Vers la conspiration économique

Gilberte Côté-Mercier le mercredi, 06 mai 1970. Dans Conspiration

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Mes amis,

Gilberte Côté-MercierCe que le ministre de l’Éducation, dont Gérin Lajoie, veut infliger à notre province est une victoire des Francs maçon, des athées, des neutres, des laïcisant, des communistes.

Depuis 1910 que les Francs-maçons le préparent. Ils l’auront leur Ministère de l’éducation par la grâce de Gérin Lajoie, Jean lesage, et René Lévesque. On peut comprendre que les Franc-maçon s’en réjouissent puisque c’est leur œuvre. Mais on ne conçoit pas que des catholiques s’en réjouissent et l’appuient.

Heureusement ce n’est qu'une minorité de catholique imbéciles ou traîtres, minorité très infime, mais secondée avec force et trompette, ou plutôt précédée par des journaux et la télévision qui sont toujours du côté du diable et de son église, la Franc-maçonnerie.

C’est absolument certain, et les Bérets blancs le savent, eux qui visitent les familles à l’année. C’est absolument certain que la presque totalité de la population considère le Ministère de l’éducation comme un grand malheur pour la province de Québec puisqu’il sera la porte grande ouverte à la dictature, à la neutralité et à l’athéisme, puis au socialisme communiste. Et les parents sont catégoriquement opposés au bill 60. Et si leur voix est moins forte que celles des amis du bill 60, c’est parce qu’elle n’est pas amplifiée par les hauts parleurs de la propagande.

Le ministre Gérin Lajoie est le grand prêtre du bill 60. Et voyant que son projet est violemment attaqué, il s’est résolu à entreprendre des tournées de conférence dans toutes les régions. Il a déjà visité la Gaspésie, le Lac Saint Jean, l'Abitibi, les Cantons de l’Est.

Les journaux soutiennent de leurs rapports et leurs éloges, le prosélytisme de Gérin Lajoie. Ils qualifient de réussite ces notoires fiascos. Ils photographient le ministre avec des ecclésiastiques de tout grade et des religieux et religieuses. Ils montent en épingle les propos favorables au bill 60 et ils oublient de mentionner comment le ministre fut assailli de questions à certains endroits et de mentionner le dégoût des auditoires devant les réponses du ministre.

Nous revenons de la Gaspésie. Nous avons recueilli sur place certains renseignements à ce sujet. A des endroits, une poignée d’enfants pour recevoir le ministre. D'autres fois, des femmes qui allaient aux assemblées pour jeter leur colère à la face du ministre. Les mères de famille savent ce que valent les autobus scolaires ou l’on empile les enfants les uns sur les autres, les traitants comme du bétail. C’est un avant-goût des fourgons de l’armée ou les petits conscrits de l’école d’aujourd’hui seront entassés quand ils seront assez grands pour être des conscrits militaires.

A Mont-joli le président sortant de la chambre de commerce, monsieur Julien Bouchard, ne s’est pas gêné pour exprimer au ministre son parfait désaccord sur la centralisation des commissions scolaires : "Jusqu’à ces toutes dernières minutes", a-t-il dit, "j’aurais cru que vous alliez réellement décentraliser l’enseignement. Maintenant je ne sais plus que penser !" dit monsieur Bouchard au ministre. Monsieur Guy d’Anjou, le nouveau président la chambre de commerce, a secondé monsieur Bouchard en disant : "Une unité plus petite de commission scolaire signifie une meilleure administration et peut mieux faire le travail." Et monsieur Benoit, président de la commission scolaire de Mont-joli, est pleinement d’accord avec monsieur Bouchard et d’Anjou.

A Rimouski, le ministre fut soumis à la torture interrogatoire par les éducateurs, par des chefs d’organisation, par des parents et par le maire de Rimouski. A cette assemblée, les commissaires d’écoles avaient beaucoup de choses à demander au ministre. Mais découragés par le parti pris du ministre qui est gagné à une cause au lieu de chercher à connaître la pensée du peuple, les commissaires ont capitulé. L’un d’eux, un commissaire de Luceville a déclaré qu’il savait que toutes les décisions étaient prises à l’avance, qu’elles sont irrévocables et qu’une réunion de ce genre donne peu de résultats si ce n’est qu’elle procure au ministre l’occasion de faire valoir son point de vue et soigner sa popularité.

A Amos, Abitibi, un président de commission scolaire a exprimé devant le ministre son inquiétude que le Québec ait un gouvernement socialiste ou même communiste dans 20 ans. Et son inquiétude était partagée par toute l’assistance. Le ministre a été obligé de sortir sa théologie, et sa foi énorme en la démocratie comme il dit, je crois en effet que sa foi en la démocratie est plus grande que sa foi en l’ordre naturel établi par le Créateur qui donne l’autorité aux parents et à l’Église en matière d’éducation des enfants. Le sens démocratique à la sauce soviétique est plus fort que le sens théologique chez Gérin Lajoie, il y a longtemps qu’on le sait.

A Chicoutimi, Gérin Lajoie a subi la question du supérieur du séminaire de Chicoutimi qui lui a servi les grandes objections au bill 60. Le ministre était très embarrassé et ses réponses ne furent comprises de personne. C’était sans doute mieux pour le ministre que personne ne comprenne.

Il est évident que plus Gérin Lajoie multiplie les conférences à travers la province, plus éveillée est l’opinion contre le bill 60 et plus nombreux sont ceux qui s’expriment contre le bill. Notre population voit bien qu’on lui prépare un coup sale avec le bill 60. Elle sent que tout son passé de culture et de richesse est mis en jeu. Qu'une dictature scolaire est en voie de réalisation pour préparer la dictature économique.

D’ailleurs c’est Gérin Lajoie lui-même qui le dit : "la planification scolaire préludera à la planification économique". Les projets du ministre s’inscrivent dans le contexte d’une planification intégrale, dit le ministre.

Gérin Lajoie a annoncé que la Gaspésie avait été choisie comme région pilote de la planification scolaire au Québec afin de coordonner son travail avec des études poursuivies par le conseil d’orientation économique et les autres ministères, ainsi parle le ministre.

Il faut comprendre, mes amis, que la planification scolaire c’est le chemin de la planification économique. La planification c’est l’étatisation, le socialisme, le communisme. Et il faut comprendre que c’est la Gaspésie qui sera la première socialisée à tout point de vue. Elle sera la région pilote, le champ d’expérimentation de cobaye choisi. Il faut comprendre que Gérin Lajoie prépare le terrain à René Lévesque, que les enfants seront soumis à la dictature scolaire de Gérin Lajoie, qui les enverra à l’école de son choix pour apprendre ce que le ministre aura lui-même décidé. Ces mêmes enfants, quand ils auront fini leurs cours, seront orientés par Gérin Lajoie vers la dictature de René Lévesque qui a son tour les orientera de force dans tel ou tel secteur d’économie, à tel ou tel endroit désigné par le ministre encore. Il faut comprendre, mon ami, que votre Jean de 5 ans, dans un 1 an, sera forcé d’aller à telle école désignée par le ministre. L’école est actuellement obligatoire, vous le savez et c’est l’école reconnue par le ministre qu’il faut fréquenter. A 12 ans, votre Jean sera orienté vers tel ou tel cours défini par le ministre. Quand il aura 18 ans, c’est encore le ministre qui choisira quelle profession, quel métier Jean devra embrasser. A la sortie des études, c’est René Lévesque ou son semblable qui s’emparera de votre Jean pour lui dicter sa carrière, le lieu où il l'exercera et les conditions de travail.

Vous avez compris, mes amis, qu’une planification qui se respecte ne saurait se dispenser de régler tous ces détails pour votre Jean. Vous le père de famille, vous n’aurez rien à dire là-dedans, votre Jean ne vous appartient plus. Il est conscrit par l’école, conscrit par l’économie. Entre temps il peut aussi être conscrit par l’armée. Vous le père de famille, ça ne vous regarde plus. Vous n’avez qu’à payer la note et à vous taire.

En Russie, on appelle ça le communisme. Au Québec, on appelle ça la planification. Et sans doute qu’au Québec comme en Russie, les réquistes, les insoumis, les récalcitrants, les insubordonnés seront jugés traitres à l’État et déportés au Pôle Nord sans procès pour y rejoindre leur frère de civils. Au pôle Nord comme en Sibérie, il y a de riches minerais à exploiter et les gros capitalistes communistes ne pourraient trouver la main-d’œuvre nécessaire si les Kroutchev et les planificateurs ne se chargaient pas de leur fournir des prisonniers politiques, même des prisonnières. Ce sera donc le communisme au Québec, un communisme auquel il ne manquera rien, pas même l’athéisme. Le ministère de l’éducation est tout ce qu’il y a le plus adapté pour élever des générations sans religion.

N’oublions pas d’abord que ce sont les Francs-maçons qui le veulent le ministère de l’éducation. Ils savent bien son importance pour tuer la religion. L’exemple de la France est typique sur ce point, depuis que l’état contrôle l’instruction en France, les écoles sont de plus en plus neutres et les générations de moins en moins croyantes. Gérin Lajoie a beau s'esquinter pour calmer les appréhensions, il a beau promettre que notre confessionnalité ne sera pas sacrifiée, les ennemis sont prêts à se servir de cette arme merveilleuse qu’est un Ministère de l’éducation pour chasser la religion des écoles.

Déjà le Mouvement laïc de langue française proteste contre un sous ministre catholique et un sous ministre protestant comme le promet Gérin Lajoie pour sauvegarder les confessionnalités. "Il est odieux", déclare ce mouvement laïc, "il est odieux de rendre l’accession à un poste publique conditionnel à la profession de foi religieuse des citoyens." Et le mouvement laïc propose la nomination d’un seul sous ministre qui ne sera qu’affublé, ainsi parle la presse, qu'il ne sera affublé d’aucune étiquette confessionnelle, disent-ils. Il demande au mouvement, également, d’éliminer l’exigence de la profession de foi comme condition d’éligibilité au conseil supérieur de l’éducation. Le mouvement laïc déplore que le bill 60 consacre la confusion des pouvoirs civils et religieux, qui depuis si longtemps, dit-il, empoisonne chez nous aussi bien le climat de la liberté de conscience que les valeurs religieuses elles-mêmes. Ainsi parle le mouvement laïc de langue française.

Et chose curieuse, le mouvement laïc parle de confusion des pouvoirs civils et religieux et Gérin Lajoie dit, ce sont ses paroles : "Qu’on risque beaucoup en confondant les ordres de gouvernement ; le civils et le religieux". Les deux ont le même langage et la conclusion du ministre est exactement celle du mouvement laïc. Il dit : "Il faut enlever l’éducation à la surveillance de l’Église pour la soumettre au contrôle de l’État afin de ne pas confondre les deux pouvoirs". C’est étrange que Gérin Lajoie et le Mouvement laïc veuillent transmettre l’éducation de l’Église à l’État.

Pourtant, l’éducation est affaire spirituelle ! n’est-ce pas l’Église qui doit voir au spirituel ? Et l’État est chargé du temporel. S’il ne faut pas confondre les deux pouvoirs spirituel et temporel monsieur Gérin Lajoie, il faut laisser à l’Église le soin de l’éducation et interdire absolument à l’État d’y mettre la patte.

Mais Gérin Lajoie a trouvé ses arguments chez le Mouvement laïc de langue française. Nous en étions sûrs, les laïcistes, les neutres, les sans-dieu auront plus d’influence sur le Ministère de l’éducation que les catholiques et les croyants. Les parents et éducateurs ont donc grandement raison de craindre comme la peste un Ministère de l’éducation et de s'y opposer de toute leur force. Cette cause de nos écoles vaudra tous les efforts qu’on mettra pour la défendre. Il faudrait même que quelques-uns parmi nous soient prêts à souffrir en martyrs pour cette belle cause.

C’est le Journal Vers demain qui vous a parlé mes amis !

Gilberte Côté-Mercier