Le Parlement québécois légalise l’euthanasie

Alain Pilote le jeudi, 01 mai 2014. Dans Euthanasie

5 juin 2014: jour sombre pour le Québec

Cette loi va à l’encontre du code criminel canadien Et du Commandement de Dieu «Tu ne tueras pas»

Le 5 juin 2014, le projet de loi 52, appelé «Loi concernant les soins de fin de vie», était adopté par les députés de l’Assemblée nationale (parlement de la province de Québec): 94 députés ont voté en faveur de la loi (dont tous les députés du Parti Québécois et de la Coalition Avenir Québec), et 22 députés libéraux (sur les 70 députés du parti au pouvoir) ont voté contre. (9 députés étaient absents lors du vote,)

Piqure euthanasieLa mort sur demande bientôt dans un hôpital près de chez vous...

Cette nouvelle loi autorise toute personne qui se qualifie à demander et à obtenir la mort sur demande par un médecin. Au lieu d’utiliser les mots «euthanasie» et «suicide assisté», la loi parle plutôt d’«aide médicale à mourir», mais la démarche est exactement la même: une injection qui donne la mort.

Comme l’écrit le réseau citoyen Vivre dans la dignité, «désormais, au Québec, le fait qu’un médecin tue une personne à sa demande pour mettre un terme à sa souffrance, plutôt que de la soulager, sera considéré comme un soin de santé. À quelques exceptions près, nos élus ont en outre choisi d’ignorer que le Québec n’a pas compétence pour décriminaliser l’euthanasie. Tuer un patient, même à sa demande, n’est pas un soin; c’est un homicide interdit par le Code criminel canadien.»

En définissant l’euthanasie comme étant un «soin de santé», qui est de juridiction provinciale, le gouvernement québécois essaie de contourner l’interdiction du code criminel, mais les opposants ont justement dit qu’ils contesteront cette loi devant la Cour suprême du Canada, car donner la mort ne peut en aucun cas être qualifié de soin.

Couillard ressuscite le projet de loi

Ce projet de loi 52 avait passé tout près d’être adopté sous le gouvernement péquiste de Pauline Marois en mars dernier, mais le déclenchement des élections provinciales avait empêché la tenue d’un vote final. Le chef libéral Philippe Couillard avait insisté pour que tous ses députés qui voulaient s’exprimer sur le projet de loi puissent le faire, ce qui était tout à fait une procédure normale, mais qui a fait en sorte le projet de loi tombe à l’eau, faute de temps, et était techniquement mort .

Le jour des élections, le 7 avril, le Parti québécois a subi une dégelée historique, et ce sont les libéraux de Philippe Couillard qui ont pris le pouvoir, avec 70 députés. Les Québécois avaient clairement dit non au Parti Québécois de Pauline Marois, non seulement à cause de la soi-disant charte des valeurs, mais aussi en raison du projet de loi 52 sur l’euthanasie.

Or, à la surprise générale, une fois élu majoritaire, Philippe Couillard annonçait le 22 mai qu’il allait représenter au parlement le projet de loi 52 tel qu’il était lors du déclenchement des élections, sans aucun amendement, et que ce projet devait devenir loi avant la fin de la session parlementaire le 13 juin. Il ressuscitait donc des morts un projet de loi qui était inacceptable pour lui tout juste avant les élections. Voilà une volte-face qui peut être facilement être qualifiée de trahison... ou de couardise.. Les gens ont voté libéral, mais c’est comme si c’était le PQ qui était resté au pouvoir!

Véronique Hivon et Gaétan BarretteVision étrange: l’ancienne ministre péquiste Véronique Hivon et le ministre libéral Gaétan Barrette ensemble pour présenter de nouveau le projet de loi sur «l’aide à mourir». Comme dirait l’autre, «On n’a pas voté pour ça...»

On a ainsi vu une situation inédite: le projet de loi 52 réintroduit conjointement par le ministre de la santé libéral Gaétan Barrette, et l’ancienne ministre péquiste responsable du dossier, Véronique Hivon. Péquistes et libéraux travaillant main dans la main pour hâter la légalisation de l’euthanasie.

Selon les procédures parlementaires, réintroduire le projet de loi tel qu’il était au moment du déclenchement des élections nécessite le consentement unanime de tous les députés de l’Assemblée nationale, tous partis confondus. Or, le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, affirmait ce jour-là que le vote libre ne s’appliquerait qu’au vote en troisième lecture et non à la motion de réintroduction. Et il ajoutait que le projet de loi serait présenté sans aucun amendement, ni même ceux proposés par le Parti Libéral alors qu’il était dans l’opposition et qui avaient été battus par la majorité péquiste.

Autrement dit, ceux qui auraient voulu s’opposer à la réintroduction de ce projet de loi sur l’euthanasie auraient été expulsés de leur parti. C’était donc un vote libre... qui ne l’était pas tout à fait. Il existait réellement un acharnement à passer cette loi coûte que coûte, malgré l’opposition d’une grande partie de la population, et des médecins s’occupant des soins palliatifs, c’est-à-dire ceux qui sont justement en première ligne pour s’occuper des personnes en fin de vie.

Gerry SklavounosLes dés étaient pipés, la loi devait passer. Est révélateur à ce sujet ce qu’a dit avant le vote final au parlement le député libéral de Laurier-Dorion, M. Gerry Sklavounos (photo):

«C’est une obligation pour moi de pouvoir m’exprimer sur ce sujet avant qu’on puisse voter... J’ai siégé à cette commission itinérante. J’ai fait le tour, j’ai écouté les citoyens et je suis retourné avec les collègues en essayant d’écrire des recommandations. À un moment donné, je me suis rendu compte que le courant en faveur de l’aide médicale à mourir était fort, que j’étais contre le courant et que je risquais d’être emporté par le courant. J’ai choisi à ce moment-là de ne plus participer, de démissionner en quelque sorte de cette commission au lieu de signer des recommandations avec lesquelles je n’étais pas d’accord...

«J’ai réfléchi, j’ai lu, j’ai écouté, j’ai consulté. Je ne peux d’aucune façon considérer l’acte de provoquer la mort comme un soin. Lorsque j’ai des questions difficiles de ce genre-là, lorsque je suis confronté à des questions difficiles, je retourne aux sources, à mes origines, dont je suis fier, M. le Président. Permettez-moi de faire juste une citation. Je ne vais pas en faire d’autres. Le reste, ça va être dit très personnellement :

«Je ne remettrais pas à personne une drogue mortelle si on me la demandait, ni ne prendrais l’initiative d’une telle suggestion».

«Évidemment, ce ne sont pas mes mots. Ce sont les mots du père de la médecine, comme il est souvent mentionné, Hippocrate, cinq siècles avant Jésus-Christ. Mais, lorsque je retourne à ces sources et lorsque je réfléchis, c’est quoi un soin? On soigne pour guérir. On soigne pour aider une personne à être plus confortable. On soigne pour enlever des symptômes. Je ne peux pas considérer l’acte de provoquer la mort comme un soin. Un soin se passe durant une vie en essayant de l’améliorer. Provoquant le mort, c’est l’arrêt des soins, c’est l’arrêt des efforts, c’est la fin du processus de la vie. Et, pour moi, ça ne peut en aucun temps être un soin...

«La base, la première règle d’une société, je pense que c’est le premier commandement aussi, ça fait longtemps que je ne les ai pas regardés, c’est de ne pas tuer, ne pas enlever la vie. C’est ce que le droit criminel gère. Et ce n’est définitivement, pour moi, pas un soin.»

Réaction des évêques du Québec

Mgr Pierre-André FournierMgr P.-A. Fournier

Le 13 mai 2014, en la fête de Notre-Dame de Fatima, Mgr Pierre-André Fournier, archevêque de Rimouski et président de l’Assemblée des évêques catholiques du Québec, écrivait la lettre suivante:

«Le nouveau gouvernement du Québec a fait connaître son intention de remettre à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale un projet de loi sur les « soins de fin de vie » qui permettrait aux médecins de pratiquer l’euthanasie. Un tel projet de loi aurait des conséquences graves et néfastes pour l’avenir du Québec.

«Faire mourir n’est pas un soin. Les expressions mourir dans la dignité et aide médicale à mourir employées pour qualifier une injection mortelle sèment la confusion et induisent en erreur. Il s’agit purement et simplement d’euthanasie.

«Nous comprenons, bien sûr, l’angoisse et la peine de tous ceux et celles qui ont entendu un proche réclamer la mort pendant une difficile agonie. Personne ne peut rester insensible à cette détresse. Mais la vraie réponse de la médecine et de la société à cette situation, ce sont les soins palliatifs: ils sont la meilleure façon de soulager la souffrance de la personne approchant de la fin de sa vie et de l’aider à vivre cette étape ultime avec humanité et dignité.

«Les soins palliatifs ont fait leurs preuves. Nous avons au Québec toutes les compétences et toute l’expérience nécessaires pour les implanter dans toutes nos régions. C’est ce que nous espérons de l’Assemblée nationale: que le Québec se dote d’une politique sur les soins palliatifs et sur leur accessibilité universelle.

«Prions donc pour nos députés, afin que chacun et chacune sache ouvrir son cœur et sa conscience à l’action de l’Esprit-Saint. Et n’hésitons pas à communiquer avec eux — personnellement ou par lettre collective ou même par pétition — pour demander que tous les Québécois et Québécoises puissent bénéficier en fin de vie d’une véritable aide aux mourants sous la forme de soins palliatifs, et non de l’euthanasie, qui est le contraire des soins palliatifs.

«Au cours des prochaines semaines, que notre prière à ces intentions soit fréquente et intense et qu’elle soit nourrie de la Parole de Dieu et des sacrements. Prions individuellement, dans le cœur à cœur avec le Seigneur, et aussi en nous réunissant avec d’autres pour la liturgie, l’adoration, la louange et la récitation du rosaire. Et comme nous y invite la grande tradition de l’Église, associons à notre prière des actes de pénitence, de jeûne, de don de soi et de partage.»

Le 6 juin, lendemain de l’adoption de la loi 52, Mgr Fournier écrivait la lettre suivante, toujours en tant que président de l’Assemblée des évêques du Québec:

«L’adoption de la loi autorisant l’euthanasie en fin de vie sous le nom d’aide médicale à mourir nous cause une profonde déception et une vive inquiétude.

«La répartition du vote à l’Assemblée nationale — 94 députés «pour», 22 «contre» — reflète l’absence de consensus en notre société à ce sujet. Ils sont nombreux les citoyens et citoyennes qui ne peuvent accepter le fait qu’on considère comme un droit de pouvoir demander de recevoir une injection causant la mort.

«Nous comprenons, bien sûr, l’angoisse et la peine de tous ceux et celles qui ont entendu un proche réclamer la mort pendant une difficile agonie. La véritable réponse de la société et de la médecine à cette situation, ce sont les soins palliatifs: ils sont la meilleure façon de soulager la souffrance d’une personne approchant la fin de sa vie et de l’aider à vivre cette étape ultime avec humanité et dignité.

«Nous disons notre solidarité et notre soutien à tous ceux et celles qui œuvrent dans ce domaine des soins palliatifs. Nous espérons que ces soins seront offerts le plus tôt possible dans toutes les régions du Québec. Nous pouvons entendre le pape François nous redire: «Ne vous laissez pas voler l’espérance.»

«Au personnel médical qui sera confronté à des demandes d’euthanasie, nous souhaitons force et courage pour invoquer, le moment venu, le droit à l’objection de conscience. Notre soutien et notre prière vous accompagnent.

«Nous voulons redire enfin notre conviction profonde, qui est celle de l’Église, que la vie humaine doit être protégée et respectée jusqu’à sa fin naturelle. L’euthanasie, même légalisée, est tout à fait contraire à la dignité de la vie et de la personne.»

Oui aux soins palliatifs, non à l’euthanasie

Le cardinal Gérald Cyprien LacroixLe cardinal Gérald Cyprien Lacroix

Le 3 juin 2014, deux jours avant le vote final à l’Assemblée nationale, une vigile contre le projet de loi 52 s’est tenue devant le Parlement de Québec. Plusieurs personnes y ont pris la parole, y compris le cardinal Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec et Primat du Canada. Voici des extraits de son allocution:

«Au cours de notre histoire, notre peuple a dû lutter pour survivre et se faire respecter. Aujourd’hui, la vie est à nouveau menacée. Les personnes que nous avons élues pour nous représenter et nous gouverner s’apprêtent à voter sur un projet de loi qui vise à légaliser rien de moins que l’euthanasie. Le tumulte qui règne dans ce débat est dû, entre autres, à un vocabulaire nébuleux qui sème la confusion dans la population. On évite à tout prix de nommer explicitement le mot euthanasie. On insère sournoisement l’expression «soins de fin de vie» comme s’il s’agissait d’un soin de santé. Alors qu’un geste médical n’est JAMAIS posé pour provoquer la mort, mais pour guérir et soulager.

Le cardinal Gérald Cyprien Lacroix

«Nos élus ont essayé de nous convaincre qu’il y a un consensus de la population sur ce projet de loi. La réalité est toute autre. Il n’y a pas de consensus dans la population, pas plus qu’à l’Assemblée nationale. Plusieurs députés sont en désaccord ou très mal-à-l’aise devant le projet de Loi 52. Tout au plus, il y a une entente entre la direction des partis politiques pour appuyer ce projet de loi. J’ose espérer que chaque député pourra voter selon sa conscience et ses propres convictions et être respecté car les résultats de ce débat auront des conséquences très graves pour notre avenir comme peuple.

«Sur le terrain, en écoutant les gens de nos villes et villages, en échangeant avec les personnes les plus âgées et même avec des plus jeunes, nous entendons clairement l’inquiétude profonde que suscite ce projet de loi qui, s’il est accepté et devient loi, transformerait les médecins et le personnel soignant en agents et agentes qui non seulement soignent mais pourraient aussi donner la mort et faciliter le suicide assisté. Du jamais vu au Québec ! Je ne voudrais pas être dans les souliers d’un médecin ou d’une infirmière qui aurait à vivre avec cette lourde responsabilité. Dans la chambre 5 on fait tout pour soigner, soulager et sauver une vie. Dans la chambre 6, on injecte un médicament qui, sous prétexte d’un acte médical de soin de fin de vie, donne la mort. Ces deux réalités ne peuvent pas cœxister.

«On nous a bien rassurés à l’effet que ce projet de loi sur les soins de fin de vie n’a rien à voir avec la situation économique du Québec qui est très précaire, ni avec les coûts sans cesse grandissants reliés à la santé. Qu’il n’y a aucun lien à faire avec une population vieillissante qui coûte de plus en plus cher à soigner et qui vit de plus en plus longtemps. Non, on nous a bien rassurés que rien de cela précipite ce projet de loi, mais dans les conversations de bien des gens que je côtoie, ce n’est pas aussi clair dans leur esprit.

«On a essayé de nous faire croire que l’application de cette loi serait bien balisée, que nous n’avons rien à craindre, qu’il n’y aurait pas de danger de dérapage au Québec. D’autres pays d’Europe, qui ont déjà ouvert la porte à l’euthanasie avec les mêmes promesses, se retrouvent aujourd’hui devant une toute autre réalité.

«Prenons l’exemple de la Belgique qui a légalisé l’euthanasie en 2002. Au moment où l’euthanasie est devenue légale, on avait prédit qu’il y aurait très très peu de cas qui réuniraient les conditions nécessaires pour qu’une injection mortelle soit donnée. Avec les comités de médecins et les professionnels de la santé, qui accompagneraient le processus, les Belges n’avaient rien à craindre. Leur mort, (excusez) leur vie était entre bonnes mains.

«Où en sont-ils à peine 12 ans plus tard? Les derniers rapports nous révèlent que l’an dernier, 5 patients par jour ont opté pour une euthanasie, une hausse de 27% par rapport à l’année précédente. Est-ce cela que nous désirons pour le Québec? Je dis non! Et ce n’est pas tout. En février de cette année, la Belgique est devenue le premier pays au monde à légaliser l’euthanasie pour les enfants et adolescents, et ce, sans fixer de condition d’âge.

«Ça va s’arrêter où? Avec mes confrères évêques du Québec, moi je dis: n’ouvrons pas la porte à l’euthanasie. Les seuls soins de fin de vie qui sont dignes et acceptables pour notre population sont les soins palliatifs. D’ailleurs, une large proportion des médecins qui œuvrent en soins palliatifs depuis des décennies, et qui sont les véritables spécialistes de la question, sont contre ce projet de loi. Et nous les appuyons car ils savent de quoi ils parlent. Ils se sont souvent exprimés au cours de ce débat mais ils n’ont pas été très écoutés.

«Que notre gouvernement mette tout en œuvre pour offrir à la population des milieux urbains ainsi que des régions rapprochées et éloignées, des soins palliatifs pour bien accompagner les personnes en fin de vie. C’est ce que nous pouvons offrir de mieux aux Québécois et Québécoises afin qu’ils terminent leur vie dans la dignité. Nous n’avons pas le droit de détruire ce que nous ne sommes pas capables de créer; c’est-à-dire une vie humaine!

«C’est pourquoi je me joins à vous aujourd’hui, pour inviter les députés de l’Assemblée nationale du Québec à voter contre le projet de loi 52 tel qu’il est présenté actuellement. Développons sérieusement l’accès aux soins palliatifs partout au Québec et nous n’aurons jamais besoin d’euthanasie. Le peuple québécois peut relever ce défi s’il décide de le faire. Soyons des défenseurs de la vie humaine et devenons des chefs de file dans le respect de toute vie humaine. Notre avenir en dépend!

«Comme croyants, comme chrétiens et catholiques, nous continuons de prier afin que nos députés puissent prendre des décisions éclairées pour le bien-être de la population, des décisions qui respectent toute vie humaine.»

Le faux argument de la compassion

Dr Marc BeauchampMarc Beauchamp

Les partisans de la loi 52 disent que c’est une question de compassion que de laisser les gens choisir de mourir s’ils ne veulent pas souffrir, mais c’est un faux argument, puisque la médecine actuelle, avec les soins palliatifs, peut pratiquement éliminer toutes ces souffrances. Dans une lettre parue le 16 juin 2014 dans le Journal de Montréal, Dr Marc Beauchamp, chirurgien orthopédiste, signataire du Collectif des médecins contre l’euthanasie et président du groupe Vivre Dans la Dignité explique ce qui s’est vraiment passé dans les coulisses pour le passage de la loi 52:

«Ce n’est pas une question de souffrance dans les derniers jours que les tenants de la loi 52 visent. Ça c’est l’alibi, la justification morale, qui veut laisser croire qu’on veut cette loi pour ne pas laisser les mourants dans leur douleur. Pourtant, quand on est médecin on sait que nos moyens de traiter cette souffrance sont extrêmement efficaces, et mes collègues des soins palliatifs le savent mieux que n’importe qui. Ils sont donc allés présenter à la commission Mourir Dans la Dignité pour le faire savoir aux politiciens.

«À cette commission tous les médecins cliniciens actifs sauf un ont d’ailleurs plaidé pour ne pas introduire l’euthanasie/aide médicale à mourir dans le système de santé. Résultat: rien. Aucune mention de ces faits dans le rapport final.

«Plus tard, en commission parlementaire à Québec, les spécialistes en soins palliatifs sont retournés le réaffirmer aux membres de cette commission (formée presque exclusivement de supporteurs de l’euthanasie)... Résultat: rien encore. Pourquoi les députés ont ils choisi de ne pas les écouter?

«Sûrement pas parce que les médecins qui pratiquent en soins palliatifs sont des hurluberlus non crédibles, au contraire. Mais ces médecins trop scrupuleux menacent de bousiller le plan. Ces spécialistes de la fin de vie leur ont démontré que l’argument de la souffrance intraitable était un faux. Les supporteurs de la loi 52 ont décidé de le garder malgré tout comme arme de vente sous pression pour faire accepter la loi.

«Encore aujourd’hui les politiciens continuent contre toute décence de faire le spectacle de ceux qui s’intéressent aux patients à leur dernière agonie, alors qu’il appert que c’est à un tout autre groupe qu’ils espèrent éventuellement offrir la mort sur demande: ceux qui se savent malades et qui décident de mourir avant de souffrir, et un peu plus tard les personnes démentes (dernier article du rapport de la commission Mourir dans la dignité).

«Le processus menant à cette loi n’a donc pas été aussi démocratique qu’on le proclame en ce moment. Si on veut faire une analogie, on dira que c’est un peu comme si une commission étudiant les causes de l’effondrement d’un pont avait décidé après les avoir écouté de ne pas tenir compte des avis des ingénieurs en structure qui auraient déposé leur expertise… Dans un tel cas on parlerait d’un processus biaisé...

«Il y a une hypocrisie impressionnante qui se déploie devant nous, avec manipulation du vocabulaire, intention cachée, astuces de tromperie, et tout ça avance tranquillement grâce à la complicité des politiciens et des médias. Le problème ici c’est que ce dont il est question ce n’est pas de la couleur de la margarine, pas plus comme je l’ai mentionné plus haut de la douleur des gens. C’est de la vie et de la mort...

«Nous sommes plus de 600 médecins à avoir signé un manifeste disant que nous refusons de participer à ces mises à mort, et plusieurs centaines d’autre se joindront à nous quand ils comprendront que la menace est réelle... Cette loi doit plutôt ne jamais entrer en application car elle n’apportera pas le bien qu’elle nous promet, et elle apportera le mal qu’elle nous cache.»

Le premier ministre Couillard admet que malgré les balises, des dérapages sont possibles, et qu’il faudra demeurer «vigilants». Mais comme l’a fait remarqué Mgr Fournier, président de l’Assemblée des évêques du Québec, baliser l’euthanasie, c’est la banaliser. En légalisant l’euthanasie, même balisée, le premier ministre a ouvert une boite de Pandore qu’il ne pourra plus refermer ni contrôler. En se fiant à ce qui s’est passé en Belgique, c’est certain que des dérapages vont se produire.

Le combat se transporte maintenant devant la cour fédérale et les députés fédéraux, pour que la Loi 52 soit déclarée inconstitutionnelle. Prions et jeûnons pour que la défense de la vie prévale sur la mort!

Alain Pilote

Poster un commentaire

Vous êtes indentifier en tant qu'invité.