Les banquiers Rothschilds

Louis Even le vendredi, 01 octobre 2004. Dans Histoire bancaire

Nous avons remarqué, en parlant de la fondation de la Banque d'Angleterre, que les financiers internationaux savent profiter des guerres pour arrondir leur fortune et consolider leur pouvoir.

L'histoire des Rothschilds nous montre qu'au moins en plus d'une occasion, ces financiers n'ont point perdu les occasions que leur offraient les conflits entre nations. Nous ne voulons pas dire qu'ils suscitaient les guerres, mais ils s'adaptaient très bien aux situations créées par les guerres et qu'ils n'en sortaient point appauvris.

Anselme Meyer Rothschild, vécût en Allemagne. Les fils d'Anselme s'établirent dans cinq nations différentes d'Europe.

L'aïeul, Anselme, s'était fixé à Francfort. Après Hanovre, Francfort était le plus grand centre d'affaires de l'Allemagne.

Anselme Meyer Rothschild servait de banquier au landgrave de Hesse. Le landgrave était le prince le plus riche de toute l'Europe. Il s'enrichissait de diverses manières, mais entre autres par ce qu'on appellerait aujourd'hui un commerce de chair à canon.

En effet, les Hessiens étaient de forts gaillards, et nombre d'entre eux faisaient leur vie par le métier de guerriers. Pas par patriotisme, mais pour la paye. Leur prince, le landgrave, les engageait et louait leurs services à d'autres princes ou rois qui en avaient besoin. Naturellement le landgrave tirait profit de la transaction, et il confiait ses profits à Rothschild qui les plaçait, les faisait fructifier pour le landgrave, tout en prenant ses petits bénéfices.

Par exemple, lorsque les colonies américaines se révoltèrent contre l'Angleterre, le roi d'Angleterre, Georges III, demanda au landgrave un régiment de Hessiens. Le landgrave lui fournit 16,800 hommes, se faisant payer par Georges III une somme équivalente à $20,000,000.

Le landgrave confia ces 20 millions à Rothschild. Celui-ci avait du flair. Vu qu'il y avait guerre en Amérique et que les pays en guerre sont toujours en quête de fonds dont ils paient le prix fort si c'est nécessaire, Rothschild ne trouva rien de plus alléchant que faire cet argent servir en Amérique.

Le banquier de Francfort prêta donc l'argent à son congénère d'Amérique Haym Salomon. Salomon payait intérêt à Rothschild. Mais Salomon n'eut aucune difficulté à prêter lui-même, à plus gros d'intérêt, à Morris, le financier de Georges Washington pour la conduite de la guerre d'indépendance.

C'est ainsi que des Hessiens se battirent pour Georges III contre les Américains, et que les Américains furent financés par l'argent avec lequel Georges III avait acheté les Hessiens.

Américains, Anglais, Hessiens s'entretuaient sur les champs de bataille, pendant que deux financiers, Salomon de ce coté-ci de l'océan et Rothschild de l'autre côté, accumulaient les profits et la puissance que confère l'argent.

Rothschild avait cinq fils, et il les dressa à ce commerce fructueux. Les "cinq messieurs de Francfort" se séparèrent de corps, non d'esprit et d'intérêts. Le plus habile des cinq, Nathan, choisit Londres, qui devenait le centre financier de l'univers. Jacques s'installa à Paris, Salomon à Vienne (Autriche), Charles à Naples (Italie), tandis que l'aîné, Anselme comme son père, demeurait à Francfort. Le vieux mourut en 1813.

À cette époque l'Europe était en proie aux guerres napoléoniennes. Les deux Rothschilds, Nathan et Jacques, à cheval sur l'Angleterre et la France, surent apprécier toutes les occasions. Prêts au gouvernement, contrebande sur une haute échelle, avec la connivence des deux gouvernements ennemis, enrichirent les Rothschilds pendant que les soldats tombaient, que les mères et les épouses pleuraient, que les haines s'avivaient et qu'on alimentait le tout de harangues patriotiques.

Les deuils qui couvraient l'Europe n'appauvrissaient guère ces experts de l'argent. Nathan a lui seul fit à la Bourse de Londres un profit de six millions de dollars en une seule journée, le surlendemain de Waterloo. L'Aigle s'en allait mourir à Sainte-Hélène, les Rothschilds bâtissaient leur fortune.

Ce même Nathan devait intervenir plus tard jusqu'en Espagne, en 1835, où, pour se venger d'un gouvernement qui ne voulait pas plier à sa volonté malgré des versements corrupteurs faits au ministre des finances espagnol, il consacra, de concert avec son frère de Paris, neuf millions de dollars à la ruine des valeurs mobilières espagnoles. Il en résulta une crise mondiale qui ruina des milliers de porteurs d'obligations, tandis que les Rothschild s'enrichissaient sur les débris.

C'est à ce sujet que l'autre frère, celui de Vienne, Salomon, osait écrire à un confident : "Dites au prince Metternich que la maison des Rothschilds a agi ainsi par vengeance."

Ce Salomon avait aidé Metternich à financer la Sainte-Alliance (Autriche, Russe et Prusse), sans avoir recours à l'Angleterre. En retour, les frères Rothschilds furent comblés d'honneur et faits barons par la Cour impériale de Vienne.

Malgré la plus grande réserve et discrétion dont s'entourent aujourd'hui les banquiers internationaux pour voiler leurs ripailles, la technique continue.

Ainsi, lorsque l'Autriche fut démembrée après la grande guerre, la maison Rothschild d'Autriche se trouva en piteuse posture financière. Ce ne fut pas long. Lorsque, huit ans plus tard, le Premier Ministre Pointcaré à Paris, de concert avec la Banque de France, prépara une loi pour la stabilisation du franc, le Rothschild de Paris, directeur de la Banque de France, sut avertir en vitesse son cousin de Vienne. Ce dernier se hâta d'acheter les francs alors à la baisse, pour les revendre à la hausse après l'adoption de la loi par le parlement français.

En moins d'une semaine, sans verser ni sueur ni sang, le financier de Vienne (Salomon Rothschild) avait refait toute sa fortune... sur le dos des épargnants français. Et il y en a qui ne comprennent pas !

Louis Even Vers Demain. Janvier 1941

Louis Even

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