Un correspondant nous demande s'il est vrai, comme il l'a entendu dire, que le successeur d'Aberhart en Alberta, l'honorable Ernest Manning, a des tendances communistes.
Encore une de ces rumeurs et insinuations par lesquelles on essaie de miner la force toujours grandissante du Crédit Social.
L'honorable Manning continue l'œuvre de feu l'honorable William Aberhart, dans les mêmes droites lignes de la plus pure doctrine créditiste. Et on sait, ou l'on doit savoir, que le Crédit Social est l'exact opposé du Socialisme et du Communisme.
La formule créditiste, pour la sécurité sociale, est en même temps une formule de garantie de la liberté personnelle. Avec le Crédit Social, on n'a point à abandonner la moindre parcelle de liberté pour s'assurer du pain : l'existence du pain en abondance suffit.
Il n'en va point ainsi avec le communisme, ni même avec le socialisme d'État, bien établi en Russie et en Allemagne," et qu'on est en train d'édifier pierre par pierre au Canada.
Comme Hitler, les bâtisseurs du socialisme au Canada promettent pour demain du travail à tout le monde, même si l'État doit s'en mêler, afin que tout le monde puisse manger. Le travail forcé et le pain — les esclaves d'autrefois en avaient aussi l'assurance.
Pour en revenir à M. Manning, il continue à la radio les émissions hebdomadaires de son prédécesseur sur la préparation du monde d'après-guerre. Et, comme Aberhart, il ne manque aucune occasion de fustiger la tendance socialisante qui nous mène au monopole d'État, comme on peut s'en rendre compte dans le passage suivant de l'un de ses discours à la radio :
"Le mal de tout monopole, c'est la concentration du pouvoir entre les mains de ceux qui contrôlent le monopole.
"Remplacez un monopole privé par un monopole d'État : vous ne ferez que substituer à un certain groupe de contrôleurs un groupe encore plus important.
"Les employés de l'État en charge des industries nationalisées pourraient dicter eux-mêmes le genre de production, la quantité de production, le choix des employés, les salaires à payer et les prix de vente des produits.
"Pas de place pour des industries concurrentes qui s'efforceraient de mieux plaire au public : une seule autorité (celle de l'État) dirigerait toute la production.
"Les complets, les robes, les souliers, les maisons, sortant de l'industrie étatisée, ne seraient peut-être pas de votre goût. Tant pis pour vous, il n'y a pas d'appel contre l'État. Les conditions de travail qu'on vous imposerait, le montant de votre salaire, pourraient ne pas vous convenir ? Qu'y pourriez-vous ? Serviteur de l'État, vous n'auriez pas d'autre alternative que d'accepter les conditions faites par l'État.
"Mais, direz-vous, si le peuple n'est pas satisfait ; il n'a qu'à changer de gouvernement. Voyez donc la situation bien en face. Il s'agirait d'un gouvernement socialiste, d'un gouvernement employeur, d'un gouvernement patron détenant tous les pouvoirs. Ce gouvernement aurait en main l'industrie, le commerce et la finance. Comment échapper à son contrôle ? Il aurait le pouvoir de placer ses agents dans toutes les positions importantes. Ce serait le trust des trusts, maître de tous les gagne-pains, possédant en plus des trusts industriels le contrôle de la force armée et le contrôle du système monétaire.
"Avec un si vaste pouvoir concentré entre les mains d'un parti politique, que pourrait-on réellement faire pour s'en débarrasser ?...... Tout le pouvoir serait centralisé entre les mains de ceux qui contrôleraient ainsi simultanément l'industrie, la finance et l'organisation politique.
"Et pour administrer ce vaste monopole d'État, il faudrait installer une non moins vaste bureaucratie d'État. On peut s'imaginer un peu ce que serait cette bureaucratie, en considérant celle que le gouvernement d'Ottawa a établie depuis quatre ans pour contrôler l'industrie et le commerce en vue de la guerre.
"Ce que nous avons actuellement nous donne un avant-goût de ce que serait la bureaucratie d'un État socialiste. Ce n'en est pourtant qu'un échantillon. Qui donc aimerait à voir cet échantillon grandir et couvrir toute la vie politique et économique du pays ?"