Le jeu du financier en politique

le vendredi, 15 mars 1940. Dans La politique

LE JEU DU FINANCIER EN POLITIQUE

Il n’y a pas que les journaux au service de la plume qui mène le monde. La haute finance se fait, non seulement aduler, mais servir par les politiciens de partis.

Les partis politiques sont la plus belle invention de la finance pour garder ses privilèges — tout en nous faisant croire que tout va selon notre volonté. On se défie moins.

La caricature ci-dessous exprime très bien le jeu du financier et la mystification du peuple. On a des marionnettes et on croit avoir des représentants.

Les gros intérêts privés financent les deux caisses électorales, celle des bleus comme celle des rouges. Comme c’est le gain de son élection qui intéresse le politicien, c’est la caisse qui parle. C’est le fournisseur de la caisse qui donne des ordres.

La meilleure preuve, c’est que nos députés, une fois élus, ne s’occupent plus de nous. Ils ne viennent jamais nous voir. Que nous ayons chaud ou froid, que nous ayons le ventre plein ou vide, que nos enfants soient bien soignés ou dans la privation, que nos femmes aient la vie agréable ou insupportable, que nos hommes travaillent ou chôment, les politiciens de partis ne s’en émeuvent pas. Les marionnettes n’ont ni cœur, ni intelligence.

On a eu des marionnettes ; bleues de 1930 à 1935 ; la crise n’a pas diminué. On a eu des marionnettes rouges de 1935 à 1940, quel changement a-t-on senti ?

Nous voici à une nouvelle élection. Les marionnettes de tous partis n’ont qu’un même refrain : conduire la guerre, oublier tout le reste. Est-ce bien savoureux pour le peuple qui a souffert et payé pendant dix ans ?

Si quelqu’un surgit et veut grouper le peuple pour la défense de ses intérêts, les marionnettes des deux partis se lèvent simultanément et l’accusent d’être un brouillon, de vouloir former un troisième parti. C’est le maître réel, le financier, qui donne ses ordres, les marionnettes ne font qu’obéir.

Le jour où les Canadiens et les Canadiennes, comprenant enfin qu’ils vivent dans une même société, qu’ils ont les mêmes intérêts, se joindront ensemble au lieu de se diviser, ce sera la fin du système de partis. Ce sera aussi la fin du règne du financier et le commencement de la reconnaissance des droits du peuple. Le financier le sait, et il s’efforce, par tous les moyens, d’entretenir la division en partis.

C’est son jeu, et c’est un jeu aussi méchant qu’hypocrite. Le peuple croit être en démocratie, parce que c’est lui qui a élu les marionnettes qu’il veut. Mais en réalité, il est sous la botte de celui qui mène les marionnettes.

Le financier, le banquier, le maître de l’argent, n’a pas la peine de se montrer. Il trouve des pantins pour faire son travail. Comme les pantins sont bien payés, ils emploient toute leur habileté à faire durer le jeu. Vous les entendez même dire que les partis sont l’essence de la démocratie.

Les députés sont des législateurs, donc, en principe, les édificateurs de l’ordre social. C’est une mission, un sacerdoce laïc. Ils devraient s’y préparer par l’étude, la méditation et la prière. Ils devraient être les plus grands éducateurs du peuple. Au lieu de cela, on a surtout des hâbleurs, des ignorants, des incompétents, des lâches ou des vendus.

Peut-on attendre autre chose des marionnettes ?

VERS DEMAIN 15 mars 1940 p5 1940_03_No10_P_005.doc

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