En marge du banquet Chaloult

le mardi, 01 septembre 1942. Dans Réflexions

"...Que ce réveil se manifeste par de l'action politique, ce n'est pas si mal, car il faudra toujours appuyer une politique quelconque. Mais, à mon avis, ça ne suffit pas. La politique est le tombeau des bonnes volontés : on n'y peut jamais faire tout ce qu'il y aurait à faire. Et pendant qu'on tient les yeux fixés sur des hommes, un programme et une date d'élection, on perd un temps précieux...

"Pour qu'une politique canadienne-française ait chance de réussite, il faut d'abord former des Canadiens français. Dame, ça parle tout seul. Et ceux qui ont apparu, il y a quelques années, sur la scène politique avec un programme de ce genre ont tout simplement disparu sous l'avalanche de l'incompréhension. Ils étaient venus trop tôt dans un monde mal préparé pour les recevoir. Tant mieux si c'est changé !

"Chaloult parle d'abattre le trust ? Ce serait bien le temps ; mais a-t-il formé des anti-trustards ? Croit-il que des textes de lois peuvent donner à eux seuls le coup de grâces ? Non, monsieur Chaloult, il faut des hommes et des organismes pour le combattre efficacement ! Autrement dit, il faut des moyens économiques pour lutter sur le terrain de l'économique.

,..."Pourquoi donc se moque-t-on tant de nous à travers le pays ? Pourquoi avons-nous si peu d'influence malgré nos protestations ? C'est parce que nous nous croyons incapables de faire autre chose que charroyer de l'eau. Mais le jour où nous prendrons en main notre économique, les politiciens nous feront des courbettes, tant il est vrai que l'économique gouverne la politique. Et l'économique, ça se reprend par l'action de la masse surtout et très peu par des lois. Chaque dollar détourné du trust fera plus pour nous que les plus grandes manifestations politiques. Et le trust le sait si bien qu'il nous tient dans le mirage de la politique pour nous faire oublier l'économique.

"Telles sont, Procule, les réflexions que je faisais après le célèbre banquet Chaloult. Certes, je trouve les élaborations de ce banquet magnifiques, mais nous aurions tort de nous croiser les bras en attendant des élections. La conquête économique ne souffre pas de retard. Et après, c'est bien simple, nous aurons la politique que nous méritons et les lois que nous aurons suscitées."

ALMANZAR (La Frontière, 20 août)

 

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