La Sainte Vierge Marie n’a vécu que de la Parole de Dieu

le dimanche, 01 janvier 2012. Dans Vierge Marie

Abbé Hubert Kedowide

 Lors de notre Siège de Jéricho en mars 2011, à la Maison de l’Immaculée, à Rougemont, nous avons eu l’honneur d’accueillir M. l’Abbé Hubert KEDOWIDE, originaire du Bénin, vicaire de la paroisse St-Alexandre, à Thetford Mines. Voici des extraits de sa conférence:

Je voudrais faire avec vous une relecture de Marie par la Bible. En fait, comment Marie est au cœur de notre foi. C’est par Marie que nous pouvons aller à Dieu, parce qu’il est évident que Dieu a passé par Marie pour venir jusqu’à nous. Nous devons nous aussi passer par Marie pour aller au Seigneur. Et pourquoi  ? C’est très simple, il suffira pour nous d’aller à la Genèse de l’humanité. Qu’est-ce que Dieu a fait  ?

 

Émerveillement devant la création

 

Quand Dieu a créé le Ciel et la terre, il a trouvé que cela était très beau. L’homme que Dieu a créé ne sentait pas encore cet émerveillement que Dieu avait pour cette humanité. Il manquait quelque chose et Dieu a vu cela. Il va créer la femme pour qu’au contact de la femme, l’homme puisse entrer dans l’émerveillement de Dieu. “Voici la chair de ma chair, l’os de mes os”, dit Adam. Grâce à cette rencontre, Dieu a créé l’émerveillement. Ça veut dire que notre vie n’a de sens que dans la rencontre, que dans la fraternité, que dans le passage que vous êtes en train de défendre, vous qui êtes les Pèlerins de saint Michel. Vous êtes en train de travailler pour le partage équitable.

Émerveillement devant la créationEt c’est cette équité que l’homme reconnut dans la femme. Il dit en voyant la femme: «C’est la chair de ma chair», c’est-à-dire moi-même. Et vous aurez constaté lorsque le péché a fait irruption dans la vie, «Dieu dit à Adam: “Tu as donc mangé de l’arbre dont je t’avais défendu de manger !” L’homme répondit: “C’est la femme que tu as mise auprès de moi qui m’a donné de l’arbre, et j’ai mangé !”» (Genèse 3, versets 11, 12). Le péché a opéré la rupture entre l’homme et la femme. Le péché est un semeur de division.

Je voudrais vous inviter à voir ce que Dieu a dit à l’humanité. Dieu a adressé la parole à l’homme et à la femme. ... Nous ne sommes pas les premiers à parler, c’est Dieu qui a parlé. C’est Dieu qui doit nous donner la parole. C’est Dieu qui a dit à Adam et Ève: ‘Voilà le jardin, mangez’. — La première invitation à l’humanité, c’est l’Eucharistie. — Dieu a dit à l’homme et à la femme: ‘Mangez tous les fruits mais pas celui qui est au centre’. C’est simple, mangez tous les fruits en référence à Celui qui gouverne tous les fruits, à Celui qui doit être au centre de votre vie, à Celui qui doit être le pivot de votre vie, à Celui qui doit être la référence de votre vie.

 

Le diable, trafiquant de la Parole de Dieu

 

Et le péché a contribué justement à nous donner nous-mêmes notre propre référence. Quand le serpent est venu, il n’a pas commencé par adresser la parole. Il a commencé par abuser de la parole. Il a abusé de la parole du Seigneur parce qu’il a trafiqué sa parole. Il a dit à Ève: ‘Dieu vous a dit de ne pas manger’. La femme a rectifié: ‘Il a dit vous pouvez manger sauf ...’ Donc, le diable c’est un trafiquant de la parole.

Comme aujourd’hui, nous sommes dans un monde de manipulation de la parole. Nous sommes dans un monde où la parole de la vérité est souvent trafiquée pour nous amener à la chute, pour nous amener à la déchéance, pour nous amener au péché et le démon va réussir. Grâce à la manipulation de la parole, il a amené Adam et Ève à être le centre de leur propre vie. Quand on est au centre, on se retrouve nu, dépouillé, complètement anéanti. On a tout perdu parce que Dieu n’est plus le centre de la vie. Mais, dans son amour infini, dès le départ, Dieu va dire (à nos premiers parents) que la femme va écraser la tête du serpent. La tête est importante, c’est la vie. C’est une femme qui va nous relever, qui va nous aider à sortir de cette déchéance. Et ce sera Marie.

 

Marie, terre vierge et fertile

 

Marie terre vierge et fertileMarie s’est donnée entièrement, elle s’est donnée totalement. Elle s’est consacrée au Seigneur pour que le Seigneur puisse remplir sa vie et la féconder afin qu’elle puisse nous enfanter le Sauveur.

Contrairement à la parole qui fait irruption pour nous briser, Marie a été cette terre extraordinaire qui a accueilli la parole dans sa totalité, même si elle se posait des questions, même si elle se demandait comment cela va-t-il se faire. Vous avez entendu la réponse de l’ange, la réponse n’était pas une réponse cartésienne, ce n’était pas une réponse d’explications: “L’Esprit-Saint descendra sur toi et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre.“ — “Fiat, je suis la servante du Seigneur que tout se fasse pour moi selon ta parole”, répondit la Sainte Vierge.

Et alors Marie va être fécondée de la parole. La parole que l’ange a reçue, est accueillie par Marie. C’est cette Parole que Marie va féconder pour nous l’enfanter, la Parole qui était auprès de Dieu, la Parole qui s’est fait chair et nous avons vu sa gloire, la gloire qui habite parmi nous. Il est venu parmi les siens et les siens ne l’ont pas reconnu. Demandons à Marie, à sa suite, à son école, d’accueillir sa Parole comme elle l’a fait.

 

Visitation de Marie à Elizabeth

 

Lorsque Marie a accueilli la parole, qu’est-ce qu’elle va faire ? Marie va se lever rapidement, dit le texte de la Visitation, pour aller voir sa cousine. Imaginez-vous: partir de Nazareth pour aller à la porte de Jérusalem parce que la maison de Zacharie qui est l’ancienne maison de David, est à l’entrée de Jérusalem. Marie va marcher environ 150 kilomètres à pied. La Parole qui a donné vie à Marie, va la faire lever. Elle est entièrement fécondée et la fécondité doit nous faire bouger.

Ça veut dire que Marie est la première à faire la route qui mène de Galilée à Jérusalem, c’est-à-dire qu’elle est la première à faire la route du chemin de la croix. Voici que nous montons à Jérusalem, Marie, portant son Fils en elle, est la première à parcourir le chemin qui mène jusqu’à Jérusalem, comme pour initier le Fils, initier la Parole, une Parole qui sera entièrement livrée sur la croix, une Parole que la mort ne pourra même pas arrêter, une Parole qui ira jusqu’à la mort pour briser les portes du tombeau et pour faire éclater la parole de vérité, la parole de lumière.

C’est beau de contempler Marie en train d’entreprendre, en train d’être comme précurseur de ce cheminement extraordinaire du don jusqu’à livraison, jusqu’au Golgotha. Lorsqu’elle entre dans cette maison de Zacharie, à six kilomètres de Jérusalem, à la porte de Jérusalem, qu’est-ce qu’elle va faire ? Comme la Parole de salutation lui a été adressée, cette Parole qui l’a fécondée et qui a fait qu’elle est devenue bénie entre toutes les femmes, Marie va donner déjà la Parole.

Avant que la Parole se fasse chair pour être enfantée, Marie va commencer à donner cette même Parole à sa cousine qui va la saluer. Lorsque cette cousine va recevoir la salutation, elle sera remplie de l’Esprit-Saint. Comme nous sommes porteurs ou porteuses de la Parole de Dieu, comme Marie, nos salutations font que ceux et celles qui auront la joie de nous rencontrer ou de vivre avec nous seront remplis de l’Esprit-Saint.

 

Jubilation de saint Jean Baptiste

 

À la parole et à la salutation de Marie, qui était cet enfant ? La voix qui crie, la voix en gestation, saint Jean-Baptiste. Il va jubiler au-dedans de sa mère pour répondre à cette Parole attendue depuis longtemps avant les siècles, cette Parole qui viendra nous visiter. Jean-Baptiste du fond des entrailles de sa mère va commencer cette jubilation que donne toute bonne parole. Toute bonne parole apporte l’Esprit-Saint, toute bonne parole apporte la joie, toute bonne parole apporte l’action de grâces.

La cousine Elisabeth dira: «Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites.» A l’accomplissement des paroles… Nous, dans Adam et Ève, on n’a pas hésité à douter de la parole. C’est pour cela que la parole du serpent nous a mal menés. Mais Marie c’est elle qui a cru à l’accomplissement de la Parole, de la Parole de Dieu. Elle a cru sans détour, elle n’a pas biaisé, (elle a persévéré). Et la route qu’elle venait de parcourir, ne l’a pas fatiguée ni distraite, elle est demeurée dans la parole et c’est en cela qu’elle a des mérites.

Je voudrais vous montrer un peu pourquoi Marie a accueilli entièrement la Parole de Dieu et pourquoi elle n’a pas laissé de place pour sa propre parole. Je voudrais vous rappeler la belle prière d’action de grâce du Magnificat que vous connaissez très bien:

 

Paroles bibliques du Magnificat

 

«Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon Sauveur.» Marie a pris cela dans Samuel 2, verset 1. «Car il a jeté les yeux sur son humble servante». Marie a pris cela dans Samuel 1, verset 11. «Désormais tous les âges me diront bienheureuse». Marie a pris cela dans la Genèse 30, verset 13. «Le puissant fit pour moi des merveilles. Saint est son nom». Marie a pris cela dans le Psaume 11, verset 9. «Son amour s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent». Marie a pris cela dans le Psaume 33, verset 17.

«Il disperse les superbes. Il renverse les riches de leur trône. Il comble de biens les affamés». Marie a pris cela dans les Psaumes: 116, verset 9, 89 verset 11, 113, verset 7. «Il a secouru Israël. Il se souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères en faveur d’Abraham et de sa race à jamais», Marie a pris cela dans le Psaume 18, verset 51.

Marie n’a pas de parole. Sa parole, c’est la Parole de Dieu. Marie respire de la Parole de Dieu. Lorsque quelque chose lui arrive, elle n’a de paroles que d’aller chercher un peu partout la Parole de Dieu. Si je pouvais ressembler à Marie, si je pouvais en réponse à ce qui m’arrive dans ma vie de bien, si j’étais porté spontanément à retrouver dans la Parole de Dieu les sources de lumière qui (pourraient) m’éclairer dans ma vie, ce serait extraordinaire.

Si au moment où quelque chose m’arrive, je dois rendre grâce au Seigneur, et quand je retrouve dans les Saintes Écritures les mots justes, les mots de Dieu qui vont me faire éclater de joie et de bonheur, quelle allégresse pour moi ! Personne ne va bavarder, tout le monde ne fera que parler et bien parler.

Demandons au Seigneur la grâce d’être ceux et celles qui puisent au fond de sa Parole les éléments et tous les ingrédients de nos vies, comme Marie.

Deuxième chose, c’est le récit des noces de Cana où Marie sera au cœur. Elle n’est pas à l’extérieur de la scène, elle est au cœur puisqu’elle-même est l’invitée. Elle est là, mais elle n’est pas là insensible à ce qui arrive. Elle est là comme au coeur même de nos indigences car ce ne sont pas les époux qui sont partis pour aller voir le Seigneur, c’est plutôt Marie qui ira dire à son Fils: «Ils n’ont plus de vin». Si nous mettons Marie dans nos vies, au cœur de nos indigences, Marie est celle qui peut intervenir pour nous avant même que nous sentions le besoin de le faire, avant même que nous puissions peut-être aller chercher des comprimés antidépresseurs ou aller voir les psychologues.

 

L’eau changée en vin, à Cana

Les Noces de CanaMarie n’était pas ailleurs, elle était au cœur de la scène. En même temps, elle est en avant comme on le chante: Marie passe devant. Elle est passé en avant pour aller rencontrer son Fils pour dire: «Ils n’ont pas de vin». Jésus lui répondit: “Femme, qu’est-ce que cela peut bien nous faire, à moi et à toi  ? Mon heure n’est pas encore venue  !” Le Fils, malgré cette réponse, reste incompréhensible.

Marie sera celle qui nous montre que, dans la foi, il ne s’agit pas nécessairement de comprendre. Marie n’a certainement pas compris ce message, cette réponse surprenante de son Fils. D’ailleurs, elle est habituée à des réponses surprenantes depuis l’âge de 14 ans. Elle est comme aguerrie. Elle n’a pas posé trop de questions mais elle nous a donné le modèle d’une foi inestimable, d’une foi de confiance totale. Elle n’a pas douté un seul instant de la capacité de son Fils, mais elle dira aux serviteurs et aux disciples: «Faites tout ce qu’il vous dira». C’est la Parole de Dieu, puisque Dieu est le premier, avant même Marie. «Or il y avait six urnes de pierre... Jésus leur dit: “Remplissez les urnes d’eau”. (L’eau fut changée en vin. Récit dans saint Jean chapitre 2, 1 à 11.)

 

Au Baptême de Jésus

 

Au Baptême de Jésus, une voix se fit entendre lorsque la colombe descendit: «Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour, écoutez-le». C’est ce que le Seigneur nous a dit depuis qu’il a scellé l’alliance avec nous, avec le peuple d’Israël. «Écoute Israël  ! Le Seigneur est ton Dieu». Nous n’avons pas le droit à la parole. Il faut écouter pour savoir parler, pour apprendre à parler. Si on n’écoute pas Dieu, on ne peut pas apprendre à parler. Vous comprenez que dans le monde on n’écoute plus. Nous n’écoutons plus notre pape, nous n’écoutons plus nos évêques, nous n’écoutons plus nos parents, nous n’écoutons plus personne puisque tout le monde parle. À cette allure, on n’a pas le temps d’écouter la Parole du Seigneur pour apprendre à parler, pour apprendre la parole qui est une parole de vérité et de vie.

“Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour. Écoutez-le“, a dit le Père. Marie a toujours repris ce que Dieu lui-même a consacré dans l’amour. Elle a demandé aux serviteurs d’écouter: «Faites tout ce qu’il vous dira». Tel père, tel fils, telle mère, telle fille. Le Fils lui-même quand il s’agira de nous apprendre la prière des enfants de Dieu, qu’est-ce qu‘il va nous dire ? «Notre Père, que ta volonté soit faite». Donc, écoutez le Seigneur pour réaliser sa volonté. C’est aux Noces de Cana que Marie va nous initier à l’écoute du Seigneur, car lorsqu’on écoute le Seigneur, l’eau peut se changer en vin. Lorsqu’on écoute le Seigneur, tout peut renaître. Lorsqu’on écoute le Seigneur, tout recommence.

 

Marie, totalement à l’écoute

 

Je voudrais donc vous inviter à méditer tout doucement cet itinéraire spirituel de Marie. Marie est totalement à l’écoute. Et nous sommes des chrétiens baptisés, car le jour du Baptême, le prêtre nous a dit en nous signant par le Saint-Chrême que nous devenons des prêtres, des prophètes et des rois. Des prophètes, ça veut dire que par notre sacerdoce nous devenons une source de sanctification, une source de bonheur, une source de joie. C’est cela être à l’écoute du Seigneur. Car nous sanctifier, c’est d’abord et avant tout nous mettre à l’écoute du Seigneur et être en route avec lui. Il nous tient par la main. Il nous parle pour que notre route, Lui qui est Chemin, Vérité et Vie, puisse nous conduire sur des prés d’herbe fraîche pour nous faire reposer.

 

Héroïsme de Marie

 

Marie n’a jamais abandonné son Fils. Marie a accompagné son Fils partout jusqu’au pied de la croix. C’est une assurance pour moi si je me réclame fils ou fille de Marie. J’ai l’assurance que jamais elle ne peut m’abandonner. Elle va rester auprès de moi jusqu’au pied de ma croix ou de mes croix. Imaginez-vous quelqu’un qui souffre beaucoup et qui se rappelle encore qu’il a une mère, cela veut dire que la mère est pour lui la chose la plus précieuse, car il a tout oublié. Avant de mourir Jésus s’est rappelé qu’il fallait donner sa mère au disciple qu’il aimait, et à toute l’humanité.

Jésus au cœur de l’atrocité, alors qu’il gémissait sur la croix, à l’article de la mort, a trouvé encore la force de nous dire: «Voici ta mère, voici ton fils». Demandons à Marie d’être accueillis par elle et surtout à sa suite de l’écouter entièrement et totalement, puisque nous sommes à l’heure de la nouvelle évangélisation. On parle souvent de la nouveauté, mais la nouveauté c’est le rappel à l’essentiel de la vérité de la foi. Cet essentiel, c’est l’écoute de Dieu.

Rév. Hubert KEDOWIDE, prêtre

 

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