Crédit Social et Radio-Canada

le mardi, 01 mai 1945. Dans La vie créditiste

Radio-Canada accorde 4 quarts d'heure d'émis­sion gratuite aux créditistes dans la présente cam­pagne fédérale.

Sans doute que c'est mieux que rien, et les cré­ditistes vont chercher à en tirer le plus de parti possible.

Mais il reste que Radio-Canada est loin de traiter les créditistes avec la même générosité que les libéraux, les conservateurs et les C.C.F.

La philosophie de Radio-Canada est semblable à la philosophie des financiers : gratifier large­ment les gros et jeter quelques miettes aux petits. Du moins, à ceux que Radio-Canada considère comme les petits.

En fait d'idée politico-économique, il n'y en a pas de plus importante, de plus vaste, de plus universelle et de plus conforme aux aspirations humaines, que le Crédit Social. Mais une idée qui menace toute la domination des banquiers et des financiers sur la vie politique et économique des peuples provoque la conspiration du silence chez les puissants du jour.

Voici comment sont réparties les gratuités de Radio-Canada :

Libéraux            21 quarts d'heure

Conservateurs    16 quarts d'heure

C.C.F.                14 quarts d'heure

Créditistes           4 quarts d'heure

Communistes       4 quarts d'heure

En vertu de quel principe les socialistes C.C.F. ont-ils trois fois et demie autant de temps que les créditistes ?

Radio-Canada dit que ses répartitions sont basées sur l'importance des groupements politi­ques, exprimée par leur figure aux dernières élec­tions.

Aux élections de 1935, et de nouveau aux élec­tions de 1940, les créditistes ont élu plus de dépu­tés que les C.C.F. À cause d'élections partielles survenues depuis, les C.C.F. avaient augmenté leur représentation à la Chambre des Communes, mais pas plus que les créditistes. À la dissolution du Parlement, il y avait 10 créditistes et 10 C.C.F..

Nous appelons ces émissions des gratuités de Radio-Canada. Gratuités n'est pas le mot propre. Tout cela est payé, payé par tous les citoyens, par les créditistes autant que par les autres. Nous ne voyons pas bien comment les citoyens C.C.F. de la province de Québec, par exemple, paient trois fois et demie autant que les créditistes de la même province. Les créditistes sont beaucoup plus nombreux que les C.C.F. dans la province. Pourtant le réseau français de Radio-Canada parlera trois fois et demie aussi longtemps pour le socialisme des C.C.F. que pour la doctrine libéra­trice des créditistes.

C'est déjà une injustice dans tout le Canada, que ce traitement mesquin des créditistes par rap­port aux autres, surtout cette supériorité artifi­ciellement accordée aux C.C.F. L'injustice est beaucoup plus énorme quand il s'agit du réseau français qui compte immensément plus d'audi­teurs créditistes que d'auditeurs C.C.F.

Considérée autrement, sous le point de vue de la politique prêchée par les divers groupements, l'ostracisation est encore plus remarquable. Les trois partis politiques favorisés prêchent la même chose, la main-mise graduelle de l'État sur les individus, par une bureaucratie croissante, par des obligatoires et des contributoires de plus en plus nombreux et de plus en plus vexatoires. Ils ne diffèrent entre eux que par le degré, la célérité de la socialisation. Seul, le Crédit Social ouvre une voie diamétralement opposée.

On peut donc dire que les socialisants, les bureaucratisants, les partis à endettement et à taxes, les fidèles valets des puissances d'argent et de la centralisation, disposeront de 21 + 16 + 14, soit d'un total de 51 quarts d'heure, total auquel les communistes, aile la plus avancée de la marche vers le socialisme d'État, viendront ajou­ter leurs 4 quarts d'heure. Grand total de 55 quarts d'heure au service de la même école. Con­tre tout cela, les créditistes, seule école de la li­berté totale alliée à la distribution de l'abondan­ce, n'auront que 4 misérables quarts d'heure.

De plus, Radio-Canada a disposé ses heures libres en demi-heures et en quarts d'heure. On comprend que, ne disposant que d'une heure en tout pour toute la campagne, les créditistes ne pouvaient prendre que des quarts d'heure, pour s'assurer au moins de venir quatre fois devant le public. Les autres pouvaient se payer le luxe des demi-heures tout en revenant fréquemment. Or, Radio-Canada place les demi-heures dans les meilleurs moments, entre neuf heures et dix heu­res du soir, et les quarts d'heure aux heures creu­ses : l'après-midi lorsque les hommes sont à l'ouvrage, ou après dix heures et demie du soir quand les travailleurs fatigués sont au lit.

Nous avons exprimé le désir de partager qua­tre bonnes demi-heures en deux, donnant sur chacune un quart d'heure aux communistes et ré­servant l'autre quart d'heure aux créditistes. Ra­dio-Canada n'accepte pas, disant que les unités, demi-heures comme quarts d'heure, sont indivi­sibles. Il a donc fallu nous contenter des quarts d'heure placés aux heures creuses de la journée.

De plus, il n'y a que des demi-heures dans les dernières soirées, de sorte que les maltraités des quarts d'heure ne pourront se faire entendre après le 6 juin. Les trois partis privilégiés auront cha­cun une pleine demi-heure après la dernière voix créditiste à Radio-Canada.

C'est un arrangement astucieusement préparé, du commencement à la fin, pour éliminer prati­quement le message créditiste de la radio, tout en ayant l'air de l'admettre dans le concert géné­ral.

La même ingéniosité diabolique qui préside au jeu des financiers et au jeu de la politique de partis se retrouve dans les magnanimités appa­rentes de Radio-Canada.

Ces réflexions ne sont pas un blâme à l'égard du personnel de Radio-Canada, qui, à Montréal au moins, est d'une courtoisie exquise. Ce que le personnel est obligé d'exécuter, d'autres têtes l'ordonnent. Ce sont ces autres têtes-là et l'esprit qui les inspire que nous dénonçons au public qui paie.

* * *

Note. — Les créditistes indignés qui veulent protester contre cette discrimination, contre ce traitement de la petite part et des heures tardi­ves, et peu profitables, devront adresser leurs protestations au Docteur Augustin Frigon, gé­rant-général de la Société Radio-Canada, 1440 Ste-Catherine Ouest, Montréal. C'est lui qui est le responsable, et non pas ses subordonnés.

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