Où va le poisson ?

le vendredi, 01 octobre 1943. Dans L'économique

On prive les Canadiens des conserves les plus fraîches de saumon ou de flétan. À eux les con­serves vieillies ; les fraîches passent outremer. C'est sant doute parce qu'on manque de pois­son en Angleterre. Pourtant la nouvelle suivante est publiée par un journal de Londres, le Daily Express du 29 juillet :

Poisson jeté — Plus de 500 caisses de pois­son corrompu de Billingsgate (marché au poisson de Londres) ont été vidées dans des barges aujourd'hui et transportées, sur la Tamise, à une fabrique d'engrais chimiques. Beaucoup d'autre poisson pourrit, parce qu'on n'arrive pas à le vendre. Une compa­gnie a environ 30 quintaux de poisson cor­rompu à faire déblayer. Il semble y avoir dans le centre de Londres plus de poisson que le public en veut. Les hôtels et les restau­rants n'ont pas le droit d'acheter plus de poisson que ne permet leur allocation par le Ministre de l'Alimentation. D'autres ache­teurs en gros ne peuvent s'approvisionner de poisson au marché Billingsgate, parce qu'ils sont situés en dehors de la zone permise à ce marché."

On voit où conduisent les règlement de conti­gentements, de zonage, de rationnements, de res­trictions. L'économie dirigée est un joli succès ! Et cela, dans la ville même où se trouve l'école qui forme les grands bureaucrates pour planifier le monde... Est-ce plus brillant avec les singes d'Ottawa ?

Fuite des responsabilités

En Angleterre, où la nourriture est rationnée, même le poisson :

Le cas du poisson pourrissant au marché Bill­ingsgate, à Londres, est posé au Ministre de l'A­limentation.

Le ministre essaie de renvoyer l'interpellation comme de peu d'importance. Il ne croit pas qu'il y ait eu tant de perte de poisson. Pourquoi en jet­terait-on, dit-il, alors que les approvisionnements ne sont pas anormaux ?

On lui demande quelle quantité de poisson a dû être évacuée, faute de preneur.

Il répond qu'il faut s'adresser soit au Ministre de la Santé, soit au Surintendant des Marchés. Questionnés à leur tour, l'un après l'autre, le Ministre de la Santé et le Surintendant des Mar­chés répondent tous les deux : Demandez au Mi­nistre de l'Alimentation."

N'est-ce pas qu'on dirait que cela se passe au Canada ?

Dès que quelque chose va bien dans son dépar­tement, le politicien en charge se hâte de la pro­clamer et de le souligner : C'est grâce à ma bonne administration.

Dès que ça va mal dans son département, le même politicien se hâte de dire : Cela ne dépend pas de moi ; ça doit dépendre de tel ou tel autre.

En quoi politiciens, bureaucrates, banquiers et rationneux logent à la même enseigne.

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