L'ordre social temporel chrétien (Art 4 Personne humaine et autorité)

le vendredi, 15 décembre 1939. Dans Réflexions

vd 15 déc 1939 p2 ; 565 mots

IV — PERSONNE HUMAINE ET AUTORITÉ

Nous savons déjà que toute société temporelle se compose de personnes humaines. Leur nature les rend forcément sociables et quand elles se groupent en société, c’est toujours pour réaliser un bien "commun". Comme il y a différents bien communs à poursuivre pour une personne humaine, différentes sociétés seront nécessaires pour les promouvoir, mais selon une hiérarchie, selon un ordre qui constitue précisément "l’ordre social chrétien". Or, un autre facteur, un autre élément d’ordre doit intervenir ici, pour assurer la réalisation du bien commun et l’épanouissement intégral de la personne humaine. On l’appelle "l’autorité" ou le "pouvoir".

1. Sans ce qu’on appelle l’autorité, la personne humaine ne peut se trouver en état de société ni réaliser aucun ordre social.

a) Toute société a pour fin un certain bien commun, le bien de tous et de chacun. Mais le bien commun est tout à fait distinct d’un bien particulier et lui est supérieur. Comme la puissance du réalisateur doit être à la mesure du bien à faire et que la personne humaine laissée à elle seule est incapable de réaliser le bien commun, il importe qu’une autre puissance entre en jeu. C’est l’autorité.

b) Nécessaire encore l’autorité pour mettre de la coordination, de l’harmonie, bref de "l’ordre" dans l’activité, une et multiple à la fois, de toutes les personnes humaines en travail de société.

"Le bien commun est donc l’objet propre de l’autorité et l’ordre collectif en est la fin." (P. Lachance).

2. De plus, sans une autorité agissante, la personne humaine ne peut mener une vie qui soit vraiment sociale, ni entrer dans un ordre qui le soit également.

a) C’est à l’autorité et non d’abord aux particuliers de concevoir le bien commun et l’ordre à introduire dans l’activité des personnes humaines pour y parvenir.

b) À l’autorité de le promouvoir ensuite, d’abord par des directions appropriées, car faire acte d’autorité doit être avant tout faire acte d’intelligence. Par les impulsions requises ensuite, car il s’agit d’entraîner une multitude de personnes humaines à une action concertée et vers une fin commune. À l’attraction de celle-ci, il faut ajouter la pression de l’autorité qui stimule, persuade et sait contraindre si le besoin s’en fait sentir. Par les précautions et les sauvegardes nécessaires enfin, à l’encontre de tous les égoïsmes particuliers et collectifs, à l’encontre aussi de tous les attentats commis à l’extérieur ou à l’intérieur et qui pourraient avoir comme conséquence de rompre l’équilibre ou l’ordre social.

3. Sans une autorité consciente enfin de ses droits et de ses devoirs, la personne humaine ne pourra pas se livrer à une activité sociale qui réalise le bien commun des différents groupes dont elle fait partie.

a) Toute autorité est faculté de gouvernement.

b) Le monde est gouverné par Dieu et conduit par son autorité suprême vers son bien commun. C’est une œuvre de sagesse infinie et de Toute-Puissance.

c) Les créatures intelligentes peuvent participer à cette autorité et remplir par ministère la fonction de gouvernant. De fait, Dieu fait appel à leur sagesse et à leur puissance pour conduire les autres vers les fins qu’ils doivent poursuivre en commun. Les droits et les devoirs inhérents à leur autorité seront donc mesurés par les différents biens communs à réaliser.

d) Ainsi la personne humaine ne pourra se livrer à une activité sociale valable que sous la direction et l’impulsion d’une autorité consciencieuse et compétente.

Père Thomas-M. LANDRY, o.p.

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