Pas de Staline dans nos maisons

Gilberte Côté-Mercier le jeudi, 15 février 1945. Dans Conscription

Causerie donnée à CHRC, par Mlle Gilberte Côté, le dimanche 29 janvier.

Le contrôle du logement

Depuis le mois de décembre dernier, le Staline du Canada, le grand rationneux du pays, le tout-puissant Sieur Donald Gordon, travaille à nous imposer ce que nous aurons eu de plus dictatorial et de plus effronté en fait de mesure de guerre — le contrôle absolu du logement.

Les villes de Victoria, Vancouver, Winnipeg, Toronto, Ottawa, Halifax, viennent de se sou­mettre à un Régisseur du logement.

La ville de Hull a demandé à Ottawa de lui en donner un.

La ville de Montréal a bien failli l'accepter la semaine dernière. Le maire Borne, de la ville de Québec, a fait venir M. Lobley d'Ottawa, pour voir au cas de la ville de Québec. Voudrait-il que les citoyens libres de la ville française aient eux aussi le privilège d'être attachés jusque dans leurs foyers par les pouvoirs tyranniques d'un Régisseur du Logement ?

Les pouvoirs du Régisseur

Un Régisseur dû logement, qu'est-ce que cela ?

C'est un homme, nommé par Ottawa, par la Commission des Prix ou par la municipalité, peu importe, c'est un homme qui, en vertu de l'arrê­té ministériel fédéral C.P. 9439, a tous les pou­voirs sur le logement des citoyens de la ville où il exerce ses fonctions.

Tous les pouvoirs, cela veut dire : le pouvoir d'envoyer un représentant nommé par lui, dans nos maisons, pour les visiter, les inspecter dans tous les petits coins, nous dire que c'est trop grand pour nous, nous forcer à accepter des chambreurs — et les chambreurs désignés par le Régisseur lui-même et à ses conditions — le pou­voir de faire changer de maison tout locataire et même tout propriétaire, et d'imposer à chacun tel logis, enfin le pouvoir absolu sur notre façon de nous mettre à l'abri.

Tous les pouvoirs. Je les répète en les énumé­rant :

    1) Pouvoir de faire des enquêtes dans toutes nos maisons, par des personnes choisies par le Régisseur. Enquêtes sur la grandeur, l'utilisation et les services de tout logis.

    2) Pouvoir d'entrer dans toutes les maisons qu'il désirera, pour les inspecter, les examiner et y exercer ses fonctions.

    3) Pouvoir de prescrire lui-même la manière d'utiliser les maisons, et de défendre de les utili­ser pour telles choses désignées par le Régisseur lui-même.

    4) Pouvoir de faire faire tous les changements possibles et impossibles à nos maisons.

    5) Pouvoir de terminer et changer tout bail en aucun temps.

    6) Pouvoir de forcer tout propriétaire à louer à ceux que le Régisseur désignera et aux condi­tions dictées par le Régisseur.

    7) Pouvoir de prendre possession de n'impor­te quelle maison et de l'utiliser de quelque ma­nière que ce soit.

    8) Pouvoir de faire exécuter par le shérif tous les mandats du Régisseur.

    9) Pouvoir de transférer des habitants d'une maison dans une autre maison, au gré du Régis­seur.

    10) Pouvoir d'ordonner à tout propriétaire de rendre habitable tel abri désigné par le Régis­seur.

    11) Pouvoir de faire punir de $5,000.00 d'a­mende et de 2 ans de prison toute personne qui manquera à ces règlements.

Violation des foyers

Cette ordonnance signifie que personne ne sera plus maître chez lui. C'est le gouvernement qui prend possession entière des maisons des proprié­taires et des logis des locataires.

Nos foyers seront violés,. On pourra nous im­poser des chambreurs du goût du Régisseur —juifs, anglais, païens, débauchés, contaminés, vo­leurs ou espions — et nous serons obligés de les supporter sous peine de prison ou d'amende, ou des deux à la fois.

Voilà, citoyens du Canada où vous en êtes, en la mil neuf cent quarante-cinquième année du christianisme.

Cela ressemble bien plutôt à du paganisme, à du communisme, qu'à du christianisme, n'est-ce pas ? Et nos maisons auront plus l'air d'étables que d'abris d'hommes libres.

Et de là à faire envahir les presbytères et les maisons religieuses et à en chasser les habitants, il n'y a qu'un pas à faire. D'ailleurs, l'ordonnan­ce telle qu'elle est le permet. Ceux qui violent la sainteté de nos foyers ne doivent pas être bien scrupuleux vis-à-vis des maisons du bon Dieu.

— Oui, mais dit-on, il faut bien loger ceux qui sont dehors !

— Certainement, il faut loger ceux qui sont dehors. Nous en sommes, et depuis longtemps nous, les Créditistes. Mais, pour loger les hom­mes, on n'a pas le droit d'en faire des bêtes.

Une visite chez vous

Par exemple, voici le représentant prochain de monsieur le Régisseur, représentant éloigné de Staline Gordon. Il entre chez vous et vous dé­clare que, d'ici un mois, vous devrez déménager et aller habiter tel logis, de trois pièces, à tel nu­méro de telle rue.

— Mais, monsieur, dit la femme, j'ai mes rai­sons pour rester ici.

— Vos raisons ne comptent pas, madame.

— Mais au contraire, elles sont bonnes, mes raisons, monsieur.

— Je n'ai rien à y voir, madame. Le jugement du Régisseur est irrévocable. Vous déménagerez dans le délai fixé, ou bien vous serez expulsée par le shérif et mise en prison.

— Mais, monsieur, mais......

— Au revoir, madame, j'ai une autre victime à étrangler. D'ailleurs, cette loi est pour le bien de tout le monde. Si vous n'êtes pas comprise dans "tout le monde", tant pis pour vous.

Le mépris de la liberté

L'on voit d'ici toutes les injustices, toutes les faveurs de patronage, tout le marché noir, tout l'argent gaspillé à graisser Pierre, Jean, Jacques, en un mot toute la corruption de la dictature.

Et cela, affiche-t-on,, en vertu du grand prin­cipe de loger ceux qui sont dehors.

En vertu de ce principe, on oublie la nature li­bre de l'homme. C'est pourtant un grand princi­pe, celui-là aussi !

La liberté de choisir son genre de vie pour soi-même et sa famille, ça, c'est voulu par l'auteur de la nature, Dieu même. Et nul mieux que Dieu n'a respecté la liberté de l'homme et des famil­les. Il laisse même les hommes se damner plutôt que d'entraver leur liberté. C'est donc que la li­berté a une grande valeur. Elle a une valeur spi­rituelle, une valeur d'éternité, puisque tous les es­prits sont libres, et que le Saint-Esprit est la li­berté même, puisqu'Il est l'Amour et que l'A­mour n'est pas fait d'autre chose que de liberté. On ne force pas l'amour. On ne forcera pas da­vantage le bonheur des nations. Les nations se­ront heureuses lorsqu'elles seront libres.

— Mais, c'est la guerre, dit-on encore !

— Si la guerre doit coûter si chère, si la guerre doit tuer notre nature d'homme, à quoi donc ser­vira-t-elle, la guerre ?

Pour loger, il faut bâtir

Et pour revenir à l'argument : il faut loger le monde. Nous ne connaissons qu'un moyen de lo­ger le monde, c'est de faciliter la construction de maisons.

Mais, loin de là, on entrave la construction par toutes sortes de restrictions toutes plus sévères les unes que les autres. Ensuite on dit que c'est une crise de logement. De même pendant la crise d'argent, on empêchait la fabrication d'argent et on disait que l'argent était rare.

Certes, nos administrateurs ont à faire face au problème du logement. Et il est grave. Et ils doivent le régler. Mais qu'ils le règlent comme des conducteurs d'hommes règlent un problème et non pas comme des porchers le régleraient.

Et si nos administrateurs sont eux-mêmes res­ponsables de l'état de choses actuel, qu'ils se frappent la poitrine et qu'ils réparent eux-mê­mes. Mais qu'ils n'étranglent pas toute une po­pulation pour faire expier leurs crimes.

Et puis, où sont les Régisseurs, les Gordons, les échevins, les députés, les maires, les partisans d'un Régisseur, qui seraient prêts à loger n'im­porte qui dans leur maison ?

Citoyens de la ville de Québec, levez-vous tout de suite, prenez la première famille dehors et aller la conduire dans la maison du maire Borne, par exemple. Et faites-la s'y installer. Je vous souhaite d'être bien reçus.

Veillons et agissons

Citoyens de la ville de Québec, vous ne vou­lez pas de Staline dans vos maisons ? Non ? Eh bien, tout de suite, prenez les moyens d'éloigner cette menace. Téléphonez à votre échevin, il vous est responsable de ce qui se décide à l'hôtel-de-­ville. Téléphonez à votre député fédéral, il est responsable de la machinerie à Gordon ; à votre député provincial, dont le rôle est de faire res­pecter les droits civils des citoyens. Citoyen, dé­fends ton foyer, menacé dans ce qu'il a de plus sacré, son intimité.

Et vous, Canadiennes, vous les braves femmes de chez nous, vous les gardiennes de nos foyers, entendez bien, il est menacé très sérieusement, votre foyer. Qu'allez-vous donc faire ? Envoyez votre mari à la guerre contre les financiers, à la guerre contre les dictateurs ici même, au Canada, contre les dictateurs qui veulent s'établir dans votre propre ville.

La Ligue des Propriétaires de Montréal et l'Union Créditiste des Électeurs ont jeté l'alarme dans la population de Montréal.

Et les conseillers de Montréal ont rejeté le régisseur, malgré que la plupart d'entre eux étaient d'abord favorables à l'idée, sans avoir pris connaissance du texte de l'ordonnance, et malgré que le Comité Exécutif avait recommandé d'a­gréer le Régisseur. Les membres mêmes de ce Comité Exécutif, qui avaient préconisé le Régis­seur, ont voté majoritairement contre le Régis­seur, après la pression faite par les électeurs aver­tis et mis en branle.

Mais la lutte n'est jamais terminée. L'adver­saire ne désarme pas. C'est ainsi qu'à Montréal, à peine la motion battue, le conseiller Buhay, communiste et ardent défenseur du Régisseur, a placé sur la table une nouvelle motion, deman­dant que Montréal se nomme un "administrateur de l'habitation". C'est le Régisseur qui a changé de nom, c'est le loup qui se fait agneau. Gare ! Aussi l'Union Créditiste des Électeurs est aux aguets, et elle suivra les développements de l'affaire.

Ne laissons pas surprendre notre bonne foi, et n'attendons pas que le coup soit effectué pour ouvrir les yeux. Nous recommandons à tous les créditistes, même à ceux qui habitent des cam­pagnes ou des villes non menacées, d'écrire à leur député. Toute la nation est en danger. Que des soldats se lèvent de partout.

Quant aux citoyens de la ville de Québec, com­me ceux de la ville de Montréal, qu'ils se tiennent au guet, qu'ils assistent aux assemblées du Con­seil de leur ville, et qu'ils ne se fient pas aux promesses qu'ils reçoivent. Les exploiteurs sont hypocrites, ils agissent sournoisement et revien­nent toujours à la charge, tant qu'ils n'ont pas gagné leur point.

La Nouvelle-France en avant

Debout, toujours et sans relâche, chère et ma­gnifique Union Créditiste des Électeurs. Tu es venue à temps pour sauver la Nouvelle-France. Tout le reste du pays, les provinces anglaises, ont accepté la dictature. Mais la province de Québec, qui a refusé la conscription des hommes, refusera la conscription du logement.

La province de Québec semble être le refuge de la liberté au Canada. Il faut qu'elle en soit la gardienne : Sa mission lui coûtera peut-être bien des forces et du sang. Mais, non, non jamais, la Nouvelle-France, fille d'une grande nation et si chrétienne, non, jamais la Nouvelle-France, fon­dée par des martyrs et des saints, non, jamais la Nouvelle-France n'acceptera dans son âme l'es­clavage que le Christ est venu combattre.

Les Créditistes font appel à tous les vrais fils de nos braves Canadiens français. Que tout notre peuple, autrefois si fier et encore si courageux, se lève comme un seul homme et fasse respecter l'étendard de la liberté de la personne humaine.

Gilberte COTE

Gilberte Côté-Mercier

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