Veillons sur le grain

le samedi, 15 juin 1946. Dans La vie créditiste

Il faudrait être naïf pour croire que le mouve­ment créditiste, qui va à l'encontre des puissances financières, à l'encontre de la corruption politique, à l'encontre de la poussée communiste, pourra fai­re son chemin sans que les adversaires essaient de le détruire.

Mais comme le Crédit Social est d'une logique irréfutable, et comme son objectif est sans tache, les adversaires n'ont pas grand'chance de succès à l'attaquer de front.

Il leur reste deux méthodes : laisser croire à la masse qu'il est sans importance, en lui donnant la place zéro dans les organes de publicité ; puis, tâ­cher de le saper par en dedans.

C'est contre la deuxième méthode que nous mettons nos amis en garde.

Il est si facile de se laisser tromper. Il suffit qu'une personne manifeste un peu de dynamisme, arrive comme un coup de vent capable de souffler dans les voiles du mouvement, pour que des non-avertis le saluent comme un envoyé de la Provi­dence. Sans doute que la Providence peut nous en­voyer et nous a déjà envoyé de telles recrues. Mais le diable et la passion ont aussi de ces instruments.

On n'en manque pas d'exemple. Même notre jeune mouvement a vu ses rangs infiltrés par des éléments indésirables qui se présentaient avec tou­tes les apparences d'une acquisition avantageuse.

Partout où on leur a confié avec trop d'empres­sement une partie des rênes, le résultat a été désas­treux et le mouvement a enregistré un recul.

Ainsi, en Colombie-Britannique, un élément communisant avait réussi, par son dynamisme et l'affichage de bonnes intentions, à occuper une pla­ce importante dans la direction provinciale. Cette année, il a fallu opérer une purge. Un comité d'en­quête a découvert que l'élément en question était en correspondance avec un groupe judéo-commu­niste étranger, commissionné pour détruire le mou­vement créditiste au Canada. Presque tout est à refaire en Colombie.

Au Manitoba, le mouvement est moins avancé qu'il y a un an, parce qu'on permit à un ambitieux d'en assumer la direction, même après qu'il eut fait montre de sa vanité à la Convention Nationale de Toronto. Tout est à recommencer aujourd'hui, avec cette difficulté de plus que les rangs sont di­visés. Celui qui, hier, présidait l'organisation cré­ditiste du Manitoba, combat aujourd'hui le Crédit Social et vilipende l'idée d'un dividende national. Il sait, mieux qu'un étranger de toujours, où et à qui aller pour jeter la confusion parmi les amis de la cause.

En Ontario, l'organisation n'est qu'à ses débuts, et déjà elle doit faire face à des problèmes internes, parce qu'un poste de commande avait été confié à un indésirable qui en imposait par une certaine compétence.

En Saskatchewan, la direction provinciale d'un mouvement encore dans l'enfance est obligée de signaler des gens qui se font passer pour créditis­tes, qui n'ont pourtant fait que nuire jusqu'ici, mais qui essaient de se faire valoir auprès des chefs de l'Alberta pour se donner du lustre dans leur propre province.

C'est bien de ce dernier stratagème qu'a essayé la petite clique de Pucerons de notre province. En étalant leur petitesse au grand jour, nous avons rendu service à tous les créditistes du Canada, sur­tout à ceux de l'Ouest que les Pucerons voulaient tromper.

Malgré des assauts de ce genre, plusieurs fois répétés, dès 1939, puis au printemps 1941, au prin­temps 1943, à l'automne 1945, notre mouvement québecois est resté compact et s'est développé plus vite qu'aucun autre mouvement analogue au mon­de. Pourquoi ? Sans doute, d'abord, à cause de l'ai­de du Ciel, que les créditistes ne cessent d'invo­quer. Mais aussi parce que nous avons eu soin, dans la province de Québec, de commencer par édifier l'Institut d'Action Politique, qui ne donne guère de chance aux éléments peu désirables.

Dans l'Institut, les promotions ne se font pas en additionnant des voix, ni sous l'empire du prestige, mais d'après des valeurs éprouvées. Et par valeur, il ne s'agit pas uniquement de compétence. Il s'agit par dessus tout de vertu, de désintéressement, de dévouement et de ténacité.

L'Institut sème dans la masse, mais il forme des hommes. Et ce sont ces hommes formés, bien plus attentifs à leur cause qu'à leur petite personne, qui sont à même d'organiser la grande Union des Électeurs et d'en faire autre chose qu'une agglomé­ration de bavards et de chicaniers.

Cela ne veut pas dire que les membres de l'Ins­titut soient des saints à canoniser. Non pas. Mais, dans l'Institut, ces hommes, tout imparfaits qu'ils soient, s'efforcent de mettre seulement le meilleur d'eux-mêmes au service de la cause.

Puis une certaine discipline, que les membres de l'Institut acceptent volontairement, protège l'Ins­titut contre les infiltrations nuisibles ; ou, si elles se produisent, on ne leur permet pas de faire long feu.

Les directeurs du mouvement seraient idiots d'agir autrement.

Puis, n'oublions pas que nous sommes en guerre : Au moins les créditistes actifs sont en guerre, en guerre contre des ennemis redoutables. Une armée en guerre deviendrait vite le jouet de ses ennemis, ou se débanderait elle-même, si ceux qui en font partie n'acceptaient pas une même grande ligne de conduite. Ce qui ne nuit pas du tout aux initiatives personnelles dans l'exécution des manœuvres lo­cales conformes à la stratégie générale.

Ce serait aussi une coûteuse expérience que con­fier la conduite des sections de cette armée aux premiers cocardiers venus. C'est ce qu'on refuse de faire dans l'Institut d'Action Politique.

Certains imbéciles, qui ne sont point de l'Insti­tut, peuvent appeler cela dictature. Ils ne connais­sent pas le sens des mots. Nous appelons cela de l'ordre.

D'ailleurs, on juge l'arbre à ses fruits. Or, l'Ins­titut d'Action Politique, après avoir formé et en continuant de former des hommes et des remueurs d'hommes, est en voie d'établir dans la province l'Union des Électeurs, l'organisation la plus démo­cratique que le Canada ait jamais connue. Encore, ici, faudrait-il s'entendre sur le véritable sens du mot démocratie.

Laissons critiquer, et continuons de veiller sur le grain.

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