On prive les Canadiens des conserves les plus fraîches de saumon ou de flétan. À eux les conserves vieillies ; les fraîches passent outremer. C'est sant doute parce qu'on manque de poisson en Angleterre. Pourtant la nouvelle suivante est publiée par un journal de Londres, le Daily Express du 29 juillet :
Poisson jeté — Plus de 500 caisses de poisson corrompu de Billingsgate (marché au poisson de Londres) ont été vidées dans des barges aujourd'hui et transportées, sur la Tamise, à une fabrique d'engrais chimiques. Beaucoup d'autre poisson pourrit, parce qu'on n'arrive pas à le vendre. Une compagnie a environ 30 quintaux de poisson corrompu à faire déblayer. Il semble y avoir dans le centre de Londres plus de poisson que le public en veut. Les hôtels et les restaurants n'ont pas le droit d'acheter plus de poisson que ne permet leur allocation par le Ministre de l'Alimentation. D'autres acheteurs en gros ne peuvent s'approvisionner de poisson au marché Billingsgate, parce qu'ils sont situés en dehors de la zone permise à ce marché."
On voit où conduisent les règlement de contigentements, de zonage, de rationnements, de restrictions. L'économie dirigée est un joli succès ! Et cela, dans la ville même où se trouve l'école qui forme les grands bureaucrates pour planifier le monde... Est-ce plus brillant avec les singes d'Ottawa ?
En Angleterre, où la nourriture est rationnée, même le poisson :
Le cas du poisson pourrissant au marché Billingsgate, à Londres, est posé au Ministre de l'Alimentation.
Le ministre essaie de renvoyer l'interpellation comme de peu d'importance. Il ne croit pas qu'il y ait eu tant de perte de poisson. Pourquoi en jetterait-on, dit-il, alors que les approvisionnements ne sont pas anormaux ?
On lui demande quelle quantité de poisson a dû être évacuée, faute de preneur.
Il répond qu'il faut s'adresser soit au Ministre de la Santé, soit au Surintendant des Marchés. Questionnés à leur tour, l'un après l'autre, le Ministre de la Santé et le Surintendant des Marchés répondent tous les deux : Demandez au Ministre de l'Alimentation."
N'est-ce pas qu'on dirait que cela se passe au Canada ?
Dès que quelque chose va bien dans son département, le politicien en charge se hâte de la proclamer et de le souligner : C'est grâce à ma bonne administration.
Dès que ça va mal dans son département, le même politicien se hâte de dire : Cela ne dépend pas de moi ; ça doit dépendre de tel ou tel autre.
En quoi politiciens, bureaucrates, banquiers et rationneux logent à la même enseigne.