Le «nouveau christianisme»

le mercredi, 01 janvier 1975. Dans Catéchèses et enseignements

Un Évangile selon Karl Marx

Il n'y a pas tellement d'années, surtout lorsque la seconde guerre mondiale approchait de sa fin, on parlait beaucoup de « nouvelle théologie ». Cela est maintenant dépassé. On parle aujourd'hui de « nouveaux christianisme » ; et on parle aussi de « nouvelle Église »

Tenons-nous en ici au « nouveau christianisme », qui se réfère à ce qu'il y a dans la religion de plus fondamental et de plus compromettant, et voyons ce que veut dire ce « nouveau christianisme » ; est-il nouveau au point de n'être plus vraiment du christianisme et d'être autre chose ?

Car dire qu'un christianisme est nouveau, c'est déjà dire qu'il ne vient pas du Christ, et de qui vient-il alors ? Celui qui accentue à l'excès ce qu'il y a de « nouveau » en théologie, peut se retrouver sans théologie aucune, et c'est pourquoi on entend parler d'anthropologie-théologie, qui fait passer l'accent du divin à l'humain, de sorte que cette théologie n'est déjà plus de la théologie, mais de l'anthropologie.

De ce « nouveau christianisme » se sont occupées récemment des publications catholiques aussi distinguées et aussi renseignées que « La Civilta Cattolica » (La Civilisation Catholique), de Rome, qui consacrait un éditorial à ce sujet. Et dans « La Croix » du 28 mai 1974, A. Wenger s'en faisait l'écho lui aussi. Selon lui, ce qui caractérise ce « nouveau christianisme », c'est son anthropocentrisme, la sécularisation, l'Évangile pur, une « nouvelle conception de l'Église» et une nouvelle conception du Christ aussi. Conceptions tellement nouvelles, qu'elles cessent d'être la théologie connue jusqu'à aujourd'hui, de sorte que pour eux, le Christ est déjà un autre « Christ » fort distinct de celui que l'Église nous a transmis.

Dans ce « nouveau christianisme », on pratique une inversion ou une falsification des valeurs. Là où on disait : « Dieu et l'homme », ils prétendent qu'il faut dire : « L'homme et Dieu ». Pour eux, le mot-clef, le premier mot du christianisme, ce n'est plus l'amour de Dieu, mais l'amour du prochain. Il est connu de tous qu'Urs Von Balthasar en faisait finement le reproche à Karl Rahner, qui est l'un des promoteurs de ce « nouveau christianisme » qui s'inspire davantage du philosophe Heidegger que du Christ. Pour Karl Rahner, bien entendu, Heidegger doit remplacer les scolastiques pour expliquer le christianisme, et par conséquent, pour exposer la théologie.

Tandis que le christianisme « ancien » ou traditionnel mettait l'accent sur le salut éternel dans la vie future, le « nouveau christianisme », lui, met l'accent sur la libération temporelle, le bien-être terrestre. Selon lui, le règne de Dieu doit se réaliser ici-bas. D'après lui, le règne de Dieu consiste essentiellement dans la libération de l'homme de toutes ses aliénations : il faudrait libérer l'homme de ce qui l'empêche d'être lui-même, de Dieu, du péché — qui est surtout, collectif, disent-ils — du péché logé dans les structures sociales. Ce qui explique que ces « nouveaux chrétiens » optent pour le socialisme.

D'après eux, le message des béatitudes ne doit pas être compris comme un message d'espoir en un Au-delà, ni un message de résignation, mais comme une invitation à rompre les chaînes, à la révolte, à la violence. À les croire, la première chose à faire serait de détruire la « violence institutionnalisée », dans laquelle se classent pour eux toute autorité et toute loi. Ni hiérarchie ni discipline; mais le prophétisme et la liberté sans limite.

Que dire de tout cela ? La conclusion est très simple : que ce « christianisme » n'est plus un christianisme lu selon les quatre Évangélistes et selon l'Église, mais selon Karl Marx. C'est par conséquent du marxisme, et non pas du christianisme.

Guy Thibault

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