"J'irai aux hommes de coeur"

le lundi, 15 janvier 1945. Dans La vie créditiste

Extrait d'une lettre de Benoît Patry, Voltigeur de Laverlochère (Témiscamingue) à Louis-Philippe Bouchard :

Cher Commandant et apôtre,

Je suis sûr que votre passage récent dans notre com­té marquera une étape importante dans l'histoire créditiste du Témiscamingue. Pour ma part, je me rappellerai toute ma vie du peu de temps que nous avons passé ensemble, de la gaieté avec laquelle vous faites les plus grands sacrifices. J'ai l'occasion de par­ler de vous souvent. Quand on parle de nos chefs, je dis : Vous ne les connaissez pas ; si vous voulez les connaître, suivez-les ; si vous n'avez jamais dit votre chapelet en voiture, vous allez le dire...

Ces jours de fête, je m'occupe de ramasser des obo­les pour la finance du mouvement ; je voudrais pou­voir envoyer $8.00, je suis rendu à $6.00. Je réussis aussi à prendre encore des abonnements.

Je suis plus encouragé que jamais à travailler pour corriger le système qui est cause que des hommes, des femmes et des enfants vivent dans des privations excessives et prolongées, qu'ils sont en proie aux plus vives souffrances physiques et morales ; qui est cause que mon père n'a pu me faire instruire. Je pourrais, comme vous, porter la lumière à la terre et aux hom­mes : je pourrais, comme vous, démasquer devant des foules ces hommes sans cœur et sans entrailles pour qui ni les droits de Dieu ni les droits de l'homme ne valent d'être respectés.

Mais, si je suis incapable de le crier aux foules, j'irai doucement aux hommes de cœur, essayer de répandre un peu de lumière et d'espoir en cette vie et en l'autre ; car le Crédit Social porte une sève chrétien­ne qui nous pénètre jusqu'à l'âme.

Voilà ce que je veux faire pour vous aider, car je suis assuré que la seule manière de sauver un peuple est d'aller à lui. D'ailleurs, Jésus nous en a donné l'exemple en descendant des splendeurs de sa gloire, en se faisant homme, en instruisant les hommes. Comme vous le faites, vous, apôtres laïques, en souf­frant dans votre chair, en mangeant à nos tables de pauvres, en vivant nos misères. C'est le moyen in­faillible de racheter et de sauver. Je prie Jésus de vous aider et de vous conserver la vie et la santé au milieu de tant d'écueils que vous rencontrez, et que vous puissiez voir la structure économique consolidée sur des bases solides, humanistes et chrétiennes, tel que vous l'aurez voulu en vous oubliant vous-même pour vous pencher sur les misères des autres.

Quand vous reviendrez au Témiscamingue, venez nous voir, vous serez toujours chez vous...

Benoît PATRY

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