Chez Nos Critiques

le lundi, 01 février 1937. Dans Cahiers du Crédit Social

Nous n'allons certainement pas nous attarder à répliquer à chaque article qui paraît contre le Crédit Social. Il faudrait en remplir nos Cahiers, car les critiques se multiplient depuis quelque temps. C'est bon signe : le mouvement créditiste existe puisqu'on en parle ; il compte puisqu'on le craint.

Personne ne s'étonnera de voir les grands quotidiens, comme la Presse, le Canada, l'Illustration, la Tribune (de Sherbrooke), etc,, y aller de leur boniment périodique : c'est la consigne. Ce n'est pas le zèle de l'instruction du public, ni le dévouement aux intérêts de leurs lecteurs qui les dévore, allez ! Il y a déjà plusieurs mois que le Révérend Père Lévesque écrivait :

“Quand donc certains journalistes, grassement payés par certains partis politiques ou par des institutions financières, viendront vous présenter le Crédit Social comme un socialisme anti-chrétien, défiez-vous de leur théologie. Elle est habituellement trop rudimentaire pour vous fournir des directives sûres. Et dans le cas présent, elle ne saurait justifier raisonnablement son anathème. Surtout, elle est trop intéressée. Lorsque ces hommes-là se font théologiens, c'est ordinairement beaucoup moins pour défendre la vérité révélée que pour sauvegarder les petits intérêts qui ont été confiés à leur plume. À cette fin, ils sont capables d'exploiter tous les moyens, même les forces sacrées de la religion. Heureusement, il ne saurait jamais être question pour eux d'influence indue... Défiez-vous d'eux, même lorsqu'ils abordent le Crédit Social sous son aspect économique. Les politiciens régnants pressentent dans ce mouvement une force politique qui monte et les menace ; les banquiers y voient l'ennemi acharné de leur précieux monopole. Ne vous étonnez donc pas si leurs publicistes, d'un commun accord, entreprennent de réfuter sa doctrine et de la ridiculiser ; ce qui est beaucoup plus facile et demande moins d'intelligence."

Pour nous, les attaques de la presse à solde ne nous émeuvent pas. Nous ressentons un peu plus de peine quand nous voyons de jeunes plumes prendre part à ce jeu dans des feuilles que nous voulons croire indépendantes — non pas que les auteurs de ces articles puissent faire beaucoup de mal au Crédit Social, mais ils se nuisent beaucoup à eux-mêmes.

Il faut avoir bien peu étudié le Crédit Social pour nous servir encore la vieille rengaine que c'est du socialisme ou du communisme. C'est ce que s'évertue pourtant à répéter le Jean Dollens qui se tient à la croisée des chemins de l'Unité pour dérouler chaque semaine ses six douzaines de lignes : les trois premières douzaines pour dire que le Crédit Social est le socialisme le plus radical, etc., et les trois dernières pour prôner le corporatisme et les Chambres Économiques du "Chancelier." Comme si le Crédit Social ne pouvait admirablement s'allier avec le vrai corporatisme ! Mais passons. Notre petit bonhomme se perchera sans doute sur le bout de ses orteils la semaine prochaine pour dire : "Nous, Jean Dollens, n'avons pas besoin, comme le R. P. Lévesque, d'étudier le Crédit Social. Beaucoup plus perspicace que lui, nous avons découvert et déjà prouvé que..." Et qu'a-t-il prouvé, sinon qu'une langue qui lèche fait bien piètre figure à côté d'une tête qui raisonne ?

La bannière du Crédit Social n'est pas rouge, elle est blanche, blanche comme la soutane du Dominicain, et nous prions nos jeunes, auxquels le Crédit Social va ouvrir des horizons et des carrières en cassant la puissance néfaste qui leur ferme aujourd'hui toutes les avenues, de revêtir autre chose que les guenilles du vieux Montagu Norman. Qu'ils cessent de cultiver l'ignorance ou le snobisme. Qu'ils étudient, se renseignent et pensent un peu d'eux-mêmes. Les problèmes de leur génération se posent devant eux ; ce n'est pas en dénigrant bêtement ceux qui font des efforts sérieux pour les résoudre qu'ils vont améliorer leur sort.

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