Enseignons la Démocratie Économique, pour un monde de justice et de paix

le vendredi, 01 mars 2019. Dans Démocratie économique

Le 30 septembre dernier, au nom de tous les participants congolais, l’abbé Clément Nsele (photo) a prononcé le discours suivant à Rougemont, pour la clôture de la session d’étude sur la Démocratie Économique (Crédit Social):

par l’abbé Clément Nsele

Nous, Congolais de la République Démocratique du Congo et de la République du Congo, participant à la session d’étude du 19 au 28 septembre 2018, avons l’honneur et le bonheur de prendre la parole à l’issue de ces assises organisées par les Pèlerins de Saint Michel, pour faire remonter nos convictions, nos impressions et notre engagement après avoir pris connaissance du Crédit Social.

Nous voulons avant toute chose exprimer notre action de grâce à Dieu qui nous a permis de participer à cette session de formation. Que son saint Nom soit béni. Notre gratitude s’étend aussi aux responsables (Mlle Thérèse Tardif et M. Marcel Lefebvre) et à tous les membres de l’œuvre des Pèlerins de Saint Michel pour leur accueil chaleureux et leur ingénieuse idée de vulgariser le christianisme appliqué. Que le Seigneur les comble de ses abondantes grâces pour pérenniser l’enseignement du Crédit Social afin de lutter contre l’Antichrist. Que toutes les personnes qui ont contribué à la réussite de ces journées trouvent ici notre profonde reconnaissance.

D’entrée de jeu, nous avons perçu la démarche trilogique à laquelle nous convie le Crédit Social. Autrement dit, le Crédit Social nous invite à nous poser les trois questions suivantes: Que dois-je savoir? Que dois-je faire? Que m’est-il permis d’espérer?

En effet, créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, l’homme est destiné au bonheur. La foi chrétienne traduit cette vie heureuse en termes de salut. Ceci dit, tous les biens de la terre doivent profiter à tous. Dans un autre registre de langage, on parlerait de la destination universelle des biens. Seulement voilà, on s’aperçoit du déséquilibre social sinon du scandale de la pauvreté devant l’abondance. Certains vivent dans l’opulence et d’autres dans la misère. Cette situation inacceptable a permis à Louis Even de remettre en question les structures et mécanismes financiers pour jalonner un vivre ensemble en société. Pour sa part, Louis Even estime que le Crédit Social (Que dois-je savoir?) est la confiance qui doit régir nos relations dans la cité. Ce procédé résout le problème de la pauvreté face à l’abondance des biens de la terre. Il accorde un dividende, c’est-à-dire l’héritage commun des richesses de la terre, à chacun pour augmenter son pouvoir d’achat. Il prône la jonction des biens aux besoins pour l’épanouissement de l’homme.

Si d’un côté cette théorie du Crédit Social, proposée par Louis Even et dont la paternité remonte à Clifford Hugh Douglas, proscrit le prêt avec intérêt pour autant que l’intérêt serait de l’argent créé du néant, elle postule en revanche le juste prix. Cette théorie combat également l’égoïsme des banquiers et leur dictat dans les affaires gouvernementales. Finalement, le Crédit Social vise le développement intégral de la personne humaine dans toutes ses dimensions (physique, spirituelle, économique, politique, sociale, etc) par le don de soi et le dévouement. Dès lors, on remarque que cette spiritualité du partage recommandée par Louis Even ne s’oppose pas à la doctrine sociale de l’Église, mais la renchérit.

En égard à ce qui vient d’être dit, nous avons l’outrecuidance d’affirmer que le Crédit Social nous appelle à rendre compte de notre espérance (Que dois-je faire?) dans nos différentes communautés de vie (1P 3, 15). Car la foi écoute le monde. Cet engagement rejoint le vœu des pères conciliaires: «Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses du disciple du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur» (Gaudium et Spes, n° 1).

Sur ces entrefaites, nous, créditistes de la République Démocratique du Congo et de la République du Congo, sommes conscients de la crise multisectorielle que traverse nos pays. Nous n’irions pas sur le dos de la cuillère pour dire que nos pays sont politiquement désaxés, économiquement grabataires, moralement anémiques et spirituellement aux abois. À l’instar de l’assistance du Bon Samaritain à l’homme descendant de Jérusalem à Jéricho roué de coups par les bandits, nous sommes invités à venir en aide à nos populations marginalisées par l’enseignement du Crédit Social pour l’inauguration d’un monde de justice et de paix.

De plus, à première vue, quiconque lit l’enseignement sur le Crédit Social aurait l’impression d’avoir affaire à un projet chimérique. Loin s’en faut. Après nous être imprégnés du Crédit Social corroborant la doctrine sociale de l’Église, il nous paraît que l’établissement et la propagation de cette théorie sont un travail de longue haleine. C’est la raison pour laquelle nous pouvons espérer un lendemain meilleur (Que m’est-il permis d’espérer?). Cet engagement pour un monde plus juste est une responsabilité de tout chrétien.

Bien que cette tâche ne soit pas une sinécure, nous avons le droit d’oser pour attaquer le mal à sa racine et promouvoir l’épanouissement de la famille et de la société. C’est ici que résonne à merveille dans nos oreilles les paroles suaves et savoureuses du psalmiste: «Il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d’être unis (Ps 132, 1)».

Au demeurant, cette session d’étude sur le Crédit Social nous convie à nous opposer aux systèmes et mécanismes financiers répondant aux appétits d’un gouvernement mondial; à ne pas nous exposer aux offres des banquiers dont les idées sous-jacentes sont toujours mercantiles; à décomposer et à recomposer l’enseignement sur le Crédit Social pour sa meilleure appréhension; à proposer un christianisme appliqué au regard de l’insolence de la richesse devant la pauvreté; à nous imposer où que nos soyons par notre spiritualité du don de soi (service et dévouement); à composer avec les décideurs du monde dans la quête d’un meilleur vivre ensemble; à transposer d’ores et déjà le Crédit Social dans chacune de nos communautés respectives et à oser témoigner de notre foi en Jésus-Christ par une conduite digne et juste.

Ce n’est pas tout. Au terme de ces assisses, nos impressions sont plus que satisfaisantes. Nous remercions Monsieur Alain Pilote qui, avec sa clairvoyance digne d’admiration, nous a transmis avec compétence l’enseignement sur le Crédit Social. Grâce à lui, nous y avons découvert le système asservissant l’homme plutôt que de le servir. À notre sens, cette formation reçue nous offre des balises pour remédier aux obstacles du vivre ensemble. Nous apprécions également la transversalité des thématiques secondaires au Crédit Social. La question de la bancarisation et de la sous-bancarisation, la problématique de la portion à donner à la machine et à l’homme sont un exemple probant.

Nous estimons que le cadre qui nous a accueilli est propice. Il favorise non seulement une bonne application, mais aussi un bon recueillement pour que notre action reçoive sa rigueur et sa vigueur en Dieu dans la prière. Nous suggérons aux responsables de l’institut Louis Even la production des films et des bandes dessinées vulgarisant le Crédit Social.

Tout compte fait, nous venons de nous informer sur le Crédit Social, nous nous sommes également indignés de la pauvreté en face de l’abondance. Il nous reste maintenant à nous impliquer. Pour ce faire, nous envisageons notre implication dans la sensibilisation des masses en créant des groupes de réflexion autour des idées de Louis Even; en renforçant les comités déjà existants dans nos pays respectifs; en organisant des séances de restitution de cette session d’étude que nous avons suivie; en favorisant les structures de micro-finance sans intérêt dans le respect de la personne humaine. Je vous remercie.

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