Le mensonge monumental, c'est d'avoir crié par tout l'univers que les Alliés faisaient la guerre pour sauvegarder la liberté dans le monde, pour protéger les faibles, pour défendre l'indépendance et l'intégrité des petites nations.
On en a la preuve dans la manière dont les Big Three règlent le sort des autres. Parmi les Big Three, il semble y avoir un Big One, et le Big One n'est ni Roosevelt ni Churchill. Les deux alliés anglo-saxons s'inclinent devant l'ours russe lorsque l'ours russe met sa patte sur les nations à protéger.
C'est la morale soviétique qui fait la loi. Cette morale, aussi simple que brutale, est celle du Loup avec l'Agneau : "Je suis le plus gros et le plus fort, donc j'ai raison". Ce sont les propres termes de l'ancien chargé d'affaires russe à Londres, M. Sabline, dans une lettre à l'évêque anglican de Gloucester :
"La Russie est une grande puissance ; l'Estonie, la Latvie et la Lithuanie n'en sont pas. C'est pourquoi l'incorporation de ces trois pays par l'Union Soviétique est une mesure essentielle à sa qualité de grande puissance, qualité dont l'Union Soviétique n'entend pas du tout se défaire."
Et voilà qui règle le sort des trois États baltes.
Le cas de la Pologne est plus tragique encore. C'est pour aider cette nation héroïque contre l'envahisseur qu'on a jeté l'appel à la guerre sainte en 1939. Et que fait-on de la Pologne aujourd'hui ?
Lorsque l'Allemagne réclamait une lisière de la Pologne, en 1939, les puissances étaient en émoi : il ne fallait pas reculer devant la guerre la plus sanglante pour empêcher un tel crime. Mais lorsque la Russie s'empare de la moitié de la Pologne, en 1945, le conseil qui s'attribue la mission de régir la planète donne son imprimatur.
La bête qui dévore occupe le siège le plus solide au tribunal qui décide du cas de sa victime ; la victime n'a pas le droit de faire entendre sa voix.
Il fut un temps où Roosevelt et Churchill prenaient figure d'un Moïse descendant du Sinaï, lorsqu'ils sortaient des brumes de l'Atlantique avec une charte dans les mains pour un monde régénéré. Le compère Staline les a désauréolés avec la contre-charte de Crimée.
Voilà qui présage un beau dénouement pour la pseudo-croisade en défense de la civilisation et de la chrétienté !... Pauvre humanité, aussi, pour qui la Charte du Christ, ou de Rome, ne sonne que le creux, et qui place en tête de ses sauveurs deux francs-maçons et un bolchéviste !