’humanité depuis un château de verre pour juger ou étiqueter les personnes. C’est cela l’Eglise une, sainte, catholique, apostolique et composée de pécheurs, qui ont besoin de sa miséricorde. C’est cela l’Eglise, la véritable épouse du Christ, qui cherche à être fidèle à son Epoux et à sa doctrine. C’est l’Eglise qui n’a pas peur de manger et de boire avec les prostituées et les publicains (cf. Lc 15). L’Eglise qui a les portes grandes ouvertes pour recevoir ceux qui sont dans le besoin, les repentis et pas seulement les justes ou ceux qui croient être parfaits ! L’Eglise qui n’a pas honte de son frère qui a chuté et ne fait pas semblant de ne pas le voir, mais se sent au contraire impliquée et presque obligée de le relever et de l’encourager à reprendre son chemin et l’accompagne vers la rencontre définitive, avec son Epoux, dans la Jérusalem céleste.
« Beaucoup de commentateurs, ou des gens qui parlent, ont imaginé voir une Église en litige où une partie s’oppose à l’autre, en allant même jusqu’à douter de l’Esprit-Saint, le vrai promoteur et garant de l’unité et de l’harmonie dans l’Eglise. L’Esprit-Saint qui tout au long de l’histoire a toujours conduit la barque, à travers ses ministres, même lorsque la mer était contraire et agitée et les ministres infidèles et pécheurs.
Et, comme j’ai osé vous le dire au début, il était nécessaire de vivre tout cela avec tranquillité, avec une paix intérieure également parce que le synode se déroule cum Petro et sub Petro (avec Pierre et sous l'autorité de Pierre), et la présence du Pape est une garantie pour tous. (...)
Chers frères et sœurs, nous avons encore à présent une année pour mûrir, avec un vrai discernement spirituel, les idées proposées et trouver des solutions concrètes aux nombreuses difficultés et innombrables défis que les familles doivent affronter ; à apporter des réponses aux nombreux découragements qui assiègent et étouffent les familles.(...)
Que le Seigneur nous accompagne, nous guide sur ce parcours à la gloire de Son nom avec l’intercession de la Bienheureuse Vierge Marie et de saint Joseph ! Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi ! »
Et nous, de Vers Demain, ajoutons : donc, continuons de prier pour que le Saint-Esprit éclaire nos évêques et les participants du prochain synode, pour le plus grand bien de toutes les familles.