Un village mondial rempli d'idiots

le mercredi, 01 juin 1994. Dans Divers

Article publié dans le quotidien "The Globe and Mail" de Toronto

Présentation de Vers Demain

Le journal « The Globe and Mail », de Toronto, a publié, le 14 octobre 1992, l'ar­ticle suivant écrit par Jo An Claytor, dame écrivain et artiste de Vancouver. Ar­ticle d'une sagesse et lumière remarqua­bles. Nous l'en félicitons chaleureusement.

Félicitations aussi à l'auteur de la caricature, M. Jim Steward. Cette œuvre est très éloquente.

Et félicitations aussi au journal « The Globe and Mail » pour avoir rendu public ces deux chefs-d'œuvre !

Les messages qui nous viennent du Ciel depuis plusieurs années nous révèlent que la télévision est une invention de Sa­tan, et que cet appareil ne devrait pas être admis dans les maisons du bon monde, qui veulent rendre gloire à Dieu et non pas au gouvernement de Lucifer sur la terre.

GCM

par Jo/An Claytor

La télévision crée une dépendance

Spirituellement, physiquement et cultu­rellement, la plupart des Nord-Américains ont abandonné leur coutume de vie aux exigences de la télévision. Cet instrument d'esclavage mental est entré dans nos foyers comme un moyen de divertisse­ment, mais il s'est installé pour de bon comme dictateur.

Le principal problème lorsqu'on regar­de la télévision, c'est qu'elle nous rend dépendants (...) Quiconque a essayé de passer moins de temps à regarder la télé­vision attestera que l'image télévisée a un pouvoir d'attraction. Donc, une fois que cet instrument offensif a été retiré de la maison, c'est toute la vie de la famille qui change. Les fenêtres de nos esprits s'ou­vrent, et nous commençons à voir le monde avec notre propre équipement vi­déo naturel.

Video est un mot latin qui signifie « je vois ». Malheureusement, avec le ton en­chanteur de la télévision dans nos foyers qui nous attire, peu d'entre nous voient plus loin que la télévision.

L'œil de la bête

Dans les foyers où il y a la télévision, la vie est contrôlée et limitée. Dans la pièce où la télévision est installée, tous les sièges sont orientés pour permettre aux gens de voir dans l'œil de la bête le plus confortablement possible sans déran­gement. Chaque membre de la famille est assis pour rendre un hommage approprié à la présence de la télévision. La vie de la maisonnée est réglée par le rythme de l'horaire des programmes. Les repas, la conversation, et même le besoin d'aller aux toilettes est réglé d'après ce que dicte l'horaire de la télévision.

Ce dernier phénomène a été rapporté avec documents à l'appui par Donna Wool­fol Cross dans son livre Media-Speak. Elle rapporte que durant la première diffusion à la télévision du film Airport, à Lafayette, en Louisiane, le service de l'aqueduc a obser­vé une baisse de 25 livres dans la pression d'eau, alors que 20 000 personnes se préc­ipitaient à la chambre de bain à la fin du film.

Un foyer où il y a la télévision est souvent inactif et réduit à l'esaclavage de la seule activité de regarder la télévision. Non seulement l'interaction humaine est-elle mise de côté, mais le téléspectateur entre dans un état semblable à la transe. Il y a très peu d'activités motrices, même le mouvement des yeux est réduit à son mi­nimum. C'est un facteur qui contribue à l'augmentation croissante des cas d'obésité dans nos cultures contrôlées par la télévi­sion.

L'ambiance d'une maison munie de la télévision est rompue par l'augmentation périodique du volume de la télévision, qui a lieu en raison de la nature même de la télévision. L'état du corps étant réduit à un niveau juste au-dessus du coma, le télé­spectateur tomberait vite endormi sans cette sorte de poussée électronique.

Une maison de dépendance

Une maison munie de la télévision est une maison sous l'état de dépendance. Au début, on peut se limiter à un ou deux programmes bien choisis, mais on de­vient bien vite rivés à l'écran. Combien peuvent résister ? On a bien vite un pro­gramme préféré, qu'on ne peut manquer. En peu de temps, nous sommes menés par l'horaire des programmes télévisés, et même le magnétoscope ne peut nous libé­rer du besoin de rester à l'écoute. Si nous ne sommes pas capables de rester rivés à l'écran pendant 24 heures, nous craignons d'avoir manqué quelque chose. Lorsque nous commençons à nous faire du souci d'avoir manqué Murphy Brown (une co­médie télévisée populaire), nous pouvons être jugés comme étant de véritables en­ragés de la télévision.

Le fait de regarder régulièrement la té­lévision remplit la maison d'anxiété. La té­lévision est devenue comme un spectacle osé électronique. Elle est remplie d'images de violence contre les femmes, les enfants, les hommes, et la nature. Les nouvelles et les téléromans sont remplis de violence, entrecoupés d'annonces publicitaires omni­présentes, un véritable crime contre l'hu­manité.

La complainte monotone des annon­ces publicitaires véhicule constamment le message que le téléspectateur ne peut être complet et satisfait à moins de posséder ce que la télévision annonce, y compris le mode de vie. La téléspectateur est pris, captivé par la lumière émanant de la boîte, tout comme un cerf est attiré par les pha­res d'une automobile la nuit.

La vie sans télévision est inspirante

Au contraire, la vie sans télévision suscite l'inspiration. L'ambiance du foyer est plus détendue et simple. Les pièces sans télévision ont une apparence plus ouverte. Les sièges sont disposés de façon à faciliter la conversation. Les occupants peuvent bénéficier d'une vision complète de l'ensemble de la pièce et de son conte­nu — une pièce avec une vue qui n'est pas créée de façon électronique.

La vie sans télévision est active. La lecture est une manière fondamentale et satisfaisante d'acquérir de l'information. Les membres de la maison sont actifs physiquement et libres d'entreprendre des activités extérieures. Dans les foyers sans télévision, le ton est plus calme parce que l'atmosphère n'est pas troublée périodi­quement par l'insistance crasse des gens excités de la télévision, ou le bruit régulier du haut-parleur. La maison prend le rythme de la famille, de sa vie quoti­dienne.

Une maison sans télévision n'a pas à s'inquiéter de ce que les jeunes, impres­sionnables ou sensibles, soient en face de la télévision. C'est un environnement rempli d'alternatives significatives. On peut même trouver dans cette maison l'usage occa­sionnel et très limité de la télévision, utili­sée conjointement avec un magnétoscope. La télévision ne réside pas de façon per­manente dans ce foyer, et la programma­tion des chaînes commerciales est évitée.

Le fait que l'usage régulier de la télévi­sion crée une dépendance est évident, de l'aveu même de plusieurs téléspectateurs. Le style de vie de ceux qui sont écrasés devant la télévision, l'expérience d'être comme un légume devant l'écran idiot, sont de justes descriptions d'un état de dé­pendance. L'inactivité et l'oubli sont les sous-produits d'un usage sans discerne­ment de la télévision.

Marshall McLuhan avait tort, en parlant de la télévision, de dire qu'elle crée un vil­lage mondial. Plutôt que d'amener le mon­de entier dans nos salons, la télévision nous a aveuglés sur ce qui se passe dans notre propre salon et dans notre commu­nauté. Une maisonnée avec une télévision risque fort de devenir un membre d'un vil­lage mondial d'idiots.

Jo/An Claytor

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