Deux grands prélats africains nous ont quitté pour un monde meilleur

le jeudi, 01 mai 2014. Dans Hommage aux Apôtres décédés

Le cardinal Bernard Agré de Côte d’Ivoire
Mgr Joseph Befe Ateba du Cameroun

«En créant l’argent à partir de rien, les banques deviennent propriétaires de tout!»

– Cardinal Agré

Le cardinal Bernard AgréLe cardinal Bernard Agré

Au début de juin, en l’espace de 5 jours, Vers Demain a perdu deux amis précieux en Afrique (mais gagné par le fait-même deux puissants intercesseurs au Ciel): le 4 juin, Mgr Joseph Befe Ateba, évêque fondateur du diocèse de Kribi au Cameroun, décédait à l’âge de 52 ans, après une courte maladie. Il avait pris part à notre semaine d’étude de mars 2011 à Rougemont, et avait fait de très bons commentaires.

Le 9 juin, le cardinal Bernard Agré, de Côte d’Ivoire (et archevêque d’Abidjan de 1994 à 2006), décédait à Paris, où il était hospitalisé depuis environ deux mois. Il était âgé de 88 ans. Il était venu trois fois à Rougemont assister à nos sessions d’étude sur la démocratie économique en 2008 et 2009, et a fait ensuite un travail immense pour nous faire connaître à tous ses contacts en Afrique et à Rome; il a donc grandement collaboré à ouvrir l’Afrique au crédit social, car au-delà d’une cinquantaine d’évêques africains sont venus à Rougemont par la suite.

En juin 2008, en même temps qu’il prenait part au Congrès eucharistique international à Québec, le Cardinal Agré avait assisté pour une première fois à notre semaine d’étude à Rougemont sur le crédit social (ou démocratie économique). Étant très intelligent, il n’avait pas pris de temps à comprendre toute l’importance de notre combat. La deuxième journée des cours, il faisait la réflexion suivante: «Si j’ai bien compris ce que vous venez de nous révéler, en créant l’argent à partir de rien, les banques deviennent propriétaires de tout!» Il avait très bien compris en effet.

Dans un message à l’occasion du décès du cardinal Agré, le Pape François a écrit: «Le regretté cardinal s’est révélé un homme de Dieu passionné par l’annonce de l’Évangile et le développement humain et spirituel des personnes». Ayant collaboré avec quatre autres cardinaux à la rédaction du Compendium de la doctrine sociale de l’Église, le cardinal Agré était vraiment épris de justice sociale.

Nous avions été attirés par une intervention du Cardinal Bernard Agré à Rome, en 2004. En tant que membre du Conseil Pontifical Justice et Paix, le Cardinal avait parlé des banques en tant que mur infranchissable qui n’aidait pas du tout au développement de l’Afrique, et déclarait: «Ce n’est pas avec des taux d’intérêts de 17 à 20 % que nous allons pouvoir développer l’Afrique.» Il avait grandement raison! C’est cette intervention qui nous a poussé à inviter le cardinal à nos sessions d’étude à Rougemont, et il a tellement aimé l’expérience qu’il est venu trois fois.

En septembre 2008, le Cardinal Agré a composé la préface suivante pour notre livre La démocratie économique expliquée et 10 leçons:

Ce manuel des Propositions du Crédit Social en 10 leçons guide les animateurs des semaines d’étude et des rencontres à Rougemont. Avec les participants venus des continents d’Afrique, d’Amérique, d’Europe et d’Asie, j’ai eu le bonheur de prendre part à ces enseignements instructifs et bien animés.

Dans la ligne de Louis Even, fondateur de cette organisation fortement mariale qui tire ses thèmes majeurs de la doctrine sociale de l’Église Catholique, nous saluons la pertinence des traits saillants du Crédit Social qui appelle de tous ses vœux un monde social nouveau de justice et de charité.

Fort heureusement, le Compendium de l’Église Catholique offre en sa récente édition une source qui éclaire l’ouvrage que vous tenez entre vos mains en ces quatre visions fondamentales suivantes:

— Le respect de la personne humaine

— La recherche du bien commun

— Le principe de subsidiarité

— Et la solidarité

Les dix leçons du Crédit Social et le Compendium sont disponibles en plusieurs langues pour être des instruments précieux de réflexion personnelle et communautaire.

Nous sommes tous interpellés par la misère et la pauvreté récurrentes des peuples. Comment comprendre que l’on manque du nécessaire sur une terre plantureuse? Comment comprendre que des adultes et des enfants par millions meurent de faim et de malnutrition? Comment comprendre que des pays extrêmement riches croulent sous les dettes jamais remboursables si un système financier universel vicieux ne les retient en captivité, par un groupe de privés puissants, solidaires dans le mal?

L’espoir est permis de la libération des banques et des intermédiaires impitoyables. Cela prend des millions d’hommes et de femmes, éclairés, organisés, débordant de foi et d’amour qui se lèvent de partout pour crier leur ras-le-bol et construire un nouvel environnement national et international ou «personne dans cette famille humaine ne manquera du nécessaire vital.» (Benoît XVI, Deus caritas est.) Les Pèlerins de saint Michel ont commencé ce combat, il dure officiellement pour eux, depuis 70 ans. Le chemin est encore long.

Apôtres, hommes de foi, spécialistes, hommes de bonne volonté, levez-vous, c’est votre tour, n’ayez pas peur, le Christ est vivant et maître du temps et de l’histoire.

 


 

 

Voici des extraits des impressions de Mgr Joseph Befe Ateba (photo) à la fin de la session d’étude à laquelle il avait participé en mars 2011:

Mgr Joseph Befe AtebaJ’ai appris beaucoup de choses (durant cette session à Rougemont)... Ce que j’ai appris ici, avec beaucoup de délectation, c’est l’origine de l’argent, et les motivations qu’il y a derrière, parce que le système monétaire et le système bancaire pourraient apparaître au monde comme quelque chose de naturel... J’ai pu apprécier le complément d’information que j’ai reçu, les révélations sur le système monétaire et le système bancaire, et qu’il est possible de faire autrement,..

J’ai appris aussi beaucoup ici sur les mécanismes en vigueur dans le monde, et ce qui m’a fait le plus plaisir, c’est la proposition d’un nouvel ordre social, une autre possibilité ou moyen de faire autrement. Un nouvel ordre social libéré de la tutelle des grandes puissances monétaires et bancaires qui n’ont pas d’autre critère d’action que leurs intérêts. Ce n’est pas l’homme qui les préoccupe, ce n’est pas cela du tout. C’est en cela qu’ils diffèrent fondamentalement d’avec la doctrine sociale de l’Église.

Ce qui m’a plu aussi c’est la proposition de remettre le pouvoir monétaire et financier aux ayants droit légitimes: la société, le peuple, l’humanité; c’est ce que j’ai compris dans ce qui a été intitulé comme étant la démocratie économique, c’est-à-dire cette fin du monopole de la monnaie par ceux qui se le sont indûment attribué.

Tout au long des exposés, je n’ai pas cessé de me demander comment il était possible que cet enseignement prenne en Afrique. Pour moi l’inquiétude se trouve dans la conscientisation: comment faire descendre cette information au niveau du petit peuple, qui est la victime immédiate et lointaine de tout ce système...

Devant ces systèmes, ces puissances, même une pensée la mieux élaborée ne suffit pas pour attaquer le système, parce qu’il est sérieusement implanté. Il a tous les moyens — les moyens militaires, les moyens financiers, les moyens systémiques, les moyens politiques et diplomatiques… Quand on regarde cela, on se dit: «Qu’est-ce que le petit Crédit Social peut faire en face de tout ça?»

Mais nous avons des exemples dans la Bible. C’est dans ce sens que David s’est retrouvé en face de Goliath. Quand vous lisez l’histoire de David, vous voyez Goliath qui invoquait ses victoires, et qui disait à David: «Qui es-tu? Je peux t’écraser!» David répondait: «Je viens à toi au nom de Yahvé Sabaoth (le Seigneur des armées)!»... Et à la fin, c’est lui qui a eu le dessus. Donc ça pourrait se répéter, l’histoire de David et de Goliath.

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