Mes bien chers amis,
Le 13 mai de cette année, le Jubilé d'Or des apparitions de Marie à Fatima s'est ouvert magnifiquement par le rassemblement de 3 millions de pèlerins là où, il y a cinquante ans, la Reine du Ciel se montrait pour la première fois aux trois petits bergers de la Cova da Iria.
Le plus insigne de ces pèlerins était le Pape lui-même, Paul VI. Le Saint-Père y est venu à seul titre de pèlerin. Il y a célébré la messe à midi, à l'heure et à l'endroit où Marie venait faire ses visites aux voyants. Après avoir prié Marie, surtout pour la paix, la paix dans le monde et la paix à l'intérieur de l'Église, le Pape est rentré le jour même à Rome.
Le Saint-Père a une grande dévotion à Marie et une grande confiance en Elle.
Une autre présence insigne à Fatima le 13 mai de cette année, ce fut celle de Lucie, l'aînée des trois petits voyants de 1917. Les deux autres, ses petits cousins, moururent tôt, ainsi que Marie le leur avait annoncé:
Lucie a 60 ans cette année. Elle est religieuse cloîtrée dans un Carmel de Coimbre au Portugal. Lucie ne devait plus franchir la clôture du cloître, pas même pour le Jubilé d'Or des apparitions, mais le pape tint à ce qu'elle soit présente. Lucie assista donc à la messe dite par le pape ce 13 mai. Elle reçu la communion de sa main. Après la messe, le pape la fit venir près de son trône, la bénit, baisa son voile et la présenta à la foule qui lui fit une ovation délirante. Moment de grande émotion pour elle et elle ne pu retenir ses larmes. C'est que la scène d'il y a 50 ans restait, on le pense bien, vivante à l'esprit de la voyante et combien différente de celle d'aujourd'hui.
Le 13 mai 1917, La Cova est un pacage plutôt maigre où paissent des moutons sous la garde de trois petits bergers. À midi vient soudain une dame, une belle dame, qui, à la question de Lucie – D'où venez-vous Madame ? – répond : « Je suis du Ciel ». Ainsi commence, pas à la façon des hommes mais à la façon de Dieu, simplement, sans tambours ni trompettes, sans fastes, sans convocations de personnages, à la façon de Nazareth, lorsque l'Archange apporta à la terre la plus grande nouvelle de tous les temps. Ainsi commença ce 13 mai 1917 une série d'événements qui allaient influencer non seulement la vie des trois petits voyants mais aussi celle de millions d'autres personnes et se répercuter sur toute l'Église toute entière. Et à midi du 13 mai 1967 la bergère de 10 ans devenue une Carmélite de 60 ans est de nouveau là.
Le pacage est changé en un vaste sanctuaire de plein air. De moutons, plus, mais une masse de fidèles en prières. À l'autel, un pape et Jésus-Christ Lui-même sur l'autel. Quelle fête sur ce coin de terre portugais! Comme du ciel, la belle dame doit se pencher avec tendresse sur sa messagère fidèle. Comme son cœur maternel doit être consolé à la vue de cette vaste assemblée attestant que son message n'a pas été totalement en vain. C'est d'ailleurs 50 années de culte grandissant, 50 années de pèlerinages, 50 années de supplications, de louanges, d'actions de grâce, de retour à Dieu que porte déjà ce sol d'élection vers lequel daigna descendre Celle qui intercède continuellement auprès de Dieu pour les hommes qui par l'amoureuse volonté de son Fils sont devenus ses enfants.
La montée de Fatima a été merveilleuse. La Vierge avait demandé de lui construire une chapelle à la Cova. L'Évêque de Leiria y a fait ériger une basilique, la plus grande église du Portugal : longue de 280 pieds, haute 171 pieds, allait consacrer à Notre-Dame du Rosaire, vocable sous lequel elle s'était nommée à Lucie. L'autel principal et 14 chapelles latérales y rappellent les quinze Mystères du Rosaire. Une grande esplanade, dix fois la surface de celle de Lourdes a été aménagée pour les cérémonies en plein air des grands pèlerinages.
Le 13 mai et le 13 octobre surtout, les pèlerins s'assemblent là par des 500,000 parfois un million et plus. Pas tous venus en voitures. Fatima garde son caractère de prières et de pénitences. Il est des pèlerins qui font des 200, des 250 milles à pied, prenant toute une semaine pour s'y rendre en priant et en méditant. Un grand nombre font au moins les derniers milles à pied, plusieurs nu-pieds, portant leurs chaussures pendues à leur cou.
Le 13 octobre 1931, tous les évêques du Portugal, assemblés là à Fatima, consacrèrent solennellement leur patrie au Cœur Immaculé de Marie. Cette consécration allait valoir au Portugal la préservation de la guerre civile déclenchée par les communistes en Espagne, qui ensanglanta terriblement ce pays pendant deux années, et aussi de la seconde guerre mondiale de 1939 à 1945.
Le 10 février 1939, le Pape Pie XI mourait au Vatican. Neuf jours plus tard, avant même l'ouverture du Conclave pour l'élection d'un nouveau Pontife, le saint pape Pie X, mort depuis 25 ans, apparaissait au cardinal Eugène Pacelli, celui-là même qui avait été consacré évêque le jour et à l'heure où Marie faisait sa première apparition à Fatima. Pie X annonça à Eugène Pacelli qu'il serait l'élu du conclave et que sous son pontificat une une terrible tourmente s'abattrait sur l'humanité — de fait, Eugène Pacelli fut élu pape le 2 mars suivant prenant le nom de Pie XII.-- Et six mois plus tard éclatait la 2ème guerre mondiale qui allait durer six ans. Six années de haine, de carnage et de destruction.
Pie XII, qui fut vraiment le Pape de Fatima, consacra le monde entier au Cœur immaculé de Marie le 31 octobre 1942.
La guerre se termina en 1945, mais le monde ne se convertit pas encore, et le communisme débordant de la Russie, assujettit onze autres nations d'Europe. En 1950, il dominait la grande Chine, menaçant de se répandre sur tout le sud-est asiatique.
Cependant, des fervents de Notre-Dame de Fatima conçurent et réalisèrent l'idée de porter triomphalement une statue de Notre-Dame de Fatima à travers toutes les nations où il était encore possible de pénétrer.
Ce fut vraiment un pèlerinage de merveilles à travers le monde. Sur tout le parcours de la Vierge pèlerine, les merveilles succédèrent aux merveilles : signes sur la terre, signes dans le ciel, miracles, conversions, réconciliations entre ennemis, armes déposées, frontières abaissées ; et partout, des foules priant, chantant, acclamant la Reine si belle, la Mère si bonne, la si généreuse Dispensatrice des grâces.
Veux-t-on un exemple de conversions innombrables ? À Madrid, capitale de l'Espagne, un Congrès Marial, tenu en 1948 fut présidé par une statue obtenue de la Capelinha de Fatima. La statue fut alors portée en procession dans toutes les rues de la capitale. Des centaines de milles personnes prirent part à ces manifestations. On ne parlait plus que de Notre-Dame dans toute la région. Les foules assiégèrent les confessionnaux, les confesseurs devant s'y tenir à la journée longue. Des communistes obstinés revenaient à Dieu. Les curés des faubourgs rapportèrent que 40 pour cent des pénitents venus à confesse ne l'avaient pas fait depuis quinze, vingt ou trente ans. L'Évêque de Madrid dit qu'il aurait facilement donné ses 25 années d'apostolat pour ces neuf journées mariales.
Veux-t-on maintenant un exemple de frontières abaissées ? Prenons comme exemple celles qui séparent la France de l'Espagne. Pour passer d'Espagne en France, il fallait traverser sur le pont de la Bidassoa. Or, depuis 11 années, c'est-à-dire depuis le déclenchement de la guerre civile d'Espagne par les communistes en 1936,il était interdit de traverser la ligne frontière sur ce pont. Pas un homme, pas un colis n'y était passé dans un sens ou dans l'autre.
La statue, venant d'Espagne, s'engagea sur le pont, portée par l'évêque espagnol de Vittoria, avec une escorte de ses fidèles. Du côté français, l'évêque de Bayonne, avec une escorte de ses fidèles, s'engagea sur la partie française du pont, pour recevoir la Vierge pèlerine. Les deux groupes s'avancèrent jusqu'à la ligne médiane. Des deux côtés de la frontière, on est en pays basque et catholique. Et c'est en langue basque que les fidèles du diocèse de Vittoria et ceux du diocèse de Bayonne chantèrent à pleine voix leurs acclamations à Marie. Les mêmes cantiques dans la même langue. Eux ne se regardaient pas en ennemis comme leurs gouvernements respectifs. Ils étaient frères, frères par le sang, frères par la langue, frères par la religion, frères par la même dévotion à la même Mère et ils le manifestaient avec élan.
Les garde-frontières de l'un et l'autre pays eurent beau essayer de calmer ces effusions, rien n'y fit. On se touchait, on s'embrassait à travers la ligne fatidique. Et lorsque, à travers cette ligne, l'évêque espagnol eut remis la Vierge pèlerine entre les mains de l'évêque français, Basques d'Espagne et Basques de France pouvaient conclure : Maintenant que la Mère a passé, les enfants passeront bien, eux aussi !
De fait, quelques semaines plus tard, l'interdiction tombait officiellement, et les relations entre les deux pays se sont progressivement améliorées depuis.
Signalons aussi le prodige des colombes.
Lors du 25e anniversaire des apparitions, eu 1942, un gigantesque cortège accompagnait la Vierge portée de Fatima à Lisbonne, distance de 94 milles. Une personne de la ville de Bombarral lâcha cinq colombes pour honorer le passage de la Reine de la Paix. Au lieu de se disperser dans le ciel, ces colombes vinrent se poser au pied de la statue. Elles y restèrent, malgré la foule et le bruit, durant des jours, tout au cours des longues processions à Lisbonne et dans d'autres localités.
« Fatima est une explosion de surnaturel. » A bien dit le cardinal-archevêque de Lisbonne « Fatima est devenu l'espérance de toutes les nations. Il n'est pas exagéré d'appliquer ici la parole du poète : « Une grande espérance a traversé les Cieux ».
Certes, la conduite du monde moderne, son néo-paganisme, son rejet de Dieu, son matérialisme et sa corruption, seraient plutôt de nature à nous faire perdre tout espoir. Mais il y a Marie.
Comme l'a écrit l'abbé Payrière :
« Entre la colère du Père Céleste et l'humanité coupable, il y a le Cœur d'une Mère. Et ce Cœur de la Mère triomphera... d'autant plus vite que nous lui rendrons le culte et les hommages exceptionnels qu'il réclame et que Dieu veut ».