L'I.A.P. et l'Union des Électeurs

le dimanche, 01 juillet 1945. Dans La vie créditiste

L'Union Créditiste des Électeurs est le corps organisé par les créditistes pour amener la politi­que à servir les citoyens.

Ce sont les électeurs eux-mêmes qui, organisés, peuvent s'exprimer en tout temps sur les ques­tions qui doivent être réglées en fonction de la volonté prépondérante de la population.

Mais une telle organisation ne peut ni s'établir ni se maintenir toute seule. Il faut des hommes qui s'en occupent : des hommes éclairés et actifs. C'est le rôle de l'Institut d'Action Politique.

Nous avons déjà comparé le rôle de l'Institut d'Action Politique au milieu des électeurs, au rôle du clergé au milieu des catholiques. La compa­raison est juste. Le catholicisme n'irait pas loin sans le ministère constant du clergé. Il en est de même d'une union d'électeurs : elle ne se forme­rait pas et elle s'écroulerait vite, ou dévierait vite de sa voie, sans l'action constante d'un corps com­me l'Institut d'Action Politique.

Les membres du clergé sont des catholiques, appelés par vocation, préparés et entraînés d'une manière spéciale convenant à leur mission. Ils restent avec la multitude des catholiques, pour la conduire, pour l'élever, et non pas pour se laisser dominer par les passions qui montrent souvent la tête au sein de la masse.

De même, nos membres de l'Institut d'Action Politique sortent des rangs des électeurs, mais sans se dissocier d'eux. Ils se renseignent et s'en­traînent d'une manière spéciale, pour accomplir leur fonction : éclairer, organiser et guider les autres. Ils ne dominent point à la façon des poli­ticiens, parce qu'ils placent la noblesse dans le service. Mais ils ne se laissent point non plus do­miner et conduire de travers par les passions poli­tiques qui montrent trop souvent la tête au milieu de la foule.

L'autre manière

Il y a bien des politiciens qui ne croient pas à cette manière, surtout qui n'ont point envie de se dévouer pour aller au peuple autrement que pour récolter des honneurs.

On trouve même des gens qui se disent créditis­tes, et qui nous blâment de ne pas copier les ma­nières des politiciens.

Ne parlons pas pour le moment des machines électorales, ni des caisses de corruption.

Sans aller jusque-là tout de suite, il en est qui s'imaginent pouvoir éduquer et organiser l'électo­rat par des comités à discussions et à votes. C'est bien cela qui serait le nouveau !

Allez dans une paroisse. Prenez dix hommes et dites-leur : Nous voulons tuer les partis politiques et établir une politique nouvelle ; nous voulons casser la dictature d'argent et établir l'économie d'abondance du Crédit Social.

Puis dites à ces hommes : Maintenant, réunis­sez-vous, payez une contribution annuelle d'un dollar et votez pour vous choisir un président, un vice-président et un secrétaire.

Si vous croyez avoir fait quelque chose pour votre pays après cette petite opération, vous vous mettez les dix doigts dans les deux yeux. Le fait de voter pour un président lui confère-t-il une once d'énergie ou de compétence ?

S'il s'agissait d'honneurs à distribuer, sans con­sidération de mérites, et que vous n'eussiez d'hon­neurs que pour un seul homme, le vote pourrait être la manière de trouver le bénéficiaire. Tirer à la courte-paille serait une autre méthode à peu près aussi bonne.

Mais s'il s'agit de travail à faire, demandez donc simplement : Qui va se lever pour faire telle ou telle chose ?

Et comme le travail à faire ne manque pas, si chacun des dix se lève, tant mieux : donnez du travail à faire aux dix.

Si vous voulez savoir lequel serait le plus com­pétent pour recevoir le programme de la place et attribuer à chacun sa part, ne le demandez pas au vote. Le vote pourra vous dire lequel jouit du plus de prestige ; mais qu'est-ce que ce prestige a donné jusque-là ?

Donnez vous-même une part de travail à cha­cun, et vous découvrirez vite qui a du cœur et de la ténacité.

A-t-on jamais trouvé de bons prêtres, ou de bons soldats, ou de bons colons, ou de bons bû­cherons, en faisant voter pour qui va être prêtre, ou soldat, ou colon, ou bûcheron ?

C'est pourtant cette manière-là, la manière des comités avec officiers élus, que quelques-uns voudraient nous suggérer pour faire l'éducation poli­tique du peuple.

C'est plus facile, disent-ils. Oui : c'est toujours plus facile de piétiner que d'avancer.

Les résultats parlent

Considérez ce qui s'est fait pour le Crédit Social et pour la formation politique de citoyens dans la province de Québec, et dites si cela s'est fait par des votes ou par du travail.

Ouvrez les yeux et voyez les hommes qui bougent, qui bougent pour les autres en tout temps et non pas ceux qui bougent pour eux-mêmes en seul temps d'élection.

Puis dites lesquels de ces hommes sont le produit du vote.

Si l'on avait demandé à la population, ou même aux simples créditistes de Ste-Anne de Beaupré de voter, en 1940, pour qui aurait à faire des sa­crifices et à consacrer son temps et ses forces au service du Crédit Social, aurait-on jamais eu Gérard Mercier ?

Des centaines d'hommes, Défricheurs, Volti­geurs, Responsables, qui sacrifient aujourd'hui leurs dimanches, leurs soirées, leurs repos, et par­fois de grandes amitiés, pour se donner à leurs frères, y en a-t-il un seul qui le fait parce qu'on a voté pour qu'il le fasse ? Il aurait été insulté d'un tel vote. Il aurait répondu : Messieurs, je ferai bien les sacrifices si je veux ; et je les refu­serai si je veux.

Notre-Seigneur avait une grande mission à donner à une douzaine d'hommes, une mission qui impliquerait bien des sacrifices et se couronnerait par le martyre. A-t-il fait voter pour savoir qui recevrait la fonction ?

Nous pourrions multiplier ces questions et ces réflexions. Nous croyons que c'est assez.

Il ne s'agit pas là Évidemment de discréditer la démocratie ni de blâmer le recours au vote pour choisir les administrateurs entre différents candi­dats poussés par différents groupes : c'est une autre affaire.

Mais le mot "démocratie" signifie "puissance du peuple". La puissance ne sera jamais avec l'i­gnorance ou avec l'apathie. Et pour secouer l'apathie et chasser l'ignorance, il faut autre chose que des conseils tenus pour savoir qui des rats attachera le grelot au cou du chat. Il faut des hommes mus par l'idéal, soutenus par la charité, purifiés par le désintéressement et trempés par l'action.

Ces hommes-là, que le vote ne donne pas, l'Ins­titut d'Action Politique les forme, et seuls des hommes de ce calibre peuvent bien former, main­tenir et orienter une union d'électeurs dans les lignes de l'ordre et du bien commun.

Louis EVEN


Pour quelles têtes ce bonnet ?

À l'occasion de la Fête du Sacré-Cœur, Son Éminence a fustigé, à bon droit, mais sans les nommer, certains Instituts et certains journaux qui attaquent et déprécient le clergé, tout en disant respecter le catholicisme.

Nous apprenons que quelques créditistes crai­gnent d'avoir été visés par ces remarques de Son Éminence. Qu'ils soient bien tranquilles. Tous ceux qui nous lisent et qui suivent les activités de l'I.A.P. savent très bien que ni le journal Vers Demain ni l'Institut d'Action Politique ne donnent dans l'anticléricalisme. Nous savons même parfois encaisser des injustices isolées avec beaucoup de patience.

D'ailleurs, notre journal est inspecté à la loupe par des adversaires, et sa moindre faute serait magnifiée et placée sous les yeux de qui de droit. Puis, on peut être sûr que, lorsqu'il s'agira de notre journal ou de notre Institut, les

autorités ne se gêneront point pour les nommer. On en a déjà eu des preuves.

Son Éminence n'a nommé personne dans son allocution de la Fête du Sacré-Cœur : Mais pour quiconque est au courant, il est clair qu'il s'agis­sait de l'Institut Démocratique de Damien Bou­chard et du journal "Le Jour" de Jean-Charles Harvey. De grâce, laissons-leur ce bonnet-là.


L'I. A. P. et Vers Demain

C'est le travail constant et absolument béné­vole des Défricheurs, des Voltigeurs, des Anima­teurs de tous les milieux, qui a bâti la circulation du journal Vers Demain. Ce journal est donc l'œuvre de l'Institut d'Action Politique.

De fait, l'I.A.P. fut fondé en mai 1940, juste­ment dans le but immédiat de faire connaître et lire Vers Demain. Nous croyions alors, comme nous croyons encore aujourd'hui, qu'il est inutile d'espérer un meilleur ordre politique ou économi­que, à moins de commencer par l'éducation et de continuer par l'organisation.

L'Institut d'Action Politique s'est très bien ac­quitté de sa besogne. Dès la première année, il montait l'abonnement à 6,500 ; la deuxième année, à 25,000 ; la troisième et la quatrième année, il l'a porté et maintenu autour de 32,000 ; cette année, il l'a haussé à 44,000 et se propose d'aller beaucoup plus loin.

Le journal Vers Demain fut fondé par M. Louis Even et Mlle Gilberte Côté, à l'automne de 1939, avec pas un seul sou de capital. Ils ont bien fait leur part, mais à eux seuls, ils n'auraient jamais pu réussir cette merveille : un journal d'idées, vivant sans une seule annonce payée, et couvrant toute la province au bout de cinq années.

Il est donc juste de rendre hommage à l'Institut d'Action Politique, à tous ses Défricheurs et Vol­tigeurs, pour le succès de Vers Demain.

Propriétaire de Vers Demain

Lors de la fondation du journal Vers Demain, M. Louis Even en fut constitué le propriétaire légal. Mais M. Even est le premier à reconnaître que les véritables propriétaires d'une chose sont ceux qui la font. S'il admet sa part personnelle dans la création et le développement de ce petit journal, il proclame surtout la part qu'y ont ap­portée tous les membres de l'I.A.P.

Aussi n'attendait-il que l'incorporation de l'Ins­titut d'Action Politique pour remettre à l'Institut, de jure, une chose qui lui appartient de facto.

Dès la première réunion des directeurs de l'Ins­titut d'Action Politique après son incorporation, réunion tenue le 18 juin, il fut décidé d'opérer le transfert légal du titre de propriété. La chose sera faite ces jours-ci. L'Institut, devenu personne lé­gale, sera désormais le propriétaire du journal Vers Demain.

Il convient de souligner ici que le journal Vers Demain n'a jamais payé un sou de dividende à personne, pas même à ses deux fondateurs ; ce ne fut jamais une entreprise à profit. Ceux qui ont dû y consacrer tout leur temps ont Évidemment dû prendre sur les recettes le nécessaire pour vivre, comme dans toute entreprise même d'ordre religieux. Mais cela fait partie des dépenses cou­rantes. Aucune personne attachée à Vers Demain n'en a rehaussé du moindre degré, son niveau de vie matérielle : ce sont là des faits que n'importe qui peut constater de ses propres yeux.

Aussi, le transfert du titre de propriété, de M. Even à l'Institut d'Action Politique, ne coûtera pas un sou à l'Institut et ne donnera pas un sou à M. Even.

Tout cela peut paraître anormal ou insensé aux yeux de ceux qui n'ont jamais compris ce que c'est que vivre pour un idéal. Mais sûrement, nos membres de l'Institut, qui ont appris par la pratique à se donner pour le même idéal, sans ré­compense matérielle, n'y verront rien d'extraor­dinaire et jugeront que les choses devaient se passer de cette manière.

Leur Institut devient propriétaire reconnu du journal Vers Demain ; mais aucun des membres de l'Institut, pas même ses directeurs, n'en attend et n'en touchera un sou de dividende. Ils conti­nueront de se dévouer pour le journal qui est leur œuvre et leur propriété, et qui restera le meilleur instrument au service de leur idéal.

Surlendemain d'élection

Depuis l'élection du 11 juin, nous avons pu communiquer, de vive voix ou par lettre, avec nos candidats et leurs organisateurs, et recevoir leurs impressions sur la campagne électorale et son ré­sultat.

Disons tout de suite que pas un seul ne fait entendre une note de découragement. Le résultat était prévu.

Pas un seul, non plus, n'attribue la défaite à un manque d'argent. Tous auraient certainement pu employer très utilement plus d'argent, s'ils en avaient eu à leur disposition. Mais aucun ne croit qu'avec plus d'argent il aurait pu se faire élire.

Tous remarquent que les adversaires, surtout les libéraux et les soi-disant indépendants, ont dé­pensé beaucoup d'argent. Mais pas un de nos hommes ne voudrait gagner une élection en ache­tant les votes.

L'achat des votes est une chose plus courante qu'on est porté à le croire de prime abord. Il y a bien des manières d'acheter un vote. Ainsi, un bon créditiste d'une paroisse de Dorchester nous écrit que le candidat des électeurs, M. J.-Ernest Gré­goire, aurait eu la majorité dans sa paroisse si deux familles, qui se disent créditistes depuis longtemps, n'avaient pas trahi leur cause pour un avantage personnel matériel. L'une de ces famil­les, de 10 voteurs, a reçu $60.00 pour tourner le dos au Crédit Social le jour du vote. L'autre, de 11 voteurs, l'a fait pour obtenir un billet de loca­tion pour un octroi.

C'est un exemple. On nous en a signalé beau­coup d'autres dans la Beauce. Dans la Beauce et dans Dorchester, l'argent a roulé. Ce n'est pas en le faisant rouler en sens inverse que les créditistes veulent arriver à leur fin. Ils veulent nettoyer la politique, non pas s'y salir à leur tour.

Dans d'autres occasions, c'est la liberté des jeunes qui sert de rançon pour acheter le vote des parents. Telle famille créditiste de X..., dans le comté de Drummond, bien que créditiste, a voté libéral, par reconnaissance pour l'intervention du député libéral sortant à obtenir un sursis de ser­vice militaire pour le garçon de la famille. Il s'agit d'un fils d'industriel.

Par contre, dans la même place, une autre fa­mille, créditiste aussi, n'a pu avoir la même fa­veur parce qu'elle n'est pas vendable. Le fils, pourtant fils de cultivateur, est encore au camp militaire de Petawawa.

* * *

Tout cela mène à la même conclusion. Les ma­chines électorales sont des machines à corruption. Le moyen d'en triompher n'est pas d'en bâtir une de plus, mais de former des électeurs sur lesquels les machines électorales, de n'importe quelle cou­leur, n'auront aucune prise.

Nous remarquons que tous nos candidats des électeurs et leurs organisateurs abondent dans ce sens. Pas un seul d'entre eux n'a conclu : Notre méthode est mauvaise, montons une caisse au lieu de monter des hommes. Non. Tous ont conclu : Notre méthode est bonne, mais nous ne sommes pas encore avancés, nous n'avons pas encore un nombre suffisant d'électeurs inaccessibles aux in­fluences pour obtenir une majorité au scrutin.

Aucun de nos candidats battus ne se montre désappointé. Peut-être quelques-uns s'attendaient-ils à un peu mieux, mais tous auguraient le résul­tat général proclamé le soir du 11 juin.

*    *

Nous n'avons point participé à l'élection avec l'idée de gagner, mais avec le but bien arrêté de permettre aux créditistes de voter pour ce qu'ils demandent.

Tous les créditistes des 43 comtés ne se sont pas prévalus de cette faveur. Il en est qui ont en­core pensé qu'il fallait voter pour quelqu'un qui aurait des chances de gagner, au lieu de voter pour leur propre idée. C'est justement un signe qu'il reste une grosse formation d'hommes à faire.

Le Social Crediter d'Angleterre, organe officiel du Major Douglas, remarquait récemment, à pro­pos des élections qui se préparent en Angleterre :

"Si la chance ne lui en est pas fournie, l'électeur ne peut pas voter pour une ligne de conduite (policy). S'il vote pour des hommes de partis, il vote contre lui-même."

Nos candidatures des électeurs offraient aux électeurs la chance de voter pour une ligne de conduite bien claire en économique (le Crédit Social), et pour une ligne de conduite bien claire en politique (le respect de la volonté des électeurs dans toutes les grandes questions, à mesure qu'el­les se présentent). Ce n'est pas pour le candidat qu'ils votaient, mais pour la ligne de conduite re­présentée par le candidat, la seule ligne de con­duite disposée à faire sienne la volonté des électeurs.

Ceux qui l'ont compris continueront de le com­prendre. Il ne sera jamais question pour eux de retourner aux amorces des partis. Il reste à en augmenter le nombre : tout le problème est là. C'est un travail de permanence, pas un simple travail de campage électorale.

Même abstraction faite de la moralité ou de l'immoralité d'une machine à caisse électorale, il serait futile pour nous de vouloir rencontrer les adversaires sur ce terrain.

Dépensez $5 ;000, l'adversaire en trouvera $10,000. Mettez-y $10,000, il y mettra $20,000. Et les partis politiques peuvent toujours élever leur plafond bien plus vite et bien plus haut que des gens qui passent leur temps à dénoncer le monopole de l'argent et ses satellites.

Nous laissons volontiers aux organisations de partis la formule de la piastre et nous gardons la formule des hommes. La formule de la piastre peut encore l'emporter aujourd'hui et continuera sans doute de l'emporter, tant que la formule des hommes n'aura pas atteint un développement suffisant.

Mais le jour où la formule des hommes prendra le dessus, ce sera une victoire définitive. Les en­chères électorales entre les partis seront de l'his­toire du passé, de l'histoire d'un peuple enfant jouant à la démocratie.

Nous sommes les premiers à reconnaître que notre formule des hommes est encore faible. Sur­tout si, par hommes, nous voulons dire des hom­mes complets : des hommes qui savent et des hommes qui bougent.

Dans la Beauce, qui est bien le comté où la for­mule des hommes paraissait le plus avancée, le comté aussi où le résultat du vote créditiste a été le meilleur, il y avait sur pied plus de 800 hommes dans les derniers jours de la campagne électorale. Mais sur ces 800 hommes, à peu près 75 à 80 seulement sont des hommes habitués à l'action. Un grand nombre se sont trouvés débordés par des arguments et des manœuvres de dernière heure.

L'entraînement ne peut se prendre en quelques jours. C'est pourquoi nous ne pouvons guère éva­luer nos effectifs que d'après le nombre de ceux qui sont à l'œuvre en tout temps, à cœur d'an­née. Ceux-là sont aguerris, et pas un orage élec­toral ne leur fera tomber les bras.

Tous nos bons créditistes ont compris cela. Et c'est la flamme au cœur et l'esprit bien dégagé qu'ils continuent de se former et de former les autres.

C'est bien plus beau et bien plus durable de former des hommes que de gagner une élection. Les succès électoraux passent, les hommes de­meurent.

De l'argent provincial

De l'argent provincial ? Mais oui, par un systè­me de Maisons du Trésor, comme celui qui fonc­tionne en Alberta depuis 1938.

Le système consiste simplement à établir dans la province des succursales du Trésor Provincial, non pas pour prélever des taxes, mais pour aug­menter graduellement le pouvoir d'achat, le moyen d'échange en circulation parmi ceux qui voudront y recourir.

Supposez une Maison du Trésor établie dans votre paroisse. Vous y portez votre argent, pas seulement l'argent que vous voulez épargner, mais aussi et surtout l'argent que vous voulez dépen­ser. La Maison du Trésor met votre argent dans son tiroir. En retour, elle vous ouvre un crédit équivalent dans son livre de comptes.

Vous allez ensuite faire vos achats comme d'ha­bitude, mais :

1° Au lieu de payer le marchand avec de l'argent de banque, que vous n'avez plus, vous payez avec des mandats tirés sur votre compte à la Maison du Trésor. C'est bien la même chose pour vous, dès lors que vous obtenez la même marchandise. C'est aussi la même chose pour votre marchand, dès lors qu'il peut payer ses fournisseurs de la même manière.

2° Au lieu d'aller faire vos marchés n'importe où, chez n'importe quel juif ou magasin affilié à un monopole, vous choisissez de préférence les marchands qui, comme vous, veulent chasser l'ennemi de nos murs. Leurs magasins ont unn écusson affiché sur leur vitrine pour s'identi­fier. C'est un écusson fourni par le Trésorier provincial pour dire à tout le monde que ces magasins acceptent les mandats sur les Mai­sons du Trésor en paiement de leurs produits.

3° Dans ces magasins, vous donnez votre choix aux produits marqués du même signe. Appe­lez-les, si vous voulez, produits Nouvelle-France. Cela veut dire que ces produits sont fabriqués par des manufacturiers ou viennent de cultivateurs qui, comme vous, veulent chasser l'ennemi de nos murs.

4° Au bout du mois, le Trésorier, par l'intermé­diaire de la Maison du Trésor, vous donne une prime. Cette prime consiste en une augmenta­tion du crédit qui reste dans votre compte. Elle est proportionnelle au chiffre des achats de produits Nouvelle-France que vous avez faits pendant le mois. Par exemple, si la prime est de 5 pour cent et si vous avez acheté pour $100 de produits Nouvelle-France, durant le mois terminé, votre compte va être augmenté de $5.00.

Ces $5.00 ne sont pris dans la poche de per­sonne, ni dans le compte de personne, ni dans les taxes de la province. Ce sont $5.00 de crédit tout neuf faits par le Trésor de la province, tout com­me les crédits des banques aux gouvernements em­prunteurs sont faits aujourd'hui par la plume du banquier.

Mais il y a une grosse différence. Les crédits des banques créent des dettes qu'il faut leur payer ensuite. Tandis que les primes du Trésor créent un dividende qui vous est donné, que vous n'avez pas à rembourser et qui reste dans la circulation entre tous ceux qui se sont alliés au système.

C'est de l'argent Nouvelle-France, qui augmen­te avec la production Nouvelle-France. C'est vous qui, par votre choix de produits Nouvelle-France, avez provoqué l'augmentation de production Nouvelle-France, et c'est pour cela que vous êtes le premier récompensé pour cette augmentation. En vous vendant ces produits, le producteur sera récompensé à son tour. Pas de crise possible avec ce système, puisque l'argent Nouvelle-France marche au pas de la production Nouvelle-France ; pas de crise, au moins parmi ceux qui vivent de ces produits Nouvelle-France.

Voilà un mécanisme très simple, très avanta­geux, qui, à mesure que plus d'acheteurs, plus de marchands, plus de manufacturiers s'en servent, contribue à renverser la dictature de l'argent.

Que toute la province s'y rallie, il n'y a plus rien qui empêche l'argent de la province d'être au niveau des produits de la province et de commen­cer son cycle dans les comptes des citoyens.

Il n'y aurait plus besoin, alors, d'attendre, de courtiser et de favoriser le capital étranger, sou­vent de source très discutable, pour développer nos ressources naturelles avec les bras et les cer­veaux de chez nous.

Merveilleux, direz-vous ? Mais je crois bien : le droit sur l'origine de l'argent a donné un pouvoir de domination aux banques ; la reprise de ce pou­voir par le peuple libère le peuple.

C'est, en effet, la technique de l'ennemi dans nos murs, employé par les citoyens pour se libérer de lui. La technique est efficace. L'objectif de l'en­nemi était mauvais. La même technique, avec un objectif social, donne des résultats sociaux. C'est ce que font les Maisons du Trésor.

Si nous n'avons pas les Maisons du Trésor dans notre province, c'est parce que la province ne s'est pas mise sur pied pour les réclamer.

Expliquons partout, autour de nous, le système des Maisons du Trésor. Exposons les effets qu'on peut en attendre : c'est le moyen d'en créer la demande générale : la législation suivra nécessai­rement.

J.-Ernest GREGOIRE


Le Congrès remis

Nous sommes les premiers à regretter le désap­pointement de nombreux créditistes à la suite de l'interdiction des Congrès entre le 20 juin et le 20 juillet.

Le gouvernement n'a fait connaître sa volonté que le 18 juin. Or toute notre annonce était déjà faite, la salle du Palais Montcalm retenue pour les trois jours, la fanfare trouvée pour la parade, et le programme du Congrès rendu chez tous nos abonnés par le journal du 15 juin.

Nous n'hésitons pas à admettre l'encombrement des trains par le retour des soldats : nous sommes assez souvent témoins et victimes de trains en­combrés.

Mais on pourrait s'étonner que le gouverne­ment, avec toute sa bureaucratie, ne se soit rendu compte de l'acuité de la situation que deux jours avant la période couverte par l'interdiction.

Toutefois, le Congrès n'est pas supprimé. Il est reporté au 1er, 2 et 3 septembre. La Fête du Travail, du 3 septembre, fournit la même occa­sion que fournissait la fête de la Confédération célébrée le 2 juillet.

Nous pourrons même tirer profit du contre­temps, en intensifiant d'ici là nos organisations de comtés. Le congrès alors n'en sera que plus repré­sentatif et plus fructueux. Le programme restera le même.

Nous avons annoncé le changement dans le Message aux Créditistes, qui va à au moins une personne dans chaque paroisse et à tous les tra­vailleurs actifs, donc à tous ceux sur qui nous comptons pour un Congrès du genre du nôtre. Nous l'avons aussi annoncé à CKAC et à CHRC.

D'ailleurs, les quelques créditistes qui, non avertis, seraient quand même venus à Québec, pour le 1er juillet, n'auront pas été complètement désappointés, puisque ce jour-là, nous avons placé au programme une grande journée d'organisation, avec séances au Palais Montcalm.


Gérard Mercier & Roland Corbeil

Ceux qui connaissent Gérard Mercier et Roland Corbeil — et ils sont nombreux dans la province — ont certainement appris à les apprécier, tant pour leur compétence, que pour leur dévouement.

Nous avons divisé la province de Québec en deux grands districts, que nous appelons district de Québec et district de Montréal. Mais chacun de ces districts s'étend loin et couvre, le premier 42, le second 50 comtés provinciaux. Les quatre comtés de l'Abitibi et du Témiscamingue et les trois comtés du "royaume du Saguenay" font par­tie du district de Québec, ainsi que le continent gaspésien.

Le district de Québec est placé sous la haute responsabilité de Gérard Mercier, et le district de Montréal sous la haute responsabilité de Roland Corbeil. Chacun de ces deux grands chefs de dis­tricts dispose de commandants et de missionnaires pour l'aider.

Le travail continuera Évidemment d'être fait par les responsables locaux et régionaux à tous les degrés : dans les divisions de votes, dans les pa­roisses, dans les comtés. Mais les responsables des comtés depuis Berthier jusqu'au Labrador, au nord du fleuve, et depuis Lotbinière, Mégantic, Compton, Sherbrooke, jusqu'à la pointe de Gaspé, au sud du fleuve, seront heureux d'apprendre que leurs comtés se rattachent à la juridiction de Gérard Mercier. De même, les responsables des comtés de Joliette à la frontière de l'Ontario, au nord du fleuve, et de Nicolet, Arthabaska, Rich­mond, Wolfe jusqu'à la frontière de l'Ontario au sud, seront heureux d'apprendre que leurs comtés se rattachent à la juridiction de Roland Corbeil.

Quant à M. Louis Even et Mlle Gilberte Côté, ils sont aussi heureux de pouvoir se décharger d'une partie de leurs fonctions, devenues trop lourdes avec le grand développement du mouve­ment, sur des épaules en qui ils ont pleine con­fiance.

Cette division ne veut pas dire que Roland Corbeil ne sera jamais vu dans la division est, ni que la présence de Gérard Mercier soit bannie de la division ouest. Les cloisons ne sont point si étanches, et les deux "frères créditistes" s'enten­dent à merveille.

À Gérard et à Roland, toute la Nouvelle-France créditiste souhaite le plus grand succès dans leurs juridictions respectives.

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